Cette souguia est un véritable bourbier, il ne m’est pas possible d’en sortir un « psak » assuré (et rassurant) sans tremper dans la ‘houmra, mais disons que pour ce qui est du Gaon, il m’apparaît évident de donner la préséance au Shoul’han Aroukh et Rama (O’’H §XXVII, 6) qui optent pour le bras droit dans votre cas (le Shoul’han Aroukh selon la règle « yesh veyesh, halakha keVeyesh »).
D’autant que cette opinion (=mettre sur le bras droit) est soutenue par de nombreux Poskim de toutes les communautés comme
le Shoul’han Aroukh Harav Baal Hatanya,
le Mishna Broura,
R. Khalfon Moshé hacohen (Shoel Venishal I, §3) et
Rav Ovadia Yossef (Yabia Omer VI, §2 et IX, §108).
Le problème est que dans votre cas, le Gaon ne sera pas le seul à préconiser de mettre les tfilines sur le bras gauche, car le Ba’h (ad loc), sans préférer le 1er Yesh Omrim, donne la préférence de manière générale au bras gauche et indique d’y mettre les Tfilines dès qu’on utilise sa main droite que ce soit seulement pour l’écriture ou seulement pour le reste (c’est donc une troisième opinion qui s’ajouterait aux deux citées par le Shoul’han Aroukh et viendrait un peu comme un compromis).
Comme vous écrivez de la gauche et êtes plus fort de la droite que vous utilisez pour le sport et autres, selon le Ba’h, il conviendrait de mettre les Tfilines sur le bras gauche.
Nous avons donc le Ba’h et le Gaon qui vous diraient de mettre les Tfilines sur le bras gauche.
De plus, le Ba’h n’est pas seul dans son « compromis », il y a aussi
le Aroukh Hashoul’han (ad loc),
le Shoel Oumeshiv (Tanina, II, §58 et III, §123),
le Mor Ouktsia (§27),
Maguen Guiborim (ad loc),
Artsot Ha’haim (ad loc),
Shout Tsema’h Tsedek (§4)
-tous cités par le Piskei Tshouvot (§27, 14, note 111) qui ajoute encore que c’est le psak pour lequel penchent aussi
le Igrot Moshé (O’’H IV, §11),
le ‘Heshev Haéfod (I, §103) et
le Kaf Ha’ahim (§27, sk.31).
Ça fait quand même beaucoup de rabbins qui vous diraient de mettre vos Tfilines sur le bras gauche…
Ceci étant, vous n’êtes pas non plus dans le cas extrême où seule l’écriture se fait de la main gauche, vous utilisez aussi votre main gauche pour votre travail.
Donc si on considère que le « Rov melakhto » dans votre cas se fait par la gauche, ça ajoute une raison de vous considérer gaucher et de mettre les Tfilines sur le bras droit.
D’autant que l’utilisation de votre main droite semble réservée à ce qui nécessite de la force (sport…) mais elle ne serait pas la seule à être habile (voire au contraire), vous devez certainement aussi pouvoir utiliser la gauche pour les mêmes choses (mais avec -certes- moins de puissance), ce qui conforte l’attribution du titre de gaucher.
En conclusion, je ne vous cache pas que de nombreuses personnes dans votre cas mettent les Tfilines sur les deux bras (de préférence simultanément, pas comme ce qu’écrit le ‘Hessed Laalafim pour qui on peut les porter en même temps, cf. Yefé Lalev qui s’y oppose), mais n’ayant pas étudié en profondeur cette souguia, je ne peux pas me permettre de vous dire que ce soit réellement la solution halakhique inévitable.
J’aurais aimé pouvoir trancher de manière plus sûre, mais je ne m’en sens pas capable, je préfère vous avouer ma faiblesse plutôt que vous indiquer une directive "populaire" avec une assurance injustifiée, ce qui équivaudrait à mes yeux à vous tromper.
Si vous ne savez pas vers qui vous tourner et êtes dans le désarroi, je pourrais, à votre demande, questionner pour vous des autorités (qui risquent fort de répondre de mettre les Tfilines sur les deux bras) [mais je ne pense pas pouvoir trouver prochainement le temps nécessaire à l’approfondissement de cette souguia afin de pouvoir vous donner « mon » avis sur le sujet].