A
Reb Manès :
Je cite :
Citation:
1. Concernant la prononciation du kamats et du pata'h chez les sefaradim, on peut imaginer qu'elle est devenue indifférenciée de part la sortie de la sphère arabophone. En arabe il existe bien cette nuance (a long / a court) et il n'est pas nécessaire de transformer un a en o pour différencier les deux.
La sortie du monde arabophone a certainement joué dans cet oubli de la distinction entre les types de A, mais c’est -à mon avis, ce monde arabophone qui a perverti la vraie prononciation du Kamats.
Tout porte à croire en effet qu’il tendait un peu vers le « O », pas seulement l’excès de certains pays ashkenazes qui en ont fait un « Ô » et d’autres plus conservateurs comme l’Allemagne et l’Alsace où c’était un « AU » ou « AO » (voire « AW »), proche de la prononciation des yéménites -pourtant géographiquement éloignés et coupés de tout contact avec les allemands durant des siècles.
Pas seulement ces éléments, mais aussi le nom même du sigle Kamats qui indique une Kmitsa de la bouche (/des lèvres) à la différence du Pata’h qui signifie une Pti’ha de la bouche.
Les juifs de pays arabes ont eu tendance à assimiler la distinction (entre Kamats et Pata’h) à ces deux types de A arabes et auraient perdu la vraie prononciation du Kamats.
Ultérieurement, en ne parlant plus l’arabe, même cette distinction s’est perdue.
Citation:
2. L'usage des le'azim pour prouver la prononciation me semble très risquée. D'une part on sait de manière sûre que la prononciation du français a changé de manière notable et les mots ont évolué également.
Bravo ! c’est exactement le sens de ma phrase, je me cite : «
Nous avons prouvé la prononciation du צ chez ces Rishonim, cependant, cela ne veut pas dire qu’il faille absolument adopter cette prononciation. »
Pas parce qu’il est possible qu’ils avaient déjà des erreurs de prononciations eux-mêmes, ça je l’ajoute en tant que second argument, je me cite : «
D’autant que ces preuves indiquent la prononciation de Rishonim, qui souffraient eux-mêmes peut-être déjà des déformations dues à l’exil»
Mais c’est justement parce qu’il est possible que la prononciation de certains mots ait évolué avec le temps, que j’ai apporté PLUSIEURS exemples différents.
Citation:
De plus les retranscriptions dans nos livres ne reproduisent pas les signes supplémentaires marquant les lettres ~ par exemple.
So what ? Nous parlons ici du Tsadé/Tsadik, s’il y avait eu un signe quelconque sur la lettre, qu’en auriez-vous déduit ?
Je vous rappelle que l’enjeu est de savoir s’il se lit plutôt S ou TS.
Lorsqu’on voit qu’il a été choisi pour les mots comme « glace », « limace », « cerise »… on comprend qu’il ne se lisait pas TS.
Après, savoir s’il avait été marqué par un signe pour faire une distinction entre deux sons, ne pourra que concerner une subtilité de prononciation comme certains le font entre le Samekh et le Sadé, ce dernier étant plus appuyé.
Mais il n’est pas concevable de dire que le Tsadé se lisait TS et qu’on lui aurait ajouté un signe pour indiquer de le lire S, car il aurait mieux fallut utiliser le Samekh ou le Sin.
Citation:
Enfin comme tout système de translittération il repose sur des conventions. Quand voit que le ch est retranscrit par un qof avec ~ ce n'est pas parce qu'au moyen âge on disait "Quinon" au lieu de Chinon. C'est une convention due au fait que le s est retranscrit généralement par un sin.
Détrompez-vous, selon toute vraisemblance,
Rashi ne prononçait pas les lettres CH comme un ש, mais plutôt comme un ק atténué.
Aujourd’hui encore, vous pourrez trouver de vieux paysans prononçant les lettres CH ainsi, surtout dans le Nord de la France.
Ils disent « le Kien » pour dire « le chien » et prononcent les lettres CH presque comme le K ou le C.
En fait, cette prononciation est plus ancienne et plus « juste », c’est durant les derniers siècles que la prononciation du français a évolué sur ce point.
Je dis plus « juste » car, avez-vous pensé à la raison pour laquelle le son CH tel que nous le prononçons aujourd’hui s’écrit avec ces deux lettres ?
C’est qu’en réalité, à l’origine, les mots comme « chien » se prononçaient autrement, le H indique un affaiblissement de la lettre qui le précède, il vient « alléger » la prononciation de la lettre (mais pas la faire passer d'un ק à un ש).
C'est comme l’absence de Daguesh en hébreu.
Un פ sans Daguesh ne donne pas P mais le même son affaibli, soit : F.
Comme en français où le H -dans son rôle d’affaiblisseur de consonne, fera du P un F en s’ajoutant à lui, par exemple dans « éléphant » ou « Philippe ».
Pour le C aussi il existait cette option « avec ou sans Daguesh », en ajoutant un H au C, ça l’affaiblissait et donnait « c-h-ien ».
[En anglais aussi le H est affaiblisseur de consonne, mais pas seulement du P, c'est aussi vrai pour le T qui sera affaibli lorsque suivi d'un H. ça se retrouve encore avec d'autres consonnes, mais la distinction s'est perdue avec le temps]
Voilà pourquoi les Rishonim français ont tendance à retranscrire les lettres CH par un ק, ou par un ק surmonté d’une marque
(si c'est le cas), car ils lisaient ces lettres beaucoup plus comme un ק que comme un ש et pas parce qu’ils voulaient éviter la confusion avec le Sin.
Pensez donc, si ça avait été la raison, pourquoi s’enquiquiner à ajouter un signe diacritique étranger à l’hébreu (comme le tilde dont vous parliez) alors qu’ils auraient pu distinguer le Sin du Shin par le point à gauche ou à droite, comme d’usage en hébreu.
(Voire réserver le Shin à ce son et utiliser exclusivement le Samekh pour le S.)
Comme c’est une « dérive » du français d’origine, dans certains mots la prononciation du CH a tendu de l’autre côté vers le son K
(comme dans « chorale » ou « technique ») et dans d’autres (
majoritaires) elle a tendu vers le son ש
(comme « chien » ou « chapeau »).
Les mots avec CH qui se retrouvent dans d’autres langues sont souvent prononcés K, comme château, de chastel et dans certaines régions castel, de castellum en latin.
Pareil pour chapeau, et tant d’autres.
Chameau -camel.
Ou même en français : Le nom des castagnettes leur vient de leurs formes en châtaigne.
Charbon -carbone.
Chauve – calvus en latin – qui donne quand même en français calvitie.
Et il y en a encore plein comme ça…
Citation:
Voir la table de translittération au début du livre de Moshé Katana.
C’est plutôt « Katan », ou « Catane » comme il l’écrivait lui-même en caractères latins.
Mais pas Katana.
Il s’agit de
Paul Klein, décédé en 1995, frère de
Théo Klein.
Des hommes, des juifs, comme on n’en fait plus, hélas.
En arrivant en Erets il a hébraïsé son nom en le traduisant en Catane (Klein signifiant petit).
En effet, il parle de la distinction par un signe sur le Kouf pour indiquer le son « ch », mais il ne s’agit que d’une minorité des manuscrits et aucun ne date de l’époque de
Rashi pour certifier que
Rashi lui-même faisait cette distinction.
Ajoutons encore qu’il est probable qu’il ne la faisait pas car, sans cela, il aurait été préférable d’attribuer le Shin à ce son et d’utiliser le Samekh (ou le Sadé) pour le son S.
De plus, si
Rashi lui-même avait indiqué un signe sur les ק , par quel miracle auraient-ils tous disparus de la majorité des manuscrits ?
Ce qui nous pousse à croire que ces signes n’ont été ajoutés que tardivement, par des copistes vivant à une époque où la prononciation française avait déjà commencé à évoluer pour prononcer les lettres CH comme le son du Shin.
Cette évolution n’étant pas une invention de mon cru encore une fois, mais attestée par la prononciation encore en vigueur chez certains villageois du Nord.
J’aurais bien voulu avoir l’aval et le soutien de
Moshé Catane, qui était plus à même et mieux placé que moi pour « produire » ce « ‘hidoush », mais hélas, il ne l’a pas fait.
Cependant, sur l’idée de l’évolution de la prononciation du français dans les Leazim, il écrit lui-même
(à la fin de cette introduction, avant la page des notes, au paragraphe débutant par לבסוף, à la lettre א) au sujet de l’évolution de la prononciation des lettres « CH » dont je parle ici, qui correspondait à un ק' רטובה (dans ses mots) et qui est devenue finalement comme le ש' ימנית.
Je ne sais pas pourquoi il n’est pas allé plus loin en écrivant comme moi qu’à l’époque de
Rashi le CH se prononçait ainsi et que c’est plus tard que ça a changé et évolué vers le son du Shin.
Mais en tout cas, l’idée est là et les éléments aussi.
Par manque de temps, je ne peux pas me relire, désolé pour les possibles fautes, ce qui serait un comble pour un post sur ce type de sujets :)