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LeDovid Hashem Ori

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frank
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Bonjour

Il semble assez largement répandu de dire le psaume 27 depuis rosh 'hodesh Eloul (shaharit et minha / maariv selon les coutumes).

Que pensez-vous de cet ajout récent, absent de la gmara, des rishonim, du shoulhan aroukh et de beaucoup de ses commentateurs, des anciens sidourim et dont le Gra s'opposait au rajout (dans le cadre plus général de son opposition à l'ajout de pesoukim ou mizmorim après la tefila).
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6700
Citation:
Il semble assez largement répandu de dire le psaume 27 depuis rosh ´hodesh eloul (shaharit et minha / maariv selon les coutumes)
Que pensez vous de cet ajout récent absent de la gmara, des rishonim, du shoulhan aroukh et de beaucoup de ses commentateurs, des anciens siddourim et dont le Gra s’opposait au rajout (dans le cadre plus général de son opposition à l’ajout de pesoukim ou mizmorim après la tefila)



Il s’agit du "Ledavid hashem Ori", un ajout que certains placent avant, d’autres après, Aleinou.

D’aucuns le disent jusqu’à Shmini Atseret, ou Sim’hat Torah, d’autres s’arrêtent avant, à Hoshana Raba ou encore à Yom Kippour.
(Le minhag mentionné dans le Maté Ephraïm (§581, 6) est de le dire jusqu’à Yom Kippour, pas plus).

Quoi qu’il en soit, cet ajout est en effet très tardif, ça serait l’auteur (très controversé) du ‘Hemdat Yamim qui l’aurait « instauré » ou recommandé.
Voilà pourquoi beaucoup s’opposent à sa récitation, car ils soupçonnent le ‘Hemdat Yamim d’être secrètement disciple/adepte de Shabtay Tsvi le faux messie.
Des livres entiers ont été rédigés sur ce point, certains veulent dire que c’est un malentendu et que le ‘Hemdat Yamim n’était pas du tout sabbatéen.

Concrètement, les Sfaradim disent volontiers ce psaume en fin de prière, mais c’est (relativement) récent, au XVIIIème siècle ce Minhag n’était pas encore répandu et admis par tous.
Voyez le ‘Hida dans Moré Beetsba (§37) duquel on comprend que le Minhag n’était pas encore unanime à son époque (et constatez les différences avec ce qu’il écrit à la fin de son Sansan LeYaïr).

Chez les Ashkenazim, ça dépend des coutumes, ceux qui suivent le Gaon de Vilna ne le disent pas car il s’y opposait.

Mais même parmi les rabbis ‘hassidiques nous trouvons des opposants à la récitation de ce Mizmor au mois de Eloul.
Voyez la lettre de Rabbi Pin’has ‘Haim Taub, imprimée dans le Lev Saméa’h Ha’hadash (1936), au début, dans la partie Mikhtavim (la 6ème page -elles ne sont pas numérotées).

Il y dit ne pas réciter ce Mizmor car c’est une suggestion du ‘Hemdat Yamim et il rapporte que de nombreux Tsadikim s’opposaient eux aussi à cette récitation, parmi eux :

le ‘Hozé de Lublin,

le « Yehoudi Hakadosh » (R. Yaakov Its’hak de Peshis’ha),

le Rabbi de Ziditshov,

le Rabbi de Rofshitz et

le Rabbi de Sanz (le Divrei ‘Haim).


[des informations similaires se retrouvent dans d’autres Sfarim, comme le Shout Divrei Moshé (Halberstam) etc.]

Il écrit encore que -sans aucun doute, les Tsadikim qui récitaient ce Mizmor (en Eloul), ne l’ont fait que par ignorance de l’origine de cette « Takana », ils pensaient fort probablement que c’était le Arizal qui en était à l’origine, mais s’ils avaient su la vérité, ils auraient arrêté de le dire.

[au passage : dans le paragraphe suivant (sv. Veodot), il explique pourquoi les Gmarot commencent par le Daf Beit (et non Alef), alors que dans le Zohar ça commence par Daf Alef.
Il écrit que la Torah Orale est « Be’hinat Bina » qui commence par Beit, etc.
Je me permets d’objecter à cela que le Yeroushalmi aussi est Torah orale, et le Rif aussi. Pourtant, eux, commencent par daf Alef.
A ce sujet, voir mon message du 5 Juillet 2012, ici : https://www.techouvot.com/connaissances-vt15039.html?highlight= ]



Néanmoins, je ne suis pas persuadé que les rabbanim cités auraient forcément changé leur habitude s’ils avaient découvert que le ‘Hemdat Yamim conseille de dire ce Mizmor.

De plus, il semblerait que le ‘Hemdat Yamim ne soit pas l’initiateur de cette habitude, car nous trouvons des Sfarim qui l’ont devancé en cela.

Déjà le Rav ‘Haim Hacohen (décédé en 1655, soit plus de 75 ans avant l’édition du ‘Hemdat Yamim qui date de 1731-32) le mentionnait dans Shaarei Ra’hamim (p.24), il y a aussi le Shem Tov Katan (imprimé en 1706) et le Sefer Zekhira (en 1709), mentionnés dans Shalmei Sim’ha (p.514-515) [et Or Yakrout (2016, p.107)] et dans Divrei Yossef (Katz)(p.165) [puis dans Kobets Or Israel (I, p.149)].

Donc il n'y aurait plus de raison de s'opposer à cette récitation (car le 'Hemdat Yamim conseillait aussi la lecture du Shema...)

En fait, on n’imagine pas l’ampleur de l’impact des décisions (souvent circonstancielles) des imprimeurs de Sidourim dans le Nossa’h de la Tfila d’aujourd’hui.
Il y a énormément de petits ajouts qui ne sont insérés dans la prière aujourd’hui que parce que les gens les ont vus dans le sidour.
Alors que souvent, ils n’ont été imprimés que dans une volonté de proposer un rituel complet où chaque communauté trouverait le petit ajout qu’elle a l’habitude de réciter, mais pas dans le but de les faire dire par tous.

Les utilisateurs de Sidourim l’ignorant, ont cru qu’il était nécessaire (ou bon) de les réciter eux aussi, alors que leurs communautés n’y étaient absolument pas habituées.

Ajoutons à cela le grand chamboulement de la Shoah où quasiment tous les juifs d’Europe ont changé de pays, et les détails liturgiques n’ont trouvé que le Sidour comme point d’ancrage.

Voyez encore dans le Tfilat David du Aderet (partie Minhaguei Ostroh, p.140) stipulant de ne pas dire Ledavid Hashem Ori en Eloul/Tishrei et le Aderet dans ses annotations dessus écrit (p.141) que c’est aussi l’opinion du Gaon (Maasei Rav §53), certainement motivée par le Tora’h Tsibour (cf. Brakhot 12b) et/ou le Bitoul Melakha (cf. Meguila 21a).

Il ne fait donc pas dépendre cela de l’initiateur de cette habitude et même si l’origine de ce minhag est antérieure au ‘Hemdat Yamim, on trouve d’autres raisons pour s’opposer à sa récitation.

Dit autrement, l’explication du Aderet veut dire, qu’il n’est pas anodin d’ajouter un Tehilim à dire dans la Tfila.

Il ne faut pas écouter le Yetser Hara qui nous dirait « c’est toujours bon d’ajouter des Tehilim ».
Celui qui souhaite en ajouter la lecture peut le faire et peut même lire tout le Sefer Tehilim tous les jours après sa Tfila, mais sans en faire une habitude pour les autres.

Voir encore le Rabbi de Klausenburg dans son Divrei Yatsiv (Likoutim §52) à ce sujet.

Ce Rabbi était opposé par principe à tout ajout dans la Tfila, car il estimait que cela ne favorisait pas la Kavana.

On récite généralement (pour la majorité) nos prières sans Kavana, uniquement des mots, n’aggravons donc pas notre cas en ajoutant des tas de textes superflus.

Il suffit déjà avec ce qui fait partie de la Tfila (et celui qui se sait capable de maintenir une Kavana en dépit des ajouts pourra toujours ajouter tout ce qu’il souhaite, mais ne pas l’imposer). Cf. Kobets Igrot Kodesh du Rabbi de Kausenburg-Sanz (§8).

Cette réflexion vaut aussi pour d'autres ajouts liturgiques, nous avons hérité d'un Sidour bourré d'ajouts pour que chaque communauté s'y retrouve, ça ne veut pas dire qu'il faille tout réciter.
Il faut savoir ce qui est réellement la Tfila et ce qui n'est qu'ajout tardif ou "folklorique", lié à une communauté particulière.

A l'origine, le Sidour était un cahier manuscrit personnel qui s'héritait de son grand-père ou que l'on copiait de celui de son propre père.
Depuis qu'on n'utilise que des sidourim imprimés et que la Haskala a commencé à sévir et que les Maskilim ont commencé à retirer du Sidour les passages de la prière qui ne leur plaisaient pas (-essentiellement ceux mentionnant le retour à Sion et la venue du Mashia'h), nos ancêtres fidèles à la tradition ont commencé à croire qu'il fallait réciter tout ce qui se trouve dans le sidour.

Puis, la Shoah ayant tout détruit et provoqué une rupture sans précédent dans la transmission des Minhaguim, a aggravé encore plus nos coutumes de prière, surtout avec le mélange des communautés, il n'y avait plus d'usage propre à un pays, chaque ville -voire chaque synagogue- s'organisait comme elle le pouvait avec des rescapés de différentes nationalités.

Chez les Sfaradim ce dernier point était moins problématique, mais les exodes successifs et les grandes vagues d'émigration qui ont vidé le Maghreb et tous les pays arabes de leurs juifs depuis 1948, ont aussi entraîné des égarements chez les jeunes générations dans les coutumes et habitudes liturgiques.

La prière des Rishonim n'avait rien à voir avec ce que nous faisons -hormis la partie "véritablement tfila" de notre sidour. Ils n'avaient pas tous ces ajouts comme Ledavid Ori et beaucoup d'autres Mizmorim d'occasion.

ça ne veut pas dire qu'il faille interdire tout ajout, mais il faut être conscient que c'est sur le compte de la Kavana -qui est la vraie prière, car une prière sans Kavana n'a pas tellement de sens.

Ainsi, celui qui sait qu'il arrive à maintenir sa Kavana du début à la fin de la Tfila, peut se permettre de s'ajouter des Mizmorim, mais pour celui dont la Tfila se fait rarement Bekavana, le Rabbi de Klausenburg déconseille les ajouts.

Ne perdons pas de vue que le plus important est d'être Mekhaven (comprendre et penser à ce qu'on dit) dans la Tfila et que ces ajouts n'ont été motivés -à l'origine, que dans cet esprit, afin de favoriser la Kavana.

Malheureusement, de nos jours, c'est souvent l'effet inverse que l'on obtient (car il y a beaucoup trop d'ajouts qui ont été collectionnés au fil des années et des pays) et c'est pourquoi le Rabbi de Klausenburg s'y oppose.

Conclusion:
celui qui n'a pas le Minhag de dire ce Mizmor en fin de Tfila doit -avant de l'adopter, vérifier à deux fois s'il récite tous les jours sa prière Bekavana.
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