La haftara Eqèv, la deuxième des chiv‘a de-ne‘hmatha, comporte un verset qui mérite de retenir notre attention particulière :
« Ainsi a parlé Hachem : Où est la lettre de divorce de votre mère que Je lui aurais envoyée ? Ou qui est celui de Mes créanciers auquel Je vous aurais vendus ? Voici, vous vous êtes vendus par vos iniquités, et c’est à cause de vos transgressions que votre mère a été renvoyée » (Isaïe 50, 1).
Ce verset, qui se présente sous la forme d’interrogations rhétoriques, c’est-à-dire d’un emploi fictif d’une forme interrogative à des fins exclamatives, affirme l’indissolubilité du lien entre Hachem et la communauté d’Israël. Il paraît cependant inconciliable avec cet autre texte, celui-là du prophète Jérémie :
« J’ai vu, pour toutes les choses en lesquelles Israël l’infidèle avait commis adultère, Je l’ai renvoyée et lui ai donné sa lettre de divorce… » (Jérémie 3, 8).
Il n’est plus question, dans ce second verset, d’une indestructibilité de l’alliance entre Hachem et Israël, mais au contraire de sa rupture, caractérisée par la remise d’une lettre de divorce.
Certains commentateurs, et notamment Radaq, considèrent que Jérémie a voulu parler des « Dix tribus perdues », c’est-à-dire de celles du Royaume d’Israël, détruit un siècle et demi avant celui de Juda, qui n’allaient jamais revenir de leur bannissement. Isaïe aurait évoqué, quant à lui, le sort des Judéens, qui allaient réapparaître de leur exil après soixante-dix ans.
On peut dire aussi, avec le commentateur du livre d’Isaïe dans la collection du Mossad ha-rav Kook, que les deux prophètes se sont préoccupés, l’un comme l’autre, d’inciter leurs auditeurs au repentir. Jérémie, tout comme Isaïe, a prophétisé sur la techouva de l’ensemble des enfants d’Israël, ceux du « Nord » comme ceux du « Sud », ainsi qu’il résulte du verset 12 du même chapitre : « Reviens, Israël l’infidèle, dit Hachem ; Je ne ferai pas peser sur vous un visage irrité, car Je suis bon, dit Hachem ; Je ne garderai pas ma colère pour toujours », et plus loin : « En ces jours-là, la maison de Juda marchera avec la maison d’Israël ; et ils viendront ensemble du pays du nord au pays que J’ai donné en héritage à vos pères » (3, 18).