Citation:
Que pensez-vous du Arouh Hachoulhan ?
Beaucoup de bien :)
Le
Aroukh Hashoul’han est -à n’en pas douter- un livre exceptionnel et remarquable.
Son travail est différent de celui du
Mishna Broura.
Ce dernier est un commentaire sur un livre de présentation de la Halakha (le
S.A.), alors que le
Aroukh Hashoul’han est un livre de présentation de la Halakha.
Aussi, il rappelle les différentes Shitot des Rishonim, ce qui permet de mieux cerner la Halakha étudiée.
Citation:
Répond-il totalement ou partiellement à l'exigence de recontextualisation des halahot dans leur souguiot ?
Il y répond très bien, même si la perfection n’est certainement atteignable que par l’étude du talmud lui-même.
Citation:
Pensez-vous qu'on pourrait se suffire de son étude pour Orah Haïm et qu'il supplanterait le Michna Béroura à choisir ?
Oui, assurément.
Ça a d’ailleurs été le cas à une époque.
On sait que certains Gdolim -et non des moindres, consultaient systématiquement le
Aroukh Hashoul'han avant d'émettre un Psak.
C'était le cas du
"Gadol de Minsk" (Rav Yerou'ham Perlman), c'est donc assurément un Sefer très fiable.
(cf. Yeshouroun XV, p.805)
Néanmoins le
Mishna Broura est moins long, étudier tout le
Aroukh Hashoul’han représente une somme de textes très importante. De plus, il est plus facile de se repérer dans le
Mishna Broura qui est agencé selon les séifim du
Shoul’han Aroukh . Aussi, le
Aroukh Hashoul’han intègre ses ‘hidoushim au texte, ce qui peut perturber la lecture du novice, alors que dans le
Mishna Broura, les ‘Hidoushim sont plutôt rangés sous le titre de
Biour Halakha, ce qui facilite la lecture.
Quant à la préférence Halakhique entre les deux, c'est sujet à discussion.
Si quasiment tous les rabbins du XXIème siècle répondront que le
Mishna Broura l'emporte, c'est surtout par ignorance et habitude, et parfois sous influence des mots
(mal interprétés je pense) du
‘Hazon Ish (Igrot II, §41) qui semble comparer ses psakim à ceux du Sanhedrin au Lishkat Hagazit, comme ceux du
Beit Yossef et du
Maguen Avraham (bizarrement, personne n’a retenu cette notification au sujet du Maguen Avraham).
Le
Mishna Broura a aussi bénéficié du fait que le monde des Yeshivot en Israël ait été majoritairement rebâtit par des lituaniens, et le
‘Hafets ‘Haim était un Rav lituanien très connu du peuple.
Chez les lituaniens, c’est l’exemple du « Tsadik-Talmid ‘Hakham », ce qui fait que dans les yeshivot d’après-guerre, son livre a été accepté comme le livre de base de l’étude de la Halakha
(alors qu’avant guerre, c’était plutôt le ‘Hayei Adam -information que je tiens de plusieurs personnes, dont Rav Nathan Kamenetsky -qui l'a d'ailleurs aussi écrit dans son Making of a Godol (I, p.96)).
De plus, le
Mishna Broura cite surtout d’autres Poskim, mais ne tranche pas souvent « par lui-même », il tranche seulement « entre les poskim »
(=pas en reprenant la souguia lui-même, comme le fait le Aroukh Hashoul’han).
C’est un élément qui « rassure » le lecteur qui n’est pas capable de comprendre le raisonnement des Hakhraot (
décisions), car l’auteur se rattache à d’autres poskim qui l’ont devancé.
Mais il se trouvait de grands Poskim qui donnaient sans hésitation la préférence au
Aroukh Hashoul'han qui avait le double avantage d'avoir été un Dayan et d'avoir écrit sur toutes les parties du
Shoul'han Aroukh.
Le plus connu d'entre eux doit être le
Rav Yossef Eliahou Henkin qui estimait que le
Aroukh Hashoul’han était "LE" possek Hador
(ce qui se confirme historiquement), tandis que le 'Hafets 'Haim
(auteur du Mishna Broura) était le "Tsadik Hador", or, un "Tsadik Hador" ne peut pas être un "Possek Hador"
( [Une critique similaire sur le Mishna Broura a été émise d'une manière différente par d'autres Gdolim, comme le Or Saméa'h ] , car sa Tsidkout l'amènerait à pencher (trop facilement) vers la 'Houmra.
(Cf. Shana Beshana 5739 -1979- p.406-7).
[Je m'interroge: Reprocher au ‘Hafets ‘Haim d’avoir un penchant pour la ‘Houmra est une chose, mais lier cela à la Tsidkout en est une autre. La Tsidkout est-elle supposée pousser les psakim d’un Rav vers la ‘Houmra ?]
Voir aussi ce qu’a écrit son petit-fils, le
Rav Yehouda Henkin dans son
Shout Bnei Banim (I, §6)(II, §8), que le
Aroukh Hashoul’han était plus « ‘harif », qu'il a écrit sur tout le
Shoul’han Aroukh, et qu'il a vu le
Mishna Broura (ce qui lui confère le statut de Batra).
Ce dernier point est à relativiser, car nous ne trouvons dans le
Aroukh Hashoul’han que des mentions des deux premiers tomes parus du
Mishna Broura (tome 1 et tome 3) et il semblerait qu’il ne les ait pas lus entièrement avant de publier les tomes correspondants du
Aroukh Hashoul’han.
Voir les preuves apportées à cela par
Rav Eitam Henkin hy’’d (fils de Rav Yehouda Henkin) dans son
Taarokh Lefanay Shoul’han (p.313) -parution posthume toute récente.
Quant au premier point
(qu'il serait plus 'Harif), ça me semble subjectif.
Ce que l'on pourrait dire, c'est ce que disait le
Ponovizher Rov (Rav Yossef Shlomo Kahaneman) au sujet du
Rav Epstein (=Aroukh Hashoul'han): sa force est dans son
Mishkal Rishon, c'est-à-dire sa capacité à comprendre d'emblée le sens que la Halakha doit prendre, comme l'a rapporté en son nom le
Rav Pin'has Schreiber (alias "le Pini"), cité dans
Harav Miponevez (I, p.44). Autrement dit, le
Aroukh Hashoul’han était plein de bon sens. Voilà un atout indéniable et souligné par le
Rav de Ponevez.
Citation:
Des critiques ou réserves à émettre ?
Remarques particulières ?
Oui : De nos jours la masse des Poskim ou surtout la masse des « lomdim » se repère et se base sur le
Mishna Broura, de telle sorte que celui qui l’ignore s’exclut un peu d’un psak communément admis
(je parle au niveau de la connaissance seulement. Pour la pratique, je maintiens que celui qui suit le Aroukh Hashoul’han ne saurait être dans l’erreur).
Ensuite, s’il y a des précisions halakhiques qui seront absentes de l’un, c’est vrai aussi pour l’autre et en cela ils seront complémentaires.