Citation:
Bonjour, dans chaque souggia, sur chaque sujet, tout est rempli de mahlokot. Un rabbin comprend comme ceci la souggia quand un autre rabbin la comprend à l’opposé. Pour l’un, agir de telle manière revient à accomplir une grande mitsva tandis que pour l’autre cela signifie faire une grande avéra. Bref je ne m’y retrouve pas très bien dans cet amas d’avis différents. Si on cherche la vérité et l’authenticité à travers l’étude de la torah j’ai plutôt l’impression de sortir de chaque souggia avec une montagne d’informations selon tel rabbin d’après tel rabbin selon la ava mina de tel rabbin. En gros rien n’est clair et je trouve ça démotivant. Je ne comprend pas le principe « elou vé élou divré elokim haim » de manière littérale. Deux rabbins ne peuvent pas discuter du même sujet, dans des détails identiques, être en mahloket et dire « j’ai raison, le rabbin en face a tort » et qu’on me dise qu’en fait les deux ont raison. C’est invraisemblable.
J’aimerais un éclairage sur le but de toute cette étude. Sortir avec cette montagne d’informations sur chaque sujet? Comprendre que c’est justement la volonté d’Hachem qu’il y ait 40 avis sur un sujet? Naturellement j’aurais eu tendance à reprocher à tous les commentateurs de chacun mettre son grain de sel sur chaque sujet et dire comment il comprenait la souggia sans qu’on lui ait clairement certifié que c’était la seule bonne manière de la comprendre. Pourquoi ne pas avoir assez pris en compte qu’on pourrait tout autant adhérer à la vision de leur contradicteur et qu’en affirmant leur vision des choses avec certitude il ne font que rendre la chose moins claire.
Vous citez souvent beaucoup d’avis différents et contradictoires quand on vous pose une question. Quelle est votre manière d’appréhender tous ces avis? Ils constituent la richesse de la torah, chaque rabbin vient prouver à travers son avis sur une question que la torah est infinie et c’est justement ça qu’HM nous a demandé, nous impliquer, donner notre vision des choses, peu importe le émet absolu…?
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Votre question est très large, je ne pourrais pas vous répondre parfaitement à l’écrit, si vous en parliez avec un rav qui vous connait, vous gagneriez beaucoup en compréhension je pense.
En attendant, je vous réponds tout de même avec les moyens du bord.
Citation:
sur chaque sujet, tout est rempli de mahlokot. Un rabbin comprend comme ceci la souggia quand un autre rabbin la comprend à l’opposé
C’est comme dans le domaine médical, un guérisseur vous dira que le lait est très mauvais pour la santé, et que les œufs sont excellents, l’autre dira l’inverse…
Comment voulez-vous que tout le monde soit d’accord ?
Citation:
Pour l’un, agir de telle manière revient à accomplir une grande mitsva tandis que pour l’autre cela signifie faire une grande avéra
Ces cas
(d'oppositions aux extrêmes) sont tout de même plus rares.
Citation:
rien n’est clair et je trouve ça démotivant
Parce que vous appréhendez le Limoud comme une notion extérieure à l’homme, comme une « révélation », comme une science ésotérique. Ce n’est pas le cas. Si vous abordez le Limoud sous l’angle humain, la variété des vues sera au contraire une motivation pour affiner la compréhension et chercher à quelle opinion vous adhérez vous-même, où vous vous identifiez le plus.
Citation:
Je ne comprend pas le principe « elou vé élou divré elokim haim » de manière littérale. Deux rabbins ne peuvent pas discuter du même sujet, dans des détails identiques, être en mahloket et dire « j’ai raison, le rabbin en face a tort » et qu’on me dise qu’en fait les deux ont raison. C’est invraisemblable.
Vous avez la réponse à portée de réflexion : en effet, c’est invraisemblable et c’est une compréhension infantile de Elou VeElou Divrei Elokim ‘Haim, qui -hélas, est diffusée par des rabbanim qui ne comprennent pas grand-chose au Shas.
« Elou VeElou Divrei Elokim ‘Haim » ne veut pas dire qu’une chose et son contraire sont vraies, sinon, c’est vraiment se moquer du monde.
Je suis navré que vous (ainsi que de très nombreux juifs français) soyez otage(s) de la simplicité d’esprit de certains Rabbanim qui diffusent et enseignent des tas de notions de la Torah de manière erronée et qui déforment grandement la Gmara et l’enseignement des ‘Hazal, au point de les rendre inaudibles ou stupides aux yeux des gens éveillés qui n’ont pas consommé de substances brouillant les perceptions cérébrales.
Pas besoin d’être un génie pour flairer qu’il y a anguille sous roche lorsqu’on nous dit x=-x ou que noir veut dire blanc et rond signifie carré.
Si chacun des deux rabbins dit que l’autre à tort, en déclarant qu’ils ont tous deux raison, on dit en fait qu’ils ont tous deux tort !
Le bon sens devrait suffire à vous le confirmer, malheureusement, les mêmes rabbanim ont aussi habitué le Tsibour à croire que Torah et bon sens seraient incompatibles.
Nous avons parfois une Ma’hloket sur une notion Agadique, où les deux idées sont vraies et non contradictoires, c’est dans ce cas que l’on dit Elou VeElou Divrei Elokim ‘Haim.
Cette expression figure deux fois seulement dans le Shas :
Erouvin daf 13b et
Guitin daf 6b et dans les deux cas il s’agit d’un sujet Agadique de ce type.
Si l’on a une Ma’hloket entre deux Amoraïm sur ce que leur Rav a dit, a-t-il dit noir ou blanc ce jour-là ? , vous pensez bien que celui qui déclarerait qu’ils ont tous deux raison au titre de Elou VeElou Divrei Elokim ‘Haim, serait vraiment ridicule, enfin, tant qu’on tient compte du bon sens, bien sûr. Sinon, évidemment, on peut tout dire et c’est la porte ouverte à tous les délires.
Cette porte est restée bien ouverte et a été largement empruntée par des tas de pseudo-kabbalistes qui ont fait pénétrer par effraction dans nos Kehilot leurs élucubrations.
Comme je subodore que certains insisteront pour dire qu’en effet, les deux Amoraïm ont raison (et leur maître avait dit les deux choses dans la même phrase…), ils ne me croiront pas et soutiendront cette thèse car le bon sens n’a plus tellement droit de cité, mais j’ai tout de même le droit de citer un
Rashi providentiel qui s’est fatigué à mettre par écrit des choses si évidentes et indiscutables, comme si par prophétie, il avait entrevu l’égarement des générations futures.
C’est un
Rashi dans Ktouvot (57a) qui dit clairement que lorsqu’il y a discussion sur ce qu’a dit leur maître, forcément l’un des deux est dans l’erreur חד מינייהו משקר
C’est uniquement si l’on peut concilier les deux positions qu’il est envisageable de dire Elou VeElou Divrei Elokim ‘Haim.
Citation:
Comprendre que c’est justement la volonté d’Hachem qu’il y ait 40 avis sur un sujet?
Pas tout à fait.
D.ieu ne souhaite pas que les bêtises s’expriment, on aurait pu s’en passer.
Il y a parfois différents avis qui relèvent chacun d’une facette de la vérité, mais lorsqu’il y a une opinion erronée, on s’en passerait.
L’origine de la Ma’hloket n’est pas une fierté, c’est dû au manque de Shimoush des élèves de Shamay et Hillel (cf.
Sanhedrin daf 88).
Lorsque les deux avis comportent du vrai, c’est positif, il faudra bien trancher la Halakha, mais chaque avis est porteur d’une ouverture qui permet de mieux comprendre et mieux vivre cette halakha. Mais si un des avis est une erreur, on s’en passe.
Le fait que la Gmara ait dit Elou VeElou Divrei Elokim ‘Haim sur des discussions entre Amoraïm n’indique pas que ce soit à appliquer aussi sur les discussions entre Rishonim ou entre A’haronim, ni même que cela s’appliquerait systématiquement sur toutes les discussions entre Amoraïm.
Le
Rav Eliezer Guinzbourg z"l de Ponevez m’avait dit «
Elou VeElou Divrei Elokim ‘Haim n’a pas été dit au sujet des Rishonim ». On ne l'a trouvé (dans le Shas) qu'au sujet des Amoraïm, pas plus loin.
Bon, voilà déjà de quoi cogiter un peu, je comprends parfaitement votre malaise, il est totalement justifié (et sain), mais comprenez que vous avez été victime du manque d’analyse de certains rabbanim qui comprennent la Gmara exactement comme ils la comprenaient à l’âge de 9 ans.