Le Da‘ath zeqènim fait observer, à propos de l’explication de Rachi, que Joseph est certes resté vice-roi d’Egypte après la mort de Jacob, ce qui pourrait donner à penser que ce n’est pas celle-ci qui a marqué le début de la souffrance de l’esclavage, et donc celui de la « fermeture » des yeux et des cœurs d’Israël. Cependant, explique-t-il, l’esclavage a commencé dès la mort de Jacob, modérément il est vrai.
Le Kethav Sofèr propose, quant à lui, une explication qui n’a rien perdu de son actualité : Au moment de la mort de Jacob, de nombreux Hébreux vivaient en Egypte. Certains d’entre eux, pressentant que la disparition du patriarche allait marquer le début de l’esclavage, se rapprochèrent des Egyptiens en espérant que cela les mettrait à l’abri de la servitude.
Le seul résultat en a été un affaiblissement de leur foi en Hachem et un sentiment de mépris à leur égard entretenu par ceux-là mêmes dont ils recherchaient la compagnie.
C’est en ce rapprochement de mauvais aloi et en cette décision inappropriée qu’a consisté cette « fermeture » des yeux et des cœurs d’Israël dont parle Rachi : Bien loin de leur épargner la servitude et les souffrances qu’elle a générées, elle les a au contraire accélérées.
On trouve, sous la plume de S. R. Hirsch, une autre explication : Les dix-sept ans que Jacob a traversés paisiblement en Egypte ont été de peu d’importance et de portée comparés aux années qu’il a passées avant d’y venir. Aussi la Tora n’a-t-elle pas voulu consacrer à ces dix-sept ans un paragraphe distinct, et les a-t-elle rattachés à la parachath Wayigach, c’est-à-dire à celle qui a marqué un tournant dans la vie du patriarche. Jacob a, certes, passé la fin de sa vie dans le confort et entouré de l’affection des siens, mais la Tora attribue à ces dix-sept ans moins d’importance qu’aux années de lutte et d’élévation spirituelle, même si celles-ci se sont déroulées dans la pauvreté et les persécutions.