Citation:
Ma question concerne les hommes car sur eux incombent la mitsva de se marier. A priori, pour toute mitsva un homme doit réaliser le maximum de ichtadlout pour « y arriver » : acheter un -me meilleur- etrog, construire la soucca, faire une brit mila sans pouvoir espérer que cela tombera du ciel. Néanmoins il semblerait que pour trouver son chidoukh ce ne soit pas le cas. On m’a cité un Gaon de Vilna sur le Zohar (ou Michlé) qui le dirait plus ou moins explicitement.
Avez-vous connaissance de ce commentaire du Gaon ?
Par ailleurs avez-vous d’autres avis sur la ichtadlout dans la recherche du chidoukh ?
Je sais que c’est ce qu’on dit, au nom du
Gaon, qu’il n’y a pas besoin de faire de hishtadlout, ou qu’il ne faille pas faire hishtadlout en matière de shidoukhim, puisque de toute façon dès 40 jours avant la formation du fœtus, une Bat Kol a déjà annoncé qui épousera qui
(Sotah 2a et Sanhédrin 22a).
On ajoute même que le
‘Hafets ‘Haim aurait donné un Mashal en comparant la Hishtadlout pour le mariage à celui qui pousserait un train ; tant qu’il ne démarre pas ses efforts seront vains, et une fois qu’il a démarré ses efforts sont toujours vains et superflus.
Bref, c’est connu et répété, mais essentiellement dans le monde lituanien, c’est une idée lituanienne.
J’ai beaucoup de mal à croire que cela exempte de toute Hishtadlout, voire que ça l’interdise.
Il faudrait s’ingénier ou entrer dans des Do’hakim pour expliquer certains textes, comme dans
Kidoushin (2b) שדרכו של איש לחזר על אשה. Voir aussi
Nida (31b).
Et puis en lisant les choses simplement, ce n’est pas ce qui ressort : pourquoi Yaakov Avinou a eu besoin de travailler 7 ans ? Il ne savait pas que la Hishtadlout ne servait à rien en matière de Zivoug ? [Voir aussi
Sefer ‘Hassidim (§383), et il se pose la question lui-même (en considérant la Bat Kol), mais sa réponse prouve que ce n’est pas une particularité dans les shidoukhim puisqu’il compare cela à Nathan Hanavi…]
Et pourquoi Avraham envoie Eliezer à la recherche d’un Shidoukh pour Its’hak ? N’est-il pas au courant que toute Hishtadlout est superflue ?
Et comment expliquer qu’en dépit de l’interdit de vendre un Sefer Torah, cela soit autorisé si c’est pour se marier
(Shoul’han Aroukh Y’’D §270,1) ?
Si la Hishtadlout ne sert à rien, pourquoi autoriser la vente du Sefer Torah ?
On pourrait dire que si la Hishtadlout ne sert à rien, c’est seulement sur le choix de la personne, mais pas sur le moyen de financer l’opération…
Mais si tout est entièrement piloté Min Hashamayim pour le choix de la personne et qu’il n’y a rien à faire, pourquoi autorise-t-on les fiançailles (kidoushin) pendant ‘Hol Hamoed de peur qu’un autre le devance
(Moed Katan 18b) ? pourtant מה' אשה לאיש, non ? (Idem pour Avraham qui envoie Eliezer -cité plus haut.)
Et que dire de cette autre Halakha autorisant de sortir d’Erets Israël si c’est pour se marier ? Pourquoi l’autoriser si de toute façon il se mariera avec la bonne personne ? Ne serait-ce pas une Hishtadlout que de voyager et quitter Erets Israël ?
Et s’il n’y a aucun effort à faire mais seulement à attendre que le Zivoug arrive, pourquoi le
Talmud (Brakhot 34b, Sanhédrin 99a, Ktouvot 111b) souligne l’importance de/ et encourage à chercher un érudit pour gendre ??
Et on trouve aussi une recommandation soulignant l’importance de marier ses enfants à un âge précis (Samoukh Lepirkan)
(Sanhédrin 76b, Yevamot 62b).
(on peut dire que c’est pour régler l’âge, mais la personne elle-même est déjà fixée. Mais cette recommandation semble inviter l’homme à la Hishtadlout, sinon, il devrait attendre que le conjoint tombe du ciel et il est inutile de d’encourager à marier ses enfants Samoukh Lepirkan.)
Je ne sais pas comment il faudrait expliquer cette parole du
Gaon (-si elle existe), et quelle oumkimta faut-il faire pour que cela ne soit pas contredit par nos Sfarim, mais il me semble que les compréhensions habituelles de cette phrase sont exclues ou à tout le moins difficiles.
Il y a une source qu’on indique, dans le commentaire du
Gaon sur le
Zohar, Yahel Or (sur les Heikhalot, Heikhal VI, Pekoudei 255b -Vilna 1882, daf 33a) où il interprète le verset
(Tehilim 127,1) אם ה' לא יבנה בית שוא עמלו בוניו בו, comme parlant du Zivoug (Bayit), si D.ieu ne s’en occupe pas, les efforts de l’homme seront vains שוא הוא עסק בני אדם בענין הזיווג שהכל הוא מאת ה'
Je suppose que c’est de là qu’est née cette rumeur au nom du
Gaon, rendant la Hishtadlout superflue et malvenue en matière de Shidoukhim.
Néanmoins, à bien lire, cela ne veut pas encore dire qu’il ne faille pas faire de Hishtadlout, mais seulement que SI D.ieu n’œuvrait pas, les efforts de l’homme seraient vains.
Toutefois, comme D.ieu œuvre, les efforts de l’homme ne seront pas vains (ni superflus).
Finalement, cette phrase du
Gaon aurait aussi pu s’appliquer aux autres domaines, comme la Parnassa, « si D.ieu ne s’en occupe pas, les efforts de l’homme seront vains »…
Si c’est souligné dans les Shidoukhim plus que dans d’autres domaines, c’est certainement car c’est un des sujets où le rapport entre la Hishtadlout et le résultat reste très éloigné ; on peut chercher activement durant des années et ne pas trouver, tout comme ne pas faire particulièrement d’effort et que ça nous tombe dessus.
Mais ça ne veut pas dire qu’il n’y ait aucun lien entre les deux.
Celui qui ne trouve pas à se marier et qui se dirait qu’il arrête toute Hishtadlout et attend sagement dans son fauteuil qu’on vienne lui faire des propositions, n’a aucune garantie de résultat, même si c’est POSSIBLE, mais ce n’est absolument pas garanti.
Ainsi, comme dans toute chose, comme pour la Parnassa et autres, il faudra faire une Hishtadlout, c-à-d qu’il faut se comporter NORMALEMENT, pas de Hishtadlout excessive, ni l’inverse.
J’ai lu dans le
‘Houpa Vekidoushin de Rav Its’hak Yossef (p.21) qu’il cite ce qu’on dit au nom du
Gaon (sans indiquer de source) qu’il ne faut pas faire de Hishtadlout en matière de Shidoukhim, puis il écrit qu’on rapporte aussi au nom de
Rav S.Z. Auerbach que cela veut simplement dire que dans le domaine des Shidoukhim il faut faire MOINS de Hishtadlout (que pour un autre domaine).
Même ça, je trouve que c’est étrange ; Se marier est une Mitsva (du moins pour l’homme), pourquoi faudrait-il faire moins de Hishtadlout dans ce domaine qui est une Mitsva que dans tout le reste (qui comporte aussi des domaines de « reshout ») ?
Si je dois faire une Hishtadlout pour obtenir un Loulav ou des Matsot, pourquoi pas pour « trouver/obtenir » une épouse ?
[Si déjà, on devrait dire de ne pas faire de Hishtadlout pour trouver une habitation/acheter une maison, car ce n’est pas une Mitsva (comme se marier l’est) et c’est cité dans la même
Gmara Sotah (daf 2a) en parlant de la Bat Kol qui annonce à l’avance telle maison sera à untel.
Donc si la Hishtadlout est totalement superflue et mal venue pour les shidoukhim, à plus forte raison pour trouver un appartement !
Etrangement, il se trouve que ceux qui s’opposent à la Hishtadlout pour le shidoukh le diront moins pour l’appartement…]
Je préfère donc rester sur ce que je disais plus haut : il n’a jamais été question de ne pas faire de Hishtadlout ni de l’interdire, mais seulement de dire que dans ce domaine, on voit très clairement que le résultat est déconnecté de la Hishtadlout, du coup, à quoi bon en faire trop ?
Je retrouve un peu cette idée chez le
Brisker Rov qui disait que la Hishtadlout en Shidoukhim ne servait pas vraiment אינה מועילה כל כך, elle sert surtout à calmer l’esprit (et se donner l’impression que les choses avancent) (cf.
Maatikei Shmoua p.61 en bas).
Je note que אינה מועילה כל כך ne veut pas dire que « ça ne sert à rien ».
Et je me dis aussi que ceux qui voudront interpréter l’idée comme c’est généralement admis, c-à-d que la Hishtadlout ne sert absolument à rien car de toute façon c’est la Bat Kol que gère les choses, et D.ieu enverra la bonne personne quand Il le voudra et tout ce qu’on peut faire n’y changera rien, dans ce cas, ils devraient logiquement en dire autant quand il s’agit de faire une Hishtadlout en shidoukhim pour AUTRUI et refuser d’aider autrui à se marier…
(et là, subitement, on ne trouve plus que ce soit si logique).
