Techouvot.com

La réponse de qualité à vos questions

Étudier pendant la tfila et gravité de ne pas suivre la kria

Voir le sujet suivant Voir le sujet précédent
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet
cheelnaute
Messages: 277
Bonjour rav
J'ai lu dans le S.A, siman tsadik, halaha youd, qu'il ne faut pas avancer dans sa tfila sauf si le tsibour est "maarir bapiyoutim".

Je m'interroge car le Chabat je lis toujours très vite les passages avant hashem meleh, et même autres psouké dezimra, brahot du yotser, pour pouvoir avancer, "gagner du temps" et étudier le temps que le tsibour me "rattrape".
Le problème est que je fais ça même quand je prie dans un minyan "normal" où le tsibour ne s'allonge pas à outrance dans les chants.
Ai-je le droit ? Ou bien est-ce problématique ?

2. Dans la même veine: le yester arah parfois m'incite à étudier pendant la kriat atorah. Je suis globalement la kria, mais entre les montées quand j'étudie, des fois je suis happé et je continue mon étude, avant de finalement me remettre à suivre la kria, quelques secondes après. Mauvaise habitude, je sais...
Est-ce grave de rater la kria sur certains passages, même si on "entend" ?
Ou bien doit-on suivre mot à mot sans la moindre exception ?
Merci de m'avoir lu.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6640
Citation:
J'ai lu dans le S.A, siman tsadik, halaha youd, qu'il ne faut pas avancer dans sa tfila sauf si le tsibour est " maarir bapiyoutim "
Je m'interroge car le Chabat je lis toujours très vite les passages avant hashem meleh, et même autres psouké dezimra, brahot du yotser, pour pouvoir avancer, " gagner du temps " et étudier le temps que le tsibour me " rattrape "
Le problème est que je fais ça même quand je prie dans un minyan " normal " où le tsibour ne s'allonge pas à outrance dans les chants.
Ai je le droit ? Oubien est-ce problématique ?



S’il faut analyser l’aspect halakhique des choses, il est difficile d’interdire.
La halakha autorise à se dépêcher pour rejoindre le tsibour à la Amida afin de prier beminian (elle autorise même à sauter les Psoukei dezimra pour cela).
Idem si l’on voit que le minian dans lequel on est prend son temps et que l’on va rater l’heure maximale du Shema, il faudra laisser le Tsibour à sa lenteur et se dépêcher pour lire le Shema dans les temps.
A plus forte raison sera-t-il permis de se dépêcher pour pouvoir étudier la Torah, mitsva bien supérieure à la prière betsibour.
Ça c’est sur le plan purement halakhique ; il n’y a pas de « issour », mais ça ne veut pas encore dire que ce soit souhaitable.

Dans la pratique, si vous vous souciez toujours de terminer plus rapidement pour intercaler des moments d’étude pendant la Tfila, cette dernière en sera très perturbée.
Il y a une différence entre ça et celui qui se retrouve avec un moment libre pendant la Tfila (par exemple celui dont nous parlions plus haut qui devait se dépêcher pour réciter le Shema dans les temps, et qui se retrouvera donc du coup à devoir attendre les autres pour la Amida, durant ce temps, bien entendu qu’il est positif d’apprendre encore des choses au lieu de rêvasser en poirautant).

Donc le baromètre doit être le suivant : si vous vous « dépêchez » au détriment de la kavana, ce n’est pas souhaitable ; bien que la Mitsva de Limoud soit supérieure à celle de la Tfila, mais lorsqu’on pratique une Mitsva on est dispensé de la Mitsva de Limoud, c’est à ce propos qu’il est idoine de parler de « Zman Torah Le’houd, Zman Tfila Le’houd » (et non comme le veut l’interprétation dévoyée par certains pour qui cette expression voudrait dire que même en passant 5 heures à prier un samedi matin il n’y aurait pas à se soucier du Bitoul Torah).

Par contre, si -sans que ce soit au détriment de la kavana- il se trouve que vous disposez de temps pendant la tfila, il est bon de le rentabiliser avec du limoud.


Citation:
2. Dans la même veine : le yester arah parfois m'incite à étudier pendant la kriat atorah
Je suis globalement la kria, mais entre les montées quand j'étudie, des fois je suis happé et je continue mon étude , avant de finalement
me remettre à suivre la kria, quelques secondes après.
Mauvaise habitude je sais...
Est-ce grave de rater la kria sur certains passages, même si on " entends " ?
Oubien doit on suivre mot à mot sans la moindre exception?
Merci de m'avoir lu.


Il n’y a aucune obligation de « suivre » mot-à-mot la Kriat Hatorah, par contre il ne faut pas parler, même de Divrei Torah, durant la lecture.(et Kal Va’homer des Dvarim betélim qui, eux, sont à éviter même entre deux montées.)

Donc si vous parlez de déborder un peu sur la Kria en PRONONÇANT ce que vous lisez, ça ne va pas.
Mais si vous ne prononcez pas (vous lisez silencieusement), bien qu’il convienne de s’arrêter pour la reprise de la Kria, il n’y a pas d’infraction répréhensible.

La Gmara Brakhot (8a) nous dit qu’il arrivait à Rav Shéshet (Shéshat) de se retourner et d’étudier lors de la Kriat Hatorah.
Tous les commentateurs s’interrogent sur cette attitude qui semble contredite par la Halakha dans Sotah (39a) qui interdit d’étudier durant Kriat Hatorah.
Le Tosfot (Brakhot 8a), le Rosh (Brakhot I,§7), et le Tour (O’’H §146) au nom de Rashi mentionnent un distinguo très simple : l’interdit est d’étudier à voix haute, car cela dérange ceux qui veulent être attentifs à la lecture, mais Rav Shéshet étudiait à voix basse sans déranger les autres.

Le Shibolei Haléket (§39) rapporte au nom de Rabénou Sim’ha qu’il est habituel (à son époque, au début du XIIème siècle en France) de voir des gens étudier pendant la Kriat Hatorah, et c’est parce que l’interdit est d’étudier à haute voix, mais à voix basse c’est autorisé puisque ça ne dérange pas les autres (même réponse que les autres Rishonim précédemment cités).
Mais le Shibolei Haléket s’étonne (au nom de son maître) d’une telle explication, car celui qui étudie à voix basse, même s’il ne perturbe pas la lecture, n’y est pas attentif lui-même ! C’est pourquoi il conclut qu’il est interdit d’étudier.

Une autre opinion citée par le Shibolei Haléket, au nom du Behag, dit que R. Shéshet pouvait étudier car il y avait, sans lui, 10 personnes. Mais si le minian « compte » sur lui, il n’aurait pas le droit d’étudier pendant la Kria.

Il cite encore « d’autres rabbins » qui ont expliqué que pour R. Shéshet c’est autorisé car Torato Oumanouto (=c’est un Talmid ‘Hakham qui s’occupe constamment d’étudier la Torah) et il est en conséquence dispensé de Kriat Hatorah.
Ces « autres rabbins » qui n’ont pas été nommés par le Shibolei Haléket sont le Tosfot (Sotah 39a) au nom de R. ‘Hananel et Tosfot (Brakhot 8a) au nom du Rif.

D’autres réponses se trouvent encore dans les Tosfot (et citées dans le Shibolei Haléket), comme l’idée d’une dispense particulière pour R. Shéshet car il était aveugle (Tosfot Sotah 39a), ou encore que si l’on se retourne (comme l’a fait R. Shéshet) c’est moutar, etc.
Ces opinions sont citées dans le Shoul’han Aroukh (o’’h §146,2).

Le Kolbo (§20) cite le Smak qui rapporte la Gmara de Sotah qui dit que dès qu’on ouvre le Sefer Torah il est interdit de parler même de divrei Torah כיון שנפתח ספר תורה אסור לספר אפילו בדבר הלכה de cette manière :
כיון שנפתח ספר תורה אסור לספר ויש גורסין אפילו לדבר הלכה,
c-à-d que selon certaines versions de la Gmara l’interdit de parler pendant la Kria ne concernerait que les Dvarim Betélim, pas les Divrei Torah.

Il (le Kolbo) rapporte aussi une autre explication selon laquelle l’interdit de parler pendant la Kria ne s’appliquait qu’à l’époque où seuls le 1er et le dernier Olé prononçaient les brakhot (les autres olim se contentaient de lire, sans Brakha, il n’y avait qu’une brakha au début et une à la fin de toutes les aliyot).
C’est pourquoi il ne fallait pas parler, car s’il était ensuite appelé à la Torah, il y aura eu un Hefsek entre la brakha et la lecture (d’après cette explication, il était, même à l’époque, permis de parler durant la dernière montée).
Mais de nos jours où chaque Olé fait les deux brakhot, il n'y a plus de problème.
C’est une opinion intéressante mais non retenue par la halakha.

Globalement, ce qu’il faut souligner, c’est que l’interdit de limoud pendant la Kria concerne un limoud en prononçant les mots, pas en lisant « dans sa tête ».
La nature du Issour serait, soit parce que ça dérange l’attention des autres, soit parce que c’est un Zilzoul de la Torah que de parler pendant la lecture publique, soit parce qu’il n’est pas possible d’écouter la Kria si on étudie autre chose.
Pour les deux premières explications, ça ne concerne pas celui qui ne fait pas un bruit et lit dans sa tête.
En revanche, la 3ème resterait problématique même dans le cas d’une étude totalement silencieuse.

Toutefois, cette 3ème interprétation du Issour suit l’opinion qui considère qu’il y aurait une obligation sur chaque individu de s’acquitter de la Kriat Hatorah, d’où la nécessité absolue d’écouter chaque mot.
Mais la Halakha retenue considère que la Kriat Hatorah est un ‘Hiyouv sur le Tsibour, pas sur l’individu.

C’est ce qui ressort des Tosfot et autres Rishonim cités (qui n’étaient pas dérangés par la Koushia du [Rav du] Shibolei Haléket).

On pourrait aussi prouver que c’est l’opinion du Shoul’han Aroukh (o’’h §146,2) qui autorise de lire Shnayim Mikra Veé’had Targoum pendant la kriat hatorah, alors qu’on ne prononcera pas toujours exactement le même mot que le Baal Koré au même moment et on ne pourra être attentif et s’acquitter de la Kria. C’est bien parce qu’il n’y a pas de ‘Hiyouv individuel mais collectif, sur le Tsibour.

Les A’haronim prouvent que c’est l’avis du Shoul’han Aroukh à partir de ce Séif.
Voyez
Shout Levoushei Mordekhaï (II, §99),
Shout Imrei Yosher (Arik) (II, §171)
et
Shout Mishné Sakhir (Teichtal) (§90 – dans l’édition de 1924).


C’est pourquoi, dans votre cas, si vous dépassez un petit peu après le début de la aliya suivante, SANS prononcer un mot, ça va encore.


Je trouve nécessaire de souligner ce que j’ai remarqué :
lorsque quelqu’un étudie durant la kriat hatorah ou la ‘hazara, sans prononcer un mot, on le lui reproche.
Mais on le reproche beaucoup moins à son voisin qui lit un magazine ou une annonce placardée au mur, ou tout simplement qui rêvasse !
Effectivement, on ne remarque pas toujours lorsque quelqu’un rêvasse (pour pouvoir le lui reprocher), mais en ce qui concerne la Tokha’ha je souligne aussi celui qui rêvasse car souvent, celui qui fait la Tokha’ha à celui qui "ose" étudier la Torah, ne peut pas dire qu’il ne lui arrive pas de rêvasser durant la kriat hatorah.

Il faut savoir raison garder et ne pas perdre de vue les priorités.

PS: Je ne me relis pas, par manque de temps (à force de répondre si longuement...), veuillez excuser les fautes, merci.
Montrer les messages depuis:
Voir le sujet suivant Voir le sujet précédent
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas voter dans les sondages de ce forum