Ce débat est passionnant. A nous de ne pas le rendre passionnel.
Qui a tort, qui a raison ?
Un peu tout le monde dans cette affaire passionnante, qui mélange en fait halakha (la loi juive), minhag (habitude), ressentiment, excès, respect de son prochain.
Précisons, ou essayons de préciser quelques points :
- Le minhag est une habitude, une coutume. Et là, je vais en étonner plus d’un : quelle bénédiction faites vous quand vous mettez la kippa ? Y-a t-il la formule « ... acher quidéchanou bémitsvotav ... » à savoir « ... qui nous sanctifie et nous commande de... » ?
"Est-ce là une loi de Moîse au sinaï ?" (Talmud Chabat 28 a) (= dois je accepter ce que tu dis comme s'il s'agissait d'un décret de D.ieu ?)
Non ; mais on ne se pose plus la question, on met « de toute façon » la kippa, c’est admis par tous comme étant « indispensable », ou d’avoir la tête couverte par un autre couvre-chef. C’est en fait à l’origine une habitude, devenue coutume, qui fait force de loi, finalement.
Donc, Monsieur Claude.95, que diriez vous à des messieurs juifs passant devant vous sans kippa dans une synagogue le jour de kippour ? Je pense que comme chacun, vous leur feriez un léger signe de la main sur votre tête pour leur faire rappeler leurs kippa. Au nom de quoi ? Au nom d’une coutume que, finalement, vous respectez, mais peut être sans le savoir, en pensant qu’il s’agit d’un commandement majeur.
Alors pourquoi ne pas en respecter une autre, celle de la majorité de votre synagogue de kippour, et ne pas pratiquer la bénédiction des cohanim sous un talith familial ? ("Sors et observe comment agit le peuple" ; Talmud Brakhot 45 a) (et … conforme toi à ses coutumes) ;
- Mais rassurez vous, je ne suis pas spécialement contre votre envie de fédérer votre famille sous le talith de kippour.
Pourquoi ?
Parce que telle était la coutume de certaines familles ou régions d’Afrique du Nord, comme l’Algérie il me semble.
Personnellement, je pense, en faisant abstraction de contre-arguments précédents plus ou moins fondés, et dont aucun intervenant ne cite d’ailleurs de références, (A ces messieurs : le Talmud Yebamot 109, b : "Celui qui prétend n'avoir QUE la Torah, même la Torah il ne l'a pas"), je pense que cette coutume est émotionnellement « belle » pour la famille, car que de souvenirs pour les petits-enfants de famille dites de kippour... ("Il faut toujours chercher à maintenir les coutumes de la maison paternelle" ; Talmud Betza 6b). Ah les émotions, les souvenirs ... Vous êtes probablement dans ce domaine, et vous avez raison : on se doit d’aimer son prochain, d’aimer D.ieu, d’aimer tout simplement dans la joie
(28:47 Pour n'avoir pas, au milieu de l'abondance de toutes choses, servi l'Eternel, ton D.ieu, avec joie et de bon cœur,
28:48 tu serviras, au milieu de la faim, de la soif, de la nudité et de la disette de toutes choses, tes ennemis que l'Eternel enverra contre toi. Il mettra un joug de fer sur ton cou, jusqu'à ce qu'il t'ait détruit. (Deutéronome, Paracha ki tavo).
- Ceci dit, si la majorité des synagogues se plient en France à d’autres coutumes de stricte séparation d’hommes et de femmes, et à plus forte raison à kippour, vous êtes tenu de vous y plier aussi, ce que vous êtes prêt à le faire il me semble, sous réserve qu’on vous parle avec douceur.
- Et sur ce point, vous avez bien sûr raison. La façon dont vous ressentez le vécu de « votre » incident nous cause à tous beaucoup de peine. De toute façon on ne peut discuter sur un ressenti, peu importe les faits.
Il se peut que des personnes se soient emportés. Soyez donc au dessus. Notez enfin que le talmud cite "Celui qui se met en colère oublie son savoir et renforce sa bêtise" (Nedarim 22,2).
cordialement,
Olivier Muller,
[email protected].