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bénédiction méchané ète habriot et racisme

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XDM
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Kvod harabanim,

Bonjour,

j'ai pu observer dans un sidour, dans la partie consacrée aux "bénédictions diverses", la bénédiction suivante, avec sa notice :

"En voyant un homme de couleur ou anormal :
Barouh ata Hashem elokeinou mele'h aolam, méchané ète habriot".

Dans un autre sidour, il est mentionné :
"En voyant quelqu'un qui est anormal (à faire tous les 30 jours)".

Je pose donc la question qui nous vient immédiatement :

Mais qu'est-ce que cette bra'ha??? Quelle en est la signification??
J'ai peine à croire que la Torah nous demanderait de louer D.ieu pour un homme anormal ou de couleur et, pire, qu'elle assimilerait les 2, comme cette formulation le laisse à penser... D'autant que je suis certaine que cette dernière supposition est tout simplement fausse.

Ma première intuition est que la notice est erronée... mais je vous serai très reconnaissante de clarifier cette question, sur le fond et la forme, s'il vous plaît.

Merci d'avance pour cela et pour tout ce que vous faites.

Et kol touv!
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6656
Vous posez essentiellement deux questions :

1) pourquoi remercier D. d’avoir créé un homme anormal ?

2) comment assimiler un homme de couleur à un homme anormal ?

Pour la première question, c’est comme la brah’a sur une mauvaise nouvelle –barou’h dayan aémet- qui signifie que nous sommes conscient que D. est un juge équitable, qu’aucune souffrance ne sera oubliée par ce Juge suprême et que ce qu’Il fait est voulu pour le bien.


Passons à présent à la deuxième question qui me semble être l’étonnement essentiel :

Afin d’éviter d’emblée le malentendu, je précise que la gmara Bra’hot (58b) qui indique de dire cette bra’ha sur un noir, parle au même titre de dire la même bra’ha sur un blanc (très blanc).

On parle du Koushi ET du Lavkan (= très blanc) comme de celui qui est très rouge.

De plus, selon le Méiri, la bra’ha est sur l’étonnement mais n’a rien à voir avec une échelle de valeur, comme on est étonné des différences dans la création, on bénit D. pour ces différences.

On ne peut parler de cette bra’ha qu’à une époque (et dans un endroit) où l’on ne voyait presque jamais de noirs, ni de « trop blancs », dire cette bra’ha de nos jours serait assurément une bra’ha levatala.

La question serait en cela déjà répondue, n'était-ce que selon le Ritva (que -par souci d'honnêteté- je ne saurais vous cacher) la bra’ha a été instaurée sur un défaut physique inhabituel.

C’est-à-dire qu’en sus de l’étonnement, il y a un jugement de valeur et l’on considère comme un défaut physique le fait d’être noir -ou blanc.

Toutefois, même d’après le Ritva, il est écrit dans le shout Ala’hot Ktanot (I, §240) que c’est uniquement si les parents de ce noir sont tous deux blancs, sans quoi il n’y a rien d’anormal (meshané abriot) que deux noirs enfantent un noir.

Selon le Raavad (-tshouvot §202, cité dans le Tour o’’h §225 ) on ne dira cette bra’ha que sur un noir qui est juif.

Même si pour le Ba’h (o’’h §225) ces paroles du Raavad se rapportent à la bra’ha dayan aémet, pas à meshané abriot, ce qui n’est pas l’opinion du Beth Yossef ni du Prisha (ot 7) pour qui le Raavad parle bien de meshané abriot.

[Au passage, vous retranscrivez Meshané ète abriot, comme indiqué dans les sidourim sfarades, mais dans le Tour et le Shoul’han Arou’h (o’’h §225, 8), c’est Meshané abriot (sans ète).

Dans la gmara (bra’hot 58b) les deux apparaissent, mais là où le ète manque, on trouve une correction du Dikdoukei Sofrim qui avait le mot ète dans les deux endroits.

Dans la Tossefta (bra’hot VI, 6) il n’y a pas le ète.

Il semble que les sfaradim disent ète et les ashkenazim non.]


En résumé, on ne dit cette bra’ha sur un noir qu’à une époque et dans un pays où il n’y a généralement jamais de noirs et uniquement si c’est un juif et de deux parents blancs.

Selon le Méiri, la bra’ha existe seulement pour l’étonnement [ce qui semble bizarrement avoir échappé à Rav Elyashiv dans Shaar Aayin (p.420) et Ashrei Aïsh (o’’h §38, 18) pour qui il n’est nulle part mention d’étonnement concernant cette bra’ha], selon le Ritva elle indique aussi qu’être noir (ou blanc) serait moins bien (moins beau ?) physiquement.

Bien sûr , les goûts et les couleurs ne se discutent pas, si dans l’esprit du Ritva les ‘hazal avaient une préférence pour une couleur « moyenne » -ni blanc ni noir, cela n’impose rien à personne en matière de goût, de telle sorte que même à leur époque où on ne voyait jamais un noir dans la rue, celui qui en rencontrait un n’était tenu de faire cette bra’ha QUE si on considérait que c’est un défaut ;
l’idée est de bénir car on souffre pour son prochain qui est noir (ou blanc) (et donc sujet à moqueries de la part de vils personnages, ou au moins car il se sent différent des autres, ce qui n’est pas agréable, c’est pourquoi, dans le cadre de cette association à la souffrance d’autrui, on dit une bra’ha à l’instar de Dayan Aémet qui se dit aussi lors d’une souffrance).

Donc si on ne souffre pas pour lui, si être noir n’est pas être différent de tout le monde car il y en a plusieurs, il n’y a pas lieu de faire cette bra’ha.

On trouve dans des écrits de Rashi ci et là qu’il considérait les noirs comme moins beaux, bien sûr cela n’engage que lui et on serait tenté de dire que Moshé Rabeinou ne partageait pas son avis car il a épousé une noire (Bamidbar XII, 1).

Je sais que les ‘hazal ont dit à ce sujet (Moed Katan 16b) que cela signifie qu’elle avait de bonnes midot, il y a aussi ce qu’écrit Rashi sur place que c’est une manière de parler de sa beauté (c’est un des rares endroits où Rashi se permet une interprétation personnelle, car cette explication ne lui vient pas des ‘hazal comme le souligne le Reèm (ad loc), voir aussi Siftei ‘ha’hamim. Rashi trouve cependant certainement une base à son explication à partir du Targoum qui traduit koushit par « belle » -shapirta et Rashi se base probablement sur cette même source pour son commentaire de Souka 53a d’’h trei koushaei), ce qui est contesté par le Ibn Ezra (ad loc) qui cependant ira toujours dans le même sens concernant notre problématique ; selon lui la noirceur de Tsipora la rendait laide.

Selon le Rashbam, il ne s’agît pas de Tsipora (cette dernière étant midianit et non koushit) mais d’une seconde épouse qui était koushit, noire.
Là, il ne s’agît pas de dire qu’elle serait moins belle.

Dans les textes de ‘hazal nous trouvons plutôt une idée d’étrangeté (que de mocheté) liée à la noirceur de la peau, voir Moed Katan (16b) et Yalkout Shimoni beaalote’ha (§777-778).

Un autre Rashi qui va dans ce sens (que les noirs seraient moins beaux) se trouve dans Bereshit (XII, 11), là encore, il s’agît –à ma connaissance- d’une interprétation qui lui est purement personnelle.

Et à partir des ‘hazal, elle ne semble pas confirmée du tout puisqu’ils ont dû trouver une autre explication au problème pour lequel Rashi parle. Voir dans le Midrash Bereshit Raba (XL, 4).

Et là encore, le Ibn Ezra (ad loc), sans être d’accord avec Rashi sur son explication locale, en donnera une autre qui va toujours dans le même sens concernant notre sujet. Mais le Ramban par exemple sera en désaccord avec ce qu’écrit Rashi.

En fait, Rashi et le Ibn Ezra trouvaient que les noirs sont moins beaux, mais c’est toujours des interprétations personnelles et qui n’engagent qu’eux.

Cependant, nous trouvons des enseignements des ‘hazal qui indiquent aussi que les noirs seraient moins beaux, comme la mishna de Nedarim (66a) ou noir semble être assimilé à moche.

Il y a aussi des psoukim desquels il est facile de voir une appréciation négative de la noirceur de la peau, comme dans Jérémie (XIII, 23) ayaafo’h koushi oro… ou encore dans Shir Ashirim (I, 5) sh’hora ani venaava… mais ces sources peuvent être interprétées autrement.

Il y a dans la Mishna de Negaïm (II, 1) une phrase qui fera dire au Tiféret Israel (Boaz 2) qu’être très blanc –comme un allemand- est plus beau.
Cependant du Piroush amishna du Rambam (ad loc) il ressort le contraire : être trop blanc -comme être noir- serait moins beau, l’idéal serait « comme les juifs » d’être entre les deux.
C’est aussi ce qui ressort du Bartenora (ad loc).

Le Tiféret Israel était allemand, certes, mais en venant expliquer les paroles de Rabbi Yishmael selon ses propres critères de beauté, il semble contredit par Bra’hot (58b) qui institue de dire aussi meshané abriot sur un « trop blanc ».
Voir aussi dans Bra’hot (31b) d’où il ressort qu’être trop blanc n’est pas un atout .

Ce même rabbi Yishmael disait que les juives sont belles dans Nedarim (66a), ainsi, puisqu’il dit dans Negaïm (II, 1) que les juifs ne sont ni trop noirs ni trop blancs, mais « benonim » ( ce qui sera tout de même plus proche du blanc que du noir, voir Sotah 26a ), c’est donc qu’il trouve ce teint plus joli.

Il semble par conséquent que les ‘hazal partageaient plutôt les goûts du Rambam et du Bartenora.

Je pense qu’on ne peut pas parler ici de racisme (envers les noirs et les trop blancs), on trouve au fil des siècles, des textes indiquant une préférence pour les blancs, François Bernier qui fût un grand voyageur au XVIIème siècle, rédigea un article hiérarchisant l’humanité en cinq groupes raciaux (en fonction du prix de vente des êtres humains sur le marché des esclaves !) (publié en 1684 dans le Journal des Savants), il y donnait la préférence aux blancs.

Cependant, il faut distinguer la « préférence physique», qui fait appel à la subjectivité des goûts, du racisme. Ce dernier indiquant une valeur de la personne, pas de sa beauté.

Autrement dit, celui qui n’aime pas les roux n’est pas raciste –même si on arrivait à rattacher la rousseur à une race- tant que ce « goût » n’est pas un jugement de valeur de la personne, mais seulement de sa beauté.
Il aime la personne rousse, ce qu’il n’aime pas c’est son aspect extérieur mais cela n’entraîne pas de sa part une quelconque animosité à l’égard des roux.

Trouver une race moins jolie qu’une autre ne signifie pas être raciste.

Trouver que les juifs ont de gros nez ne signifie pas être raciste, tant que cela n’entraine pas un mépris ou une haine à leur encontre.

Est raciste celui qui considère qu’une race est moins méritante, moins bonne, moins valeureuse qu’une autre.

Considérer une race comme « supérieure » à une autre est du racisme, mais avoir une préférence concernant l’aspect physique est tout à fait légitime, de la même manière qu’à l’intérieur de cette race, il y aura encore des préférences pour tel ou tel aspect physique, chacun selon ses goûts.

Le fait que les ‘hazal avaient une préférence pour le physique des sémites et ne trouvaient pas jolis les caucasiens comme les noirs, n’a rien à voir avec le racisme car ils n’éprouvaient pas de mépris envers ces autres races en raison de la couleur de leur peau.

C’est pourquoi ils acceptaient des candidats à la conversion sans distinction de couleur.

Nous trouvons non seulement des convertis noirs, mais même un sage du Talmud était noir, koushi selon Rashi.
Il s’agît de R. Yehouda Indoua, voir Rashi Kidoushin (22b).

Le terme Indoua ferait plutôt penser à un indou, c’est Rashi qui –en référence au Targoum- explique qu’il était de erets Koush, mais d’autres (comme le Arou’h) proposeront d’autres explications.

En fait il y avait même un deuxième Amora noir selon Rabenou Tam dans Yevamot (101b), Rav Shmouel Bar Yehouda serait aussi un converti noir, fils de Rav Yehouda Indoua (d’avant sa conversion).

Je m'arrête-là sans me relire, il est possible que ma réponse paraisse quelque peu décousue car j'ai dû m'interrompre à de multiples reprises pour calmer des pleurs nocturnes d'enfants.

Si ma réponse s'avérait insuffisante, veuillez me l'indiquer.
XDM
Messages: 11
Bonjour Rav et merci pour votre réponse.

A vrai dire, la première question était aussi un étonnement essentiel, mais je n'avais pas pensé à assimiler cette braha à Barouh Dayan haEmet, cela fait grand sens.

Concernant la deuxième question, je vous remercie de l'éclaircissement.

Il me vient une remarque et une autre question:
Remarque: comment se fait-il qu'un sidour édité aujourd'hui mentionne cette braha avec cette notice, sachant que d'une part cela peut entraîner le public à fauter en disant une braha levatale, et d'autre part, cela peut suggérer que la Torah serait raciste ou discriminatoire 'has vechalom.
Serait-ce d'après vous utile/souhaitable/indispensable de contacter l'éditeur de ces sidourim?

Question: en lisant votre réponse, je suis quand même étonnée de l'importance de la subjectivité dans les réponses des 'ha'hamim, concernant la beauté. Je me demande en quoi c'est important, pourquoi le mentionner...
Et cela m'amène à interroger le sens d'une autre bra'ha :
"A la vue de beaux arbres, de beaux animaux, de beaux hommes:
barouh ata Hashem elokeinou meleh haolam, shéka'ha lo béolamo".
On a naturellement et instinctivement le désir de louer Hashem à la vue de quelque chose de beau/grandiose etc.
Mais en réalité, la beauté n'est-elle pas uniquement subjective? Ou bien la Torah nous donne-t-elle une valeur absolue de la beauté, notamment la beauté des êtres humains?
Si c'est subjectif, je suis étonnée que les 'ha'hamim aient institué une braha sur la beauté associant le nom d'Hashem. Pour les uns ce pourrait être indiqué, pour d'autres une bra'ha levatala!
Et cela même au sein du peule juif, puisque nous sommes constitués de toutes les origines ethniques possibles, et vivons aux 4 coins du monde.

Si vous le souhaitez, j'ouvre un autre post pour cette question.

En tous cas, merci beaucoup Rav.
Kol touv et hatsla'ha.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6656
Klal gadol : il ne faut pas prendre le sidour pour un rav, encore moins pour un possek.

Le sidour n’est qu’un livre dont la sagesse ne saurait dépasser celle de son auteur (éditeur).

Il se trouve que les auteurs de sidourim n’ont pas inscrit cette bénédiction suite à l’étude de la page 58b de massé’het Bra’hot, mais seulement parce qu’ils ont copié les textes d’un précédent sidour qui lui aussi avait été rédigé de la même manière et ce, depuis des générations.

Il y avait bien à l’origine un auteur instruit, mais comme nous l’avons dit, les époques changent et en son temps –dans son pays, les noirs ne couraient pas les rues.

Il y aurait tout aussi bien pu y avoir la bénédiction meshané abriot dans un sidour yéménite du XVIIIème siècle avec indication « se dit à la vue d’un homme très blanc ».

Ça c’est pour le problème de bra’ha levatala.

Ce n’est pas que l’auteur ne s’en soucie guère, c’est juste qu’il a copié la bra’ha d’un ancien sidour et ne sait pas que ce n’est plus applicable de nos jours à Paris.


Pour le second problème, que cela suggère que la Thora serait raciste, il y a là un réel problème ;

Récemment, quelqu’un m’a demandé ce que je pensais d’un « rabbin » (qu’il n’a pas nommé, je ne garantis pas l’appellation) qui serait clairement raciste. Il se trouve que sa xénophobie ne s’exercerait pas exclusivement à l’encontre des noirs mais aussi –et surtout- des blancs, enfin je veux dire des français non juifs. Il ressentirait et exprimerait un profond dégoût des « français ».

En dehors du non-sens lié au fait que nous prions pour la France et son peuple à la synagogue, mon interlocuteur comprenait bien que cette position ne saurait être en phase avec la Thora, mais se sentant dépassé par les connaissances de son « rabbin » raciste, il ne pouvait le contredire et sollicitait mon opinion.

En substance, je lui ai dit que ce pseudo-rabbin était clairement et explicitement condamné par la Thora elle-même, par un verset explicite du Pentateuque :
(Deutéronome XXIII, 8)
Lo Tetaev Edomi (n’aie pas en horreur l’édomite).
(Edom représentant toujours Essav et les peuples européens)

C’est tout de même fort de pouvoir s’égarer à ce point dans la Thora !

J’en déduis donc que les choses ne sont pas assez claires dans la tête des juifs français concernant la position de la Thora sur le racisme.
Ce dernier est clairement condamné dans nos textes sacrés, surtout dans le Talmud.

Je ne peux pas m’engager concernant la position des juifs réformés, libéraux ou massortis (et autres mouvements « modernes ») qui n’acceptent pas (pleinement) l’autorité du Talmud, mais pour les juifs traditionalistes & orthodoxes, il n’y a pas de doute, le racisme est défendu et repoussé par la religion elle-même (et pas seulement par le bon sens).

Le Talmud dans Sanhedrin (37a) dira que D. créa l’homme seul (un seul couple) afin que toute l’humanité ait le même ancêtre afin d’éviter qu’un jour l’un puisse dire à l’autre « mon ancêtre est d’une race plus pure que le tien ».

Chacun peut devenir candidat à la conversion, peu importe sa couleur de peau, il n’y a pas de discrimination à ce niveau dans la Thora.

Il y a encore beaucoup à dire sur le sujet…


Concernant le dernier point de la "remarque", prévenir ou non l’éditeur, vous demandez si c’est « utile », « souhaitable » ou « indispensable ».

Je crois que c’est plutôt « charitable » mais je doute du résultat.

Il est clair que si ça ne coûte rien d’essayer, il le faut.


J’en viens à la "question", je vous cite :
Citation:
concernant la beauté. Je me demande en quoi c'est important, pourquoi le mentionner...

Au passage, je souligne une idée qui semble méconnue (ou méprisée) dans le monde ultra-orthodoxe israélien:

Contrairement à ce qu'ils pensent, la beauté a son importance!
Il faut savoir être sensible et apprécier la beauté.
Il ne faut pas malmener de beaux objets en pensant ainsi matérialiser notre indifférence pour le monde matériel.

Cela ne veut pas dire qu'il faille accorder au matériel l'importance du spirituel, bien sûr, mais il faut tout de même savoir en prendre soin.

Je sais que je serai condamné comme matérialiste et Kofer pour professer une telle ashkafa, mais c'est pourtant la ashkafa des 'Hazal telle qu'ils l'expriment plus ou moins explicitement en de maints endroits!

Voyez par exemple Rashi Dvarim (XIV, 1) sur lo titgodedou : car vous êtes les enfants de D. et il vous sied d'être beaux...

Rashi Shemot (XXVI, 13) la thora nous enseigne qu'il faut savoir être sensible au beau ('has al ayafé)
La source de ce Rashi se trouve dans la braïta des mem tet midot (otsar amidrashim p.295) et le Yalkout Shimoni shemot (§442).

Voir encore Rabeinou Be'hayei (Ba'hya) sur Shemot (XXVI, 7).

Voir aussi la gmara Psa'him (64b) où l'on se soucie d'esthétique (éla dea'hi shapir tfei)

Et il y a encore beaucoup de textes soulignant la beauté physique de certains personnages bibliques et talmudiques.

Je sais que le phénoménal génie de monsieur Chouchani s'opposait lui aussi à conférer une quelconque importance à la beauté (cf. sa "biographie" par Salomon Malka page 42 et une autre, je ne me souviens plus laquelle), mais je doute que ce mouvement parmi les religieux trouve son origine chez ce personnage extraordinairement farfelu.


Votre question:
Citation:
Mais en réalité, la beauté n'est-elle pas uniquement subjective? Ou bien la Torah nous donne-t-elle une valeur absolue de la beauté

Je ne dirais pas que la beauté est un critère totalement subjectif, cependant, les limites de l’objectivité de ce critère le sont (subjectives).

Je veux dire qu’il y a bien une part d’objectivité dans l’affaire ; Grosso modo tout le monde s’accordera à trouver moche quelque chose de très laid et à trouver beau quelque chose de magnifique.

Mais il reste bien entendu une bonne part absolument subjective qui varie d’une époque à l’autre d’un endroit à l’autre et d’un individu à l’autre.

Les Sages ne peuvent donc parler que de ce qui est –à une époque et dans un endroit- unanimement considéré comme beau ou laid.

Selon Rashi et le Ibn Ezra, à l’époque des Sages, la laideur du noir était établie. Selon d’autres c’est faux.
Mais même d’après Rashi et le Ibn Ezra il n’y a pas là de recommandation.
A chacun d’apprécier ce qu’il apprécie.

C’est comme si Rashi écrivait sur un aliment qu’il n’est pas bon –par exemple : car trop sucré (et qu’on ne fait pas de bra’ha si on doit en manger pour des raisons médicales…).
Si aujourd'hui -les goûts pour le sucre ayant évolué- on trouve ce plat délicieux, on en a le droit ! (et on devra faire la bra’ha).

L’appréciation d’un rabbin sur un thème qui relève des goûts n’engage personne en dehors de lui !

Même si on suppose qu’à son époque/endroit tout le monde considérait cet aliment comme exécrable, si de nos jours ce n’est pas le cas, nous n’avons pas à nous soucier de ce qu’ils pensaient.

J’en reviens à votre question : la Thora ne nous donne pas des critères précis de beauté. Il y a ce que « tout le monde » trouve beau ou moche et il y a tout le reste ou chacun se positionne à sa manière.

L’appréciation négative de la couleur noire que nous rencontrons chez quelques rishonim est propre à une époque et il ne s’agît pas d’un critère universel valable pour chaque génération.
La preuve : il y a des blancs qui préfèrent les noirs !

Là-dessus, la beauté est un critère subjectif. Ces rishonim parlent par rapport à leur époque/endroit seulement.

Le fait de ne jamais rencontrer de noirs (c’était leur cas) favorise forcément cette appréciation négative, car tout ce qui parait étrange et différent de la TOTALITE de nos contemporains est systématiquement jugé comme laid.

Imaginez quelqu’un avec le nez sur le front, est-il beau ? Bien sûr que non, mais pourquoi ? car c’est du jamais vu. Si nous avions tous l’appendice nasal fixé si haut, nous trouverions moche et « anormal » celui qui l’aurait là où nous l’avons aujourd’hui.

La bra’ha dont on parle dit barou’h MESHANE abriot, l’idée est le shinouy, l’anomalie.
Est-ce que le fait d’être noir est « anormal » ? Tout dépend de la « norme ». à leur époque, c’était anormal tout comme être très blanc.
De nos jours, non.

Donc à leur époque la bra’ha meshané abriot était évidente (et objective) à la vue d’un noir.

Et encore une fois, même les rishonim qui trouvent que le noir est moche, n'en venaient pas pour autant à une quelconque discrimination. Ils n’allaient pas les mépriser ou les maltraiter à cause de leur couleur, cet amalgame est digne des idiots qui ne considèrent que l'aspect extérieur d'une personne.

Une dernière chose, je m'excuse de l'aspect décousu que revêt très certainement ce message, j'ai dû m'interrompre à d'innombrables reprises lors de sa rédaction -et même dans cette petite phrase!
XDM
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Limpide, 1000 mercis !
Kol touv
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