Quel est le sens des préparatifs de Pessa‘h ?
La spécificité du ‘hamets
Nos Sages font observer que rien dans la Tora ne ressemble aux prescriptions concernant le ‘hamets pendant Pessa‘h. Consommer du ‘hamets, même en quantité infime, en posséder ou en tirer profit est alors interdit. Pourtant, le reste de l’année, tout cela est parfaitement autorisé, il peut même s’agir d’une mitswa : à chaque repas de Chabbath, nous avons ainsi l’obligation de faire le motsi sur deux ‘haloth, qui sont bien entendu ‘hamets !
Dans notre tradition, le ‘hamets symbolise la racine de l’inclination au mal, le yetser hara’. Le levain fait gonfler la pâte, la remplit d’air, de vide ; de même, le yetser hara’ profite des déficiences de l’homme, du vide qui peut se trouver en lui, pour l’amener à pécher.
Pessa‘h est le tout début de notre histoire en tant que peuple voué à Hachem, il s’agit au sens propre de l’accouchement d’une nation, que nous revivons chaque année. Un accouchement est pratiqué en environnement stérile, de même Pessa‘h exige la destruction de toutes les influences négatives auxquelles nous sommes confrontés le reste de l’année. Nous avons en effet été libérés de l’esclavage d’Egypte à la condition de devenir « un royaume de prêtres et une nation sainte », cette mission exige un très haut niveau spirituel ! La rigueur des prescriptions relatives au ‘hamets, l’interdiction d’en consommer ou même d’en voir, sert à rappeler le combat quotidien qu’il faut mener chaque jour contre son yetser hara’.
A la lueur d’une bougie
Nous devons rechercher toute trace de ‘hamets qui se trouverait en notre possession pour le brûler avant Pessa‘h, ce qui nécessite un ménage méticuleux bien à l’avance. Pourquoi faut-il donc que la nuit précédant la fête, le chef de famille, muni d’une petite bougie, fouille à nouveau la maison ? Elle a déjà été vérifiée de fond en comble, il est bien peu probable que l’on y retrouve encore du ‘hamets ! La preuve, c’est que l’on dépose de petits morceaux de pain bien enveloppés en différents endroits, pour être sûr que la recherche ne sera pas infructueuse. A quoi peut-elle donc bien servir ?
« On vérifie la présence de ‘hamets à la lumière d’une bougie », enseigne la Michna (Pessa‘him 7b). Dans la Guemara, Rav Hisda explique cette pratique à partir d’un verset selon lequel « l’âme d’un homme est une lumière de Hachem, elle sonde au plus profond des entrailles » (Proverbes, 20, 27). L’âme est l’étincelle divine que Hachem en placé en chaque être humain, c’est ce que nous dit la première partie du verset ; de la suite nous apprenons que l’âme a une mission : celle de fouiller les moindres recoins de la personne pour la débarrasser de tout ce qui peut être négatif.
La recherche du ‘hamets a lieu durant la nuit, lorsque la faible lueur de la bougie éclaire l’obscurité dans un périmètre limité, ce qui oblige à s’approcher au plus près pour explorer les moindres recoins. L’âme, nous apprend Rav ‘Hisda, ressemble à une petite bougie, enfouie dans l’obscurité de son enveloppe corporelle, qui est chargée de conduire cette introspection salvatrice contre le yetser hara’.
L’empressement d’agir
Après avoir recherché puis brûlé le ‘hamets, et nous être abstenus d’en consommer pendant la semaine de Pessa‘h, nous aurions pu en rester là, mais la Tora nous demande en plus de manger des matsoth. Leur fabrication requiert une extrême vigilance : la pâte doit être travaillée et pétrie sans interruption, avant d’être cuite dans un délai très court, sans quoi la moindre trace d’eau peut provoquer une fermentation.
Cela est également porteur de sens : notre développement spirituel commence par éliminer tout ‘hamets, par scruter nos faits et gestes pour se défaire de tout ce qui est inspiré par le yetser hara’. Mais se détourner du mal ne suffit pas, il est aussi nécessaire de faire le bien, d’accomplir les mitswoth avec empressement, à la manière dont on travaille la pâte des matsoth. Nos Sages enseignent en effet : « Quand une mitswa vient à portée de ta main, ne la laisse pas devenir ‘hamets ! » Soyons rapides ! Si l’on ne s’active pas, la mitswa risque de ne pas se présenter à nouveau, le yetser hara’ trouvera tous les obstacles imaginables pour nous empêcher de l’accomplir. Pessa‘h est une invitation à ne jamais rester passif : l’inaction est la porte ouverte au yetser hara’, de même qu’une pâte qui n’est pas malaxée en permanence devient ‘hamets.
En conclusion, notre tâche essentielle dans la vie est de travailler sur nous-mêmes pour que l’inclination au mal ne trouve aucun point d’appui dans nos esprits, dans nos cœurs et dans nos actes. La réussite de cette démarche dépend de notre enthousiasme à accomplir les mitswoth sans retard, avec énergie. Tel est le message à retenir en cette période de préparation à Pessa‘h : les prescriptions relatives au ‘hamets et à la matsa nous apportent des leçons de vie pour toute l’année.
Rav Yerou‘ham Leivovitz conclut : « Si nous n’avions été envoyés sur terre que pour exécuter correctement les mitswoth liées à la veille de Pessa‘h, cela nous aurait suffi ! »