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Le périple de Jonas

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William
Messages: 7
Chers Rabbanim,

J'avais entendu dire que l'histoire de Yona (une de mes histoires préférées) serait une allégorie du déroulement de la vie humaine. Pouvez-vous m'éclairer sur ce point ?
Merci - J'apprécie grandement votre site,
William
Jacques Kohn ZAL
Messages: 2766
C’est le Gaon de Vilna qui propose sur le livre de Jonas une interprétation allégorique.

L’idée générale du livre est la suivante : l’âme humaine est envoyée sur terre pour améliorer l’état du monde. Cependant, loin de l’améliorer, elle le pervertit davantage. Aussi doit-elle en passer par un processus de réincarnation (guilgoul) afin d’accomplir la tâche qui lui est dévolue, mais cette fois dans la douleur.

Jonas, c’est l’âme humaine (yonathi tamathi – “ma colombe, mon amie parfaite”, que Hachem (Amitaï – de émeth : “vérité”) envoie dans le monde ici-bas, représenté par Ninive (èl newei qodchékhaChemoth 15, 13 : “vers la demeure de ta sainteté”). Mais le cœur – ici le capitaine du navire – et les organes qui composent le corps – ici les matelots – ont besoin de l’âme pour assurer leur survie, et celle-ci, que son état de torpeur laisse insensible, ne répond pas à leurs sollicitations. Le tirage au sort (1, 7) symbolise la question que se posent les organes du corps : A qui et auquel d’entre nous faut-il attribuer la “faille” génératrice de nos malheurs ? Est-ce la faute de la langue, du cerveau, d’un autre organe du corps ?

Le poisson symbolise la tombe, ainsi que l’ange préposé à ceux qui sont morts. Les trois jours et les trois nuits que Jonas passe dans le ventre du poisson (2, 1) représentent les trois premiers jours après la mort pendant lesquels l’âme se morfond du corps qu’elle a quitté et attend de pouvoir le rejoindre.

Au terme de ces trois jours est annoncée à nouveau à Jonas la mission de partir à Ninive (3, 1 et s.). Il s’agit là du renvoi de l’âme sur terre au moyen de sa réincarnation dans un corps nouveau, réincarnation dont le but est de lui permettre de réparer les erreurs et les péchés qu’elle a commis dans sa première existence. Quant au qiqayone, il figure les richesses matérielles que l’homme reçoit dans ce monde-ci, émanations du GanEden.
William
Messages: 7
Merci beaucoup pour la précision de votre réponse - c'est exactement ce que je recherchais ! Hazak Oubarouch' !
William
david_fryda
Messages: 89
Shalom,

[Le poisson symbolise la tombe, ainsi que l’ange préposé à ceux qui sont morts. Les trois jours et les trois nuits que Jonas passe dans le ventre du poisson (2, 1) représentent les trois premiers jours après la mort pendant lesquels l’âme se morfond du corps qu’elle a quitté et attend de pouvoir le rejoindre. ]

En lisant votre reponse, je ressents que l'ame a un terrible besoin de se rattacher au corps.
L'ame, selon moi, devrait avoir envie de n'etre ni enfermee ni limitee par un corps. Elle devrait avoir envie d'etre "libre" de tout ce qui est materiel. Contrairement a nous, l'ame tend vers tout ce qui est spirituel.
Alors pourquoi l'ame voudrait-elle revenir dans un corps ?

Merci d'avance.

Gmar h'atima tova.
Jacques Kohn ZAL
Messages: 2766
La besoin qu’a l’âme de retrouver son corps a été brillamment exposé par rav Arieh Kaplan dans son ouvrage : Si vous étiez Dieu (Traduction française aux Editions EMOUNAH, p. 42 et suivantes) :

« L’homme, au moment de sa mort, pénètre dans un nouveau monde de lucidité. Il existe en tant qu’âme désincarnée et il est cependant conscient de ce qui se passe dans l’univers matériel. Il parvient progressivement à se concentrer à son gré sur tout événement physique. Cette expérience, au début, est effrayante : vous savez que vous êtes mort, vous voyez votre propre corps inanimé, vos parents et vos amis réunis en larmes autour de vous. De fait, on nous enseigne que, aussitôt après la mort, l’âme est plongée dans un grand état de confusion.
Quel est alors l’objet principal de son attention ? Qu’est-ce qui lui fait se concentrer sur tel objet plutôt que sur tel autre ?
Ce qui retient son attention, c’est, nous dit-on, son corps. La plupart des gens, nous l’avons vu plus haut, s’identifient à leur corps. Il est difficile pour l’âme de rompre avec cette habitude ; c’est pourquoi, pendant les premiers jours, elle demeure littéralement obsédée par son ancienne enveloppe. Un verset (Job 14,22) y fait allusion : « C’est pour lui que son âme est en deuil. »
Cela est vrai surtout avant l’inhumation. L’âme s’interroge sur le sort qui sera réservé à son corps. Elle observe avec autant de fascination que d’effroi ce qui est fait à celui-ci, et les préparatifs de l’enterrement.
C’est là une des raisons pour lesquelles le Judaïsme témoigne tant de respect pour nos restes. Nous imaginons aisément la douleur éprouvée par l’âme au spectacle de son « emballage » physique qui serait manipulé comme la carcasse d’un animal. C’est pourquoi la Torah interdit de telles manœuvres.
Ceci n’est pas sans rapport avec le problème des autopsies. On conçoit sans peine ce que ressentirait notre partie immortelle à voir son vêtement gisant sur une table de dissection pour y être examiné et manipulé.
L’âme désincarnée va mettre beaucoup de temps à apprendre à se concentrer. Elle ne voit plus par des yeux physiques, mais par un procédé pour la description duquel notre vocabulaire n’a pas de mots, et que les Cabalistes désignent sous le terme de Kaf HaKél’a (poche de fronde) : c’est comme si une fronde nous projetait d’une extrémité à l’autre de l’univers. Il y est fait allusion dans le verset (I Samuel 25,29) : « L’existence de mon seigneur restera liée au faisceau des vivants que protège l’Eternel, ton Dieu, tandis qu’il atteindra, avec la fronde, celle de tes ennemis. » L’âme, dans un état de totales confusion et désorientation, reçoit des informations jaillissant de partout.
L’une des rares choses sur lesquelles celle-ci peut se concentrer sans difficulté est son propre corps. Il fait partie de son environnement familier et elle semble garder quelque lien avec lui. D’une certaine manière, il constitue un refuge contre ce dépaysement. »
david_fryda
Messages: 89
Merci Rav de votre reponse tres rapide.

[L’une des rares choses sur lesquelles celle-ci peut se concentrer sans difficulté est son propre corps. Il fait partie de son environnement familier et elle semble garder quelque lien avec lui. D’une certaine manière, il constitue un refuge contre ce dépaysement. » ]

L'ame serait-elle capable de garder "quelque lien" avec le corps meme apres plusieurs gilgoulim ? Si votre reponse est positive, en quoi cela pourrait nous affecter ?

Merci encore.

Kol touv.
Jacques Kohn ZAL
Messages: 2766
La question que vous me posez fait appel à des données mystiques sur lesquelles il m’est impossible de me prononcer.
david_fryda
Messages: 89
Merci tout de meme pour tous les eclairecissements.

Kol touv.
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