Le Chabbath qui précède la fête de Pourim est appelé « Chabbath zakhor » car nous y lisons, en plus de la paracha de la semaine, le paragraphe de la Tora qui nous invite à « effacer le souvenir d’Amaleq de sous le ciel, de nous souvenir de lui et de ne jamais l’oublier!” (Devarim 25, 17-19).
Quant à la haftara, elle nous rappelle que le roi Saül, qui avait été chargé par le prophète Samuel de mettre en application ce commandement de la Tora, lui a désobéi.
Nous percevons ainsi, explique le rabbin Jean SCHWARZ dans son livre « Le livre des Haftarot », le lien qui relie, non seulement la haftara à la partie additionnelle de la paracha, mais aussi toutes les deux à la fête de Pourim, dont le héros malfaisant, Haman, était un des descendants d’Amaleq.
Mais quelles sont, se demande-t-il, la raison d’être et la portée de cette obligation « d’effacer le souvenir d’Amaleq » dont avait été chargé Saül, quatre siècles après l’attaque dont nos ancêtres furent les victimes dans le désert ? Nous savons pourtant que la Tora, dans un ordre d’idées analogue, nous interdit de haïr les Egyptiens, malgré le dur asservissement qu’ils nous ont fait subir, ni les Edomites, pourtant de la même famille qu’Amaleq (Devarim 23, 8).
A un moment donné de notre histoire, répond-il, ce devoir d’effacement s’appliquait effectivement à un peuple qui avait particulièrement manqué à ses obligations humaines, en s’attaquant à de faibles esclaves fuyant leur sort et cherchant leur liberté. A l’époque de Saül encore, ce « souviens-toi » gardait toute sa valeur : Amaleq n’avait pas changé, et il fallait l’extirper complètement de la communauté des peuples.
Mais ultérieurement, ce « souviens-toi » a pu perdre son sens étroit et primitif, et s’appliquer à tous les « Amaleq » possibles, à tous ceux qui, dans le concert des nations, n’ont d’autre visée que l’oppression des plus faibles, l’exploitation de l’homme par l’homme et même son anéantissement physique. C’est en ce sens que, de nos jours encore, reste valable pour chacun de nous l’obligation « d’effacer le souvenir d’Amaleq », de nous souvenir en particulier d’un passé récent, et de ne jamais oublier où la moindre faiblesse et l’absence de vigilance de notre part peuvent nous amener.
