Question 1
Bonjour Rav.
De nos jours certains études scientifiques tendent à montrer que l'attirance d'un homme vers un autre homme (i.e. l'homosexualité) pourrait être causée par un pic d'hormones à un certain instant de la vie embryonnaire. Suivant cette logique, l'homosexualité serait présente des la naissance (évidemment dans certains cas, pas dans tous ou la question ne se poserait pas). Ainsi, dans ce cas de figure comment comprendre l'épreuve pour ces hommes qui ne pourraient pas construire réellement de vie de famille ou qui devrait se forcer pour avoir une famille et des enfants et tout ce qui ca implique ? Cette épreuve est-elle au même niveau que n'importe quelle autre ?
Et si oui, comment le comprendre avec les implications sur les autres mitsvot tels que avoir des enfants, etc. ?
Réponse
L'année dernière j'ai publié un article qui touche le sujet que vous évoquez ; je vous l'envoie ici.
Une institution de la communauté juive de France a publié en 2019 un communiqué, dans lequel elle souhaite la bienvenue à une association juive qui défend la cause LGBT, ajoutant même qu'elle était très heureuse de l'y accueillir.
On est pourtant en droit de douter de l'opportunité de cet accueil. La vocation de cette institution citée peut-elle s'identifier à une quelconque cause juive ? Ladite association, comme d'autres du genre, défendent l'idée que certaines inclinations seraient innées, et pour ainsi dire, pratiquement irréversibles. Par conséquent, elles conduiraient naturellement à un passage à l'acte, qui, faut-il le rappeler, est désapprouvé par la Thora. Plus encore, cette idée de l'inné au caractère irrémédiable n'est-elle pas elle-même, en tant que telle, aux antipodes du judaïsme, selon lequel nul n'est forcé d'agir selon ses penchants ?
Voici ce qu'écrit Maïmonide à ce propos :
« Le libre arbitre est laissé à tout un chacun : s'il désire s'orienter vers le chemin du bien et être un juste, il en a la possibilité. Et s'il désire emprunter le chemin… il en a aussi la possibilité… Ne laisse cette idée… te monter à l'esprit, selon laquelle D-ieu décrète depuis la création de l'homme s'il sera juste ou non… Le libre arbitre est un principe fondamental, le pilier de la Torah et des Commandements, comme il est dit : "Vois, J'ai placé devant toi en ce jour la vie et le bien…", et il est dit : "Voyez, Je place devant vous en ce jour la bénédiction …", cela veut dire que vous avez le libre choix… Si D-ieu décrétait qu'un homme est juste ou non…, ou s'il y avait un facteur inné en lui qui l'attirait (forcément) vers l'un des deux chemins, vers une certaine conception, un certain trait de caractère, ou certains agissements, comme ces stupides astrologues l'imaginent, comment D-ieu aurait-Il pu nous ordonner par l'intermédiaire des prophètes : "Faites ceci", "Ne faites pas cela", "Corrigez vos voies"… alors qu'Il aurait déjà été décrété ce que nous serions depuis notre naissance ?
Ou encore [si D-ieu décrétait] que notre instinct nous attire (forcément) vers certaines choses et qu'il serait impossible de s'en dégager, quelle place occuperait alors la Torah toute entière ? Et par quel jugement le méchant serait-il puni et le juste récompensé ? Le Juge du monde entier ne ferait-Il pas justice ? » (Michné Torah, Hilkhot Techouva, 5).
Celui dont la pensée incite à se suicider, à commettre un infanticide, à gaspiller son argent ou celui de son prochain, ou à séduire une femme même mariée, et qui s'en abstient, est considéré comme un Tzadik, un Juste. Bien qu'il ne soit pas un Hassid, un homme pieux, qui lui, n'aurait même pas ces inclinations, il est toutefois qualifié de Tzadik (Rambam, Huit Chapitres, chapitre 6). D-ieu l'aime, il mérite le monde futur, et les portes du Paradis lui sont grandement ouvertes.
L'homme confronté aux idées opposées à la Thora ne doit-il pas être encouragé par ses pairs à s'abstenir d'agir, et devenir ainsi un Tzadik ?
Lorsque la pensée s'est imposée à l'homme, la Thora ne retient rien contre lui, selon le principe : ce qui vient à l'homme sous contrainte, il n'en est pas responsable (Devarim, 22, 26). Quand bien même l’homme l'aurait lui-même attirée, cette pensée n’est pas considérée comme un acte : "D-ieu ne considère pas la pensée comme un acte" (Kidouchin 40a).
Par ailleurs, selon la Thora, celui qui ne se comporte pas selon ses principes doit à tout le moins s'abstenir de toute publicité, et à fortiori au nom du judaïsme, afin de ne pas y entraîner d'autres (Kidouchin 40a). Elle qualifie l'exhibition des comportements défendus de « profanation du Nom de D-ieu et de Sa Religion », qui est l'une des choses les plus graves de la Religion juive (Yoma 86a ; Rambam, Hilkhot Techouva, 3, 6).
Or au nom de la liberté d'expression, les mouvements qui défendent la cause LGBT occupent l'espace public, les médias de tous genres et réseaux sociaux, organisent des parades… De plus, selon la législation française, l'auteur d'une parole publique irrespectueuse à l'encontre de ces associations peut être poursuivi pénalement. Lesdites associations craignent qu'une parole froissante puisse entraîner une réaction contre leurs membres. Au nom même de cette liberté d'expression, au lieu de se réjouir d'accueillir ladite institution, ne devrait-on pas plutôt rappeler que ses valeurs sont contraires à celles du judaïsme ? Ne devrait-on pas plutôt craindre que leurs idées, répétées systématiquement, ne provoquent une intrusion dans certains esprits, en particulier chez les jeunes - et pas uniquement - lesquels n'auraient pourtant éprouvé aucun besoin de se (re)mettre en question sur ces sujets ? Les jeunes, ne méritent-ils pas de pouvoir préserver leur objectivité ?
Le phénomène étrange, relevé par un humoriste observant que ces groupes, pourtant dans l'incapacité de se reproduire, sont de plus en plus nombreux, n'est-il pas justement la conséquence de cette publicité ? Pourquoi donc donner une légitimité à la diffusion des idées qui se situent aux antipodes du judaïsme ?
Toute institution juive, bien que ne portant pas uniquement des valeurs religieuses, ne devrait pas être en contradiction avec les valeurs élémentaires du peuple juif, qui sont aussi l'apanage de l'humanité toute entière.
Question 2
Merci pour votre réponse sur l'homosexualité. Si j'ai bien compris il n'y aurait pas d'inné auquel on ne peut remédier Cela voudrait dire qu'un homme attiré par les hommes pourrait changer cela à force de travail et de contrôle de ses taavot (envies) jusqu'à même réussir à être attiré par les femmes ? Ou bien non, il pourrait uniquement se contrôler mais ne pas faire plus et ainsi ma question revient ! Qu'en est-il d'une potentiel vie de famille, de pirya verivya pour de telles personnes ?
Réponse
On peut se contrôler à ne pas fauter. Si on a du mal à se contrôler, alors, selon ce que j'ai entendu, on pourra baisser l'envie avec un traitement. Il faut consulter des médecins qui ne miment pas les idées en cours ces temps-ci. Je parle pour quelqu'un qui craint D-ieu et qui ne veut pas fauter, et qui est prêt à tout faire pour ne pas fauter. Ceux qui ne craignent pas le péché riront peut-être de ces propositions, et nous n'avons rien avec eux et leurs idées.
Concernant la question à savoir si une telle personne peut réussir à ce qu'une femme l'attire, j'avoue que je ne connais pas le sujet. Mais, j'ai des bonnes raisons de croire que oui. Bien que certains crient hystériquement au loup, et que cela ne serait pas possible, je ne vois pas pourquoi on leur donnerait du crédit. Peut-être, et c'est probablement la vérité, tolèrent-ils, voire encouragent-ils le péché. Leur jugement défavorable est peut-être influencé, voire une conséquence, de leur manque de confiance dans la Thora et la Emounah.
En fait, il existe dans la Emounah des forces insoupçonnées. Cette idée est corroborée avec les dires des psychiatres de renommée mondiale, et je n'en cite que trois: l'un, non-juif, le Zurichois Carl Gustav Jung (1875-1961), et deux juifs, le professeur parisien Henri Baruk (1897-1999) et le viennois Victor Frankl (1905-1997). Je n'ai pas son texte sous mes yeux pour pouvoir le citer mot à mot, mais Jung a écrit qu’il n'a pas vu dans sa vie des gens malades (mentalement) après les 35 ans de leur vie, où le fond de leur névrose n'était pas lié à la foi. Le professeur parisien Henri Baruk, renommé déjà avant la Shoah, guérissait après la Shoa de plus en plus avec la Emouna. Il abandonnait de plus en plus les médicaments ainsi que certains concepts freudiens, pour ne guérir qu'avec la Emouna. De même Victor Frankl, bien qu'il n’ait pas pu profiter d'une éducation d'un juif pratiquant, mais ses observations étant prisonnier dans le camp d'Auschwitz transpirent d'une profonde Emouna. Il a ainsi développé la logothérapie, selon laquelle la guérison passe par la retrouvaille d'un sens dans la vie, un sens spirituel ; ses livres sont traduit dans 32 langues.
De ce fait, il est permis d'imaginer que le trouble d'attirance, comme les autres troubles, pourrait trouver une issue favorable, comme m'a déjà rapporté un psychiatre religieux de son expérience. Mais comme dans tous les troubles mentaux, la guérison n'est pas forcement obtenue.
Concernant la question de savoir quoi faire pour la mitsva de pirya verivya, il en est ainsi : celui qui n'est pas capable de l'accomplir est dispensé, comme pour tous les autres mitsvot de la Thora.
Celui qui demanderait pourquoi celui-ci serait privé de fonder une famille…, on doit remarquer qu'il y a malheureusement de très nombreuses personnes avec des handicaps variés qui les empêchent de fonder une famille. Et s'il demande pourquoi D-ieu lui a envoyé cette épreuve, il l'expliquera de la même manière qu'il explique les épreuves des autres handicapés, et toutes les souffrances humaines. Justement, il y a dans la Emouna et toute la philosophie de la Thora d'excellentes idées qui pourront apaiser le souffrant, comme l'a démontré l'Histoire du peuple juif. D'ailleurs, même la non-compréhension par l'humain des chemins de D-ieu est acceptable grâce à une forte Emounah.
Question 3
Par suite de votre réponse concernant un homme qui ne peut pas se marier, je vous demande : ne lui manque-t-il pas la joie de fonder une famille et avoir des enfants ? Que faire pour alléger sa souffrance et sa frustration, le sentiment de ne pas laisser une descendance ?
Réponse
Il n'y a pas que les enfants qui assurent l'éternité à l’homme. Aux eunuques qui ne fautent pas D-ieu réserve une plus grande éternité qu'aux gens qui laissent une progéniture. Voici ce que leur annonce le prophète Yéchaya : « Aux eunuques qui garderont mes Chabbat et qui choisiront ce qui M'est agréable, et qui persévéreront dans Mon alliance (de la Brit Mila et ne fautent pas avec des unions interdites), Je donnerai dans Ma maison et dans Mes murs une place et un nom préférables à des fils et à des filles ; Je leur donnerai un nom éternel, qui ne périra pas », (Yéchaya, 56, 5-6).
Il y a plusieurs sortes d'eunuques desquels parle le prophète. Il pense sans doute en premier lieu aux trois tzadikim sur lesquels lui-même prophétisa leur condition de vie. En fait, à cause d'une faute du roi Hizkia, Yéchaya lui annonce son châtiment : « Voici, les temps (de la destruction du Temple) viendront, où l'on emportera à Babylone tout ce qui est dans ta maison et ce que tes pères ont amassé jusqu'à ce jour ; il n'en restera rien, dit D-ieu. Et l'on prendra de tes fils, qui seront sortis de toi, que tu auras engendrés, pour en faire des eunuques dans le palais du roi de Babylone », (Yéchaya, 39, 6-7). Il s'agit de Hanania, Michaél et Azarya, que Nabuchodonosor nomma comme les plus hauts administrateurs dans son gouvernement, dirigés par Daniel. Ils ont marqué l'Histoire juive à jamais, quand ils ont refusé de se prosterner devant la statue et qu'ils sortirent indemnes du feu ardent (Daniel, 3).
Pourquoi le prophète les appelle-t-il eunuques ? Selon un avis, le roi les castrait afin qu'ils ne se marient pas et soient constamment disponibles pour gérer son empire (Sanhedrin 93b). Bien que sans doute ils refusèrent cette infamie, le roi les contraignit avec violence. Il se peut aussi que la castration était due à une infection dans le bas du ventre. En fait, ils étaient choisis pour leur qualité : « le roi ordonna au chef de ses eunuques d'amener quelques-uns des enfants d'Israël de race royale ou de famille noble, de jeunes garçons sans défaut corporel, beaux de figure, doués de sagesse, d'intelligence et d'instruction, qui auront la force de se tenir dans le palais du roi, et à qui l'on enseignerait les lettres et la langue des Chaldéens » (Daniel, 1, 4).
« Que veut dire : qui auront la force de se tenir dans le palais du roi ? Des gens capables de retenir leur corps de toutes faiblesses, entre autres de ne pas aller aux toilettes bien que le besoin soit pressant » (Sanhedrin 93b). Cette rétention a peut-être provoqué des infections qui les rendaient stériles, comme ce fut le cas chez soixante élèves de Rav Houna. Par milliers ils assistaient à ses cours (Ketouvot 106a) qui duraient très longtemps. Pour ne pas le perturber, certains se sont retenus de sortir aux toilettes, les organes en bas du ventre se sont alors infectés, et cela rendit stériles soixante sages parmi eux. L'un des rabbanim connaissait le danger, il se leva et sortit, et resta en bonne santé (Yébamot 64b).