L'insémination artificielle fait l'unanimité sans exception chez tous les Poskim et Gedolim :
Elle est interdite.
https://www.techouvot.com/insemination_artificielle-vt4377.html
Voici un article très exhaustif à ce sujet :
Insémination de convenance
«AVOIR UN ENFANT SEULE» du point de vue du judaïsme.
par Rav Benjamin David
shlit"a/ Janvier 2002
Ces derniers temps, de plus en plus de jeunes femmes juives pratiquantes, et non mariées à l’age de 35-40 ans, se posent la question de savoir s'il est autorisé de se faire inséminer par des semences d'un donneur, et d'élever cet enfant sans père.
Beaucoup d'entre elles, pour avoir perdu l'espoir de se marier, et désirant réaliser leur «droit» d'être mères, recherchent des arguments afin d'avoir l'autorisation hilkhatique pour cette intervention.
L'Institut Pouah de Jérusalem, spécialisé en éthique médicale dans les domaines de fécondité et gynécologie, a décidé de vérifier les aspects de cette question en prenant contact avec un certain nombre de décisionnaires rabbiniques dans le monde.
La conclusion de tous les Rabbanim était unanime: L'insémination d'une célibataire par le sperme d'un donneur est interdite par la loi juive, que la semence vienne d'un donneur juif ou d'un non-juif.
Nous nous proposons de vous exposer ici une partie des arguments avancés par les Rabbanim, et qui sont aussi bien d'ordre juridique que d'ordre moral et spirituel.
1.Importance de la connaissance du père.
Le Talmud développe le principe du besoin de connaitre d'une manière certaine l'identité du père d'un enfant. Pourquoi cela ? Dans le but d'éviter les mariages consanguins. En effet, il existe un risque, même minime, qu'un enfant né d'un don de sperme, se marie avec son demi-frère ou sa demi-soeur, dans le cas où le sperme aurait été partagé avec d'autres femmes, ou même dans le cas où le père génétique aurait une fille légitime suite à un mariage.
Le mariage entre frère et sœur, ou même demi-sœur, est considéré comme un inceste. Les enfants issus de ce mariage sont considérés par la loi toranique comme des «Mamezerim», statut juridique qui les empêche de pouvoir se marier (seul le mariage entre mamezerim serait autorisé).
C'est pour éviter ces graves problèmes que le Talmud demande à une femme veuve ou divorcée d'attendre trois mois avant de se remarier, afin que l'on puisse distinguer entre le sperme du premier mari et celui du deuxième mari, et donc définir d'une façon certaine l'identité du père dans le cas d'un enfant conçu à cette période intermédiaire.
Pour cette même raison, la Thora demande, durant les traitements de PMA (Procréation Médicalement Assistée) la présence d'un/e délégué/e rabbinique, qui assurera la traçabilité de la paternité de l'enfant.
La connaissance de l'identité du père est aussi importante pour les lois d'héritage. En effet, si le défunt a d'autres enfants dans le monde que les enfants de son propre mariage, se pose le problème d'un héritage qui devrait peut-être être partagé par tous les descendants, même ceux issus d'un don de sperme. L'omission de certains des descendants lors du partage serait alors considéré comme un vol car, selon la loi toranique, un homme ne peut déshériter ses enfants.
Un enfant dont on ne connait pas le père (par exemple issu d'un don de sperme) a le statut social de
shtouki. Cet enfant n'a le droit de se marier, d'après la loi toranique, qu'avec une personne de même statut.
L'insémination de sperme d'un donneur anonyme est donc impensable.
2.Associés dans la création d'un enfant: Le père, la mère et D-ieu.
L'angle de vue sous lequel nous avons présenté le sujet jusqu'à présent est un argumentaire juridique. Or, le problème principal de l'acte de cette femme, c'est de ne voir dans l'homme qu'une source de « matière séminale ».
Selon cette conception des choses, les notion de mariage, mari, père, sont vides de signification. L'acte sexuel ne serait qu'un acte technique, dont le but seul et unique serait de féconder un ovocyte. Dans ce cas-là, l'origine de cette matière première peut aussi bien être un homme que la banque du sperme !
Cette conception des choses est parfaitement étrangère au judaïsme qui voit, dans l'union d’un homme et d'une femme, un acte empli de sainteté (en hébreu, le mariage est appelé
Kidouchin, c'est-à-dire sanctification). La Torah précise: « C'est pourquoi l'homme abandonne son père et sa mère et s'unit à sa femme, et ils deviennent une seule chair ». Selon l'explication du grand commentateur Rachi, une seule chair veut dire : un enfant. Il est donc clair que l'enfant doit naître au sein d'un couple uni par le mariage. Et pour expliquer cette donnée, le Talmud nous enseigne qu'il y a trois associés dans la conception d'un enfant : la mère, le père, et D-ieu. C'est pour cette raison que le Talmud compare le respect des parents au respect de D-ieu, et l'insulte aux parents au blasphème de D-ieu.
Sur ce passage du Talmud, le commentateur Ibn Pékouda soulève la question: Pourquoi est-il dit spécifiquement à l'homme que dans la procréation, il y a trois associés ? N'y a-t-il pas également intervention divine dans la procréation du veau par le taureau et la vache ? Comment l'homme peut-il être associé au divin, qui est la source de vie de toute la création, père et mère compris ?
Ibn Pékouda nous explique que D-ieu a choisi le père et la mère comme associés afin d'apporter à l'enfant la part de spirituel qui le différencie des autres créatures. Lorsque, dans un foyer, le père et la mère vivent en harmonie, la présence divine réside parmi eux et entoure l'enfant. Mais lorsqu'une femme décide de faire un enfant seule, sans père, le troisième associé, le divin, se retire aussi car l'équilibre est rompu. Naît alors un enfant auquel il manquera une partie de la force divine. Qui nous en a donné l'autorisation …
Cette femme peut répondre que le divorce existe dans le judaïsme, et qu'il est donc concevable qu'un enfant grandisse sans père.
Ces situations ne sont pas comparables. Un enfant, né de parents divorcés, ou orphelin, n'est pas un enfant sans père. Le père existe, au fond de l'enfant, à chaque instant de son existence. Il peut s'identifier à son image, suivre son modèle, avoir une référence sur laquelle s'appuyer.
Alors que dans le cas d'une insémination anonyme, l'enfant n'a aucun modèle parital où se projeter, il a au fond de lui un vide total. C'est d'ailleurs pour cette raison que des adultes, nés dans les années soixante d'un don de sperme, aux Etats-Unis et au Canada, se mettent aujourd'hui à rechercher des traces de leur père biologique !
Un enfant sans identité paritale risque d'être perturbé psychologiquement. La décision de la mère d'exercer son « droit » à être mère est donc au détriment de l'équilibre spirituel de son enfant. D'où la question : A-t-on le droit de faire du mal à autrui afin de se faire du bien à soi-même ? Cette attitude va totalement à l'encontre de l'enseignement de Hillel dans le Talmud, et qui précise bien que le fondement de tous les commandements du judaïsme est : « Aime ton prochain comme toi-même, et ne fais pas à ton prochain ce qui t'est détestable. »
Dans le judaïsme, être père n'est pas qu'une fonction biologique, c'est avant tout une responsabilité envers son enfant, et des obligations que seul le père doit remplir : le faire circoncire, racheter son premier-né, lui enseigner la Thora, lui enseigner un métier et l'aider à se marier. Le Talmud précise que ces obligations sont sous la responsabilité du père.
Avoir un enfant, ce n'est pas un droit, mais principalement un devoir. Ce n'est pas l'objet d'une jouissance personnelle, mais une responsabilité envers l'humanité. C'est pour cette raison que d'après la halakha, seul un homme qui aurait engendré un fils et une fille et qui, par cela a contribué à la perpétuité de la présence humaine sur terre, aura pleinement accompli le commandement de « Croissez et multipliez » .
C'est pour cette raison-là que Hanna, la mère du prophète Samuel, l'a consacré à D-ieu en l'amenant aux prêtres du Sanctuaire de Shilo. C'est la preuve que dans sa prière adressée à D-ieu, elle ne cherchait pas simplement à assouvir un besoin, ou à exercer son « droit » égoïste à être mère, mais à accomplir son devoir envers son peuple et l'humanité toute entière.
Pour un enfant, être orphelin (ou pour une femme être veuve) est considéré comme le statut social le plus difficile à assumer. Il est tout particulièrement précisé qu'il est interdit d'offenser la veuve et l'orphelin . Le Midrach nous enseigne que D-ieu est le père de tous les orphelins, et qu'il s'occupe d'eux plus spécialement. Sommes-nous autorisés à mettre au monde un orphelin
à priori?
Selon toutes ces sources de réflexion et d'enseignement, l'insémination de convenance est totalement interdite par le judaïsme, interdit qu'enfreindraient la mère de l'enfant et le père donneur de sperme, considéré comme abandonnant ses descendants.
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Rav Benjamin David shlit"a possède une maîtrise en Histoire et pensée juive. En plus de ses études rabbiniques à Mehola, il est aujourd'hui le responsable du département francophone de l'Institut Pouah qui a pour vocation d'aider bénévolement les couples durant la période des traitements de problèmes de fécondité et de répondre aux questions de halakha auxquelles ils sont confrontés. Rav David s'occupe également de guider les jeunes mariés dans leur nouvelle vie. Sa connaissance du milieu francophone doit beaucoup à la récente Alya d'un groupe de français à Kohav Hashahar - groupe dont il est le dirigeant rabbinique.