Les commentateurs de la Bible ne s'astreignent pas à suivre les explications du Talmud sur les notions qui relèvent de la Agada, car seule la partie halakhique du Talmud est contraignante.
Si les Rishonim ne s'autorisent pas d'être en désaccord avec le Talmud, ce n'est pas en raison d'une déficience cérébrale qui les handicaperait tout autant concernant les Agadot, mais c'est par choix, car les rabbins ont décidé de ne plus présenter de désaccord sur le Talmud POUR CE QUI TOUCHE A LA HALAKHA.
Voir Kessef Mishné (hil. Mamrim §II, 1).
Cette convention rabbinique a pour but de maintenir l'unité du peuple dans la pratique des mitsvot, mais ne concerne pas la partie agadique du Talmud sur laquelle les auteurs les plus respectés se permettent de proposer des explications divergentes -tant que ça ne touche pas à la halakha.
Certains ah'aronim comprennent que cette convention a été possible grâce à la participation de la majorité des Sages, sans laquelle elle n'aurait pu revêtir ce caractère contraignant. C'est une sorte d'équivalence du Sanhedri Gdola qui aurait donc fixé la Halakha comme ce qui ressort du Talmud.
Dès lors, même si un sage dépasse de loin tous les autres de sa génération et même ceux des générations passées (comme ce qui a été dit au sujet du Gaon de Vilna par R. 'Haim Volozhiner qu'il égalait peut-être le Ramban et le Rashba), il ne pourra pas déroger aux lois du Talmud, même celles signées d'un rabbin qui lui serait reconnu inférieur.
Bien entendu, généralement, l'écart des générations suffit à constituer un écart de niveau entre les rabbins et il est extrêmement rare qu'un rabbin tardif puisse dépasser un ancien, mais quand bien même cela arriverait, cela ne lui permettrait qu'un désaccord avec les Rishonim ou Gueonim (qu'il égalerait), mais pas avec les Amoraïm ou Tanaïm.
Cependant, de nombreux a'haronim se permettent volontiers d'être en désaccord avec le Talmud sur les sujets agadiques, le Abrabanel en fait partie, mais il y a aussi le Ibn Ezra (voir Maharshal dans sa Hakdama au Yam Shel Shlomo 'Houlin et Baba Kama) voire aussi le Or Ha'haim qui est bien plus tardif (et qui revendique ce droit, voir son commentaire au début de Bereshit, page 10 dans le 'houmash Hamaor).
Car tout ce qui ne touche pas à la halakha n'est pas soumis à cet interdit de désaccord, comme l'a expliqué le Gaon de Vilna à son élève Rabenou Menashé Illier.
Le 'Hazon Ish (Kobets Inyanim p.194) semble ignorer cette information lorsqu'il s'attaque avec virulence au Rav El'hanan Wasserman (Kountras divrei Sofrim II, 5) sur ce point.
Il conviendrait d'approfondir ce sujet car il me semble que les a'haronim les plus récents se sont constitué une hashkafa nouvelle à ce sujet, en faisant fi de la position des gdolei haa'haronim et des Rishonim dont la shita semble se rapprocher de celle du Gaon de Vilna.