Non, je ne pense pas qu'il soit possible de connaître par cœur le shas avec chaque
Rashi et chaque
Tosfot mot-à-mot.
(à moins d'être autiste...je parle pour quelqu'un de "normal".)
Si on raconte ça sur certains tsadikim, c'est généralement exagéré.
C'est même écrit au sujet de certains, mais c'est "faux".
Même pour les rabanim que je n'ai pas pu côtoyer et "vérifier" si c'est "vraiment vrai" (=les rabanim du passé, qui sont décédés bien avant ma naissance et sur lesquels on raconte des choses de ce genre), il se trouve qu'une lecture attentive de leurs sfarim sera souvent en mesure de nous prouver que c'est largement exagéré.
Leurs citations de gmarot qui comportent de légères erreurs (sans incidence halakhique) nous le prouvent.
On dit aussi sur
Rav Ovadia Yossef qu'il connaissait mot-à-mot chaque livre qu'il lisait, c'est beau.
Mais c'est faux.
Il commet de nombreuses erreurs de citation (dans les mots) même sur des gmarot.
Sa mémoire phénoménale n'est pas "fausse", c'est bien vrai, il avait en mémoire une quantité d'informations incroyable, mais pas forcément du "mot-à-mot" comme un ordinateur.
Ceux qui ont en mémoire les mots du Shas "comme un ordinateur" sont atteint d'une forme d'autisme, qui va souvent de pair avec un manque (léger ou lourd) au niveau de la profondeur de compréhension.
Il y a des exceptions, comme le
Gaon de Vilna et quelques rares autres.
Voyez ce que j'écris ici sur la possibilité ou l'impossibilité de retenir tout le shas par cœur mot-à-mot (pour un être humain "normal"):
http://www.techouvot.com/critere_pour_pretendre_au_titre_de_gaon-vt18369.html?highlight=
Concernant ce
Rav Cohen, je ne sais pas si c'est "vraiment vrai", ou seulement "approximativement vrai", il est indéniable qu'il a une très grande bekiout du shas, mais je n'ai jamais pu le rencontrer.
Ce qui m'apparaît assez évident à la lecture de son livre, c'est que sa Bekiout semble avoir pris du terrain sur sa Havana
(compréhension profonde), peu de svarot puissantes, peu d'idées personnelles, peu de "culture générale" (en dehors du Shas -of course), il ne semble pas très "branché" sur de grandes souguiot qui n'existent pas dans le Shas, mais seulement chez les A'haronim (ou Rishonim).
Et si sa bekiout n'avait pas impacté sa créativité, s'il était lamdan en plus de Baki, nous devrions pouvoir lire de sa plume de beaux 'hidoushim.
S'il avait une bekiout dans la littérature rabbinique (autre que les 'hazal), il devrait être en mesure de rédiger de magnifiques 'habourot sur différents sujets.
Il semblerait que ce ne soit pas le cas.
Ce phénomène de "grande bekiout" est plus fréquent chez les sfaradim
(il me semble cependant que ce rav Cohen soit ashkenaze) qui attachent souvent une grande importance à la bekiout et la connaissance des textes, alors que les ashkenazim ont plus tendance à privilégier la Lamdanout (la subtilité du raisonnement).
[Il y a des nuances, bien entendu, les tunisiens ne font ni dans la bekiout, ni la lamdanout, mais dans le décorticage des textes sans rien laisser passer... concernant les différences de dérekh limoud selon les pays, voir encore ce que j'ai écrit le 22 février 2012 ici: http://www.techouvot.com/qui_est_rav_wattenberg-vt13224.html?highlight= ]
Bref, je ne pense pas que se fixer comme objectif de retenir la gmara par cœur soit uniquement bénéfique. ça risque fort de se faire au détriment de la svara.
Je crois que
Rav SZ. Auerbach s'est -une fois- exprimé en ce sens.
Rav Yeoshoua Cohen reste bien entendu un incroyable talmid 'hakham, je ne viens pas le dénigrer hv"s.
Je dis juste que l’objectif ne doit pas être de retenir par cœur, mais de comprendre et connaître.
Nulle part dans le Shas on nous indique qu'il faille connaître "par cœur".
La
Gmara (Kidoushin 30a -en bas) nous dit qu'il faut connaître son étude au point de pouvoir répondre tout de suite à celui qui nous pose une question sur notre étude, mais il n'est pas question de "récitation", malgré que les mots aient indéniablement leur importance -comme il est enseigné:
'hayav Adam lomar bilshon Rabo (Brakhot 47a, Bekhorot 5a et Shabbat 15a qui cite la Mishna Edouyot §1, 3) (NB:il existe une version Kilshon rabo au lieu de Bilshon rabo).
En conclusion:
la mitsva est d'étudier la Torah pour la connaître, la comprendre, la méditer et savoir l'appliquer. On ne demande pas au juif de pouvoir réciter le Shas par cœur, uniquement de le lire, le comprendre et le retenir.
Il est tard, je ne me relis pas pour corriger les fautes, désolé.