Citation:
Au delà de la différence entre les sifrei Torah séfarades/ashkénazes (דכה/דכא), on voit dans le commentaire de Rachi qu'il avait une guirsa différente de celle que l'on connait. Je pense notamment à 3 endroits particuliers:
1- Berechit 25-6 sur pilagshim
2- Shemot 25-22 sur (Vé)eth
3- Bamibar 1-13 sur Vaashimem
Rachi a vécu il y a moins de mille ans, et pourtant le texte qui nous ait parvenu a subi quelques petites modifications malgré toutes les précautions qui ont été précises par les sages pour les éviter. Tout le monde était pourtant prévenu (cf Kiddoushin 30a). Errare Humanum est.
Si aujourd'hui, une communauté possédait encore un sefer Torah de l'époque de Rachi (avec des lettres en plus et/ou en moins) et qui serait kacher par ailleurs (pas de lettres effacées ou qui se touchent ...) pourrait elle lire la paracha avec Brakha?
C’est une très bonne question.
Si le détenteur de ce sefer torah est aussi détenteur d’une « tradition », d’une « massoret sans interruption » de faire la Brakha sur ce Sefer, oui, il peut faire la Brakha.
Cela veut dire que le sefer Torah qu’avait Rashi était Kasher même si nous ne ferions pas la brakha dessus de nos jours, lui n’a pas fait un « issour brakha levatala beshogueg » à son époque en faisant la brakha dessus.
Son sefer est peut-être plus « juste » que le nôtre, mais nous faisons la Brakha sur le nôtre en nous basant sur notre massoret ininterrompue. A l’instar des Amoraïm qui -en dépit de leur incertitude sur certains ‘Hassérot Veyétérot- faisaient la Brakha sur le Sefer Torah qu’ils avaient.
La Brakha ne nécessite pas que le sefer Torah soit « exactement comme celui de Moshé Rabénou », mais qu’il nous ait été transmis en tant que tel.
Une massoret ininterrompue a transmis דכא, une autre a transmis דכה, on fait donc la Brakha sur les deux sans considérer que cela soit contradictoire, cela prouve bien qu’il ne s’agit pas de dire que ce sefer soit exactement identique au sefer initial de Moïse.
Mais si nous
retrouvons le sefer torah de Rashi, sans qu’il y ait eu de Massoret à son sujet, on ne fera pas la Brakha dessus.
Il y a un sefer Torah attribué au Ran, que le Ran aurait lui-même écrit, et il a été retrouvé (je crois) au XXème siècle [mais depuis, certains chercheurs ont affirmé que ce Sefer n’a pas été écrit par le Ran], c’est un Sefer ancien, et on y trouve des différences dans la forme des lettres, différences qui sont considérées comme invalidantes de nos jours (le Kouf n’est pas en deux partie, le haut de la barre verticale touche la partie supérieure).
Comme nous n’avons pas de Massoret ininterrompue, on ne fera pas la Brakha dessus, même si, en son temps, ce sefer était kasher.
Je ne suis pas certain que ce qui va suivre soit unanime, mais pour aller plus loin, je dirais qu’a priori, même si l’on pouvait retrouver le sefer Torah de Moshé Rabénou himself, le vrai, celui qui était avec le Aron, et qu’on y constatait des différences de ‘hassérot Veyétérot, on ne pourrait pas faire la brakha dessus ! Puisque la Brakha a été instaurée sur les Sfarim d’une époque plus tardive.
Et encore plus loin : même si on retrouvait un sefer torah de l’époque de la Takana
(de faire cette Brakha) [dans la mesure où à cette époque il y avait déjà des doutes et éventuellement déjà différentes versions] on ne pourra pas faire la Brakha dessus non plus.
(Par contre, si à l’époque de la Takana il n’y avait eu qu’un seul Sefer Torah et aucun doute, on pourrait dire que la Takana fut de faire la Brakha sur CE nossa’h de sefer Torah, et dès lors, nous pourrions et devrions faire la Brakha dessus.)