A ma connaissance, les rabbins d'aujourd'hui considèrent que le second temple a été détruit par les Romains en raison des divisions, de la guerre civile s'étant produite à l'intérieur des murs de Jérusalem.
De son côté, l'historien Flavius Josèphe n'hésite pas à qualifier les séditieux de chiens qui déchiquètent le peuple, de bêtes sauvages qui détroussent les cadavres, etc.
Les exactions qu'il leur reproche sont nombreuses :
« Les factieux s'emportèrent à un tel degré de folie qu'ils prirent en mains l'élection des grands prêtres. Sans tenir aucun compte des familles parmi lesquelles les grands prêtres étaient choisis alternativement, ils élevèrent à cette charge des hommes inconnus et de basse origine, pour trouver en eux des complices de leurs impiétés (...) Rassasiés de crimes commis envers les hommes, ils élevèrent leur insolence contre Dieu et portèrent leurs pieds souillés dans le sanctuaire (...) Ceux-ci firent du Temple de Dieu leur citadelle et leur refuge contre les troubles civils ; le Saint des Saints devint l'asile de leur tyrannie. (...) Il y avait là une violation d'une loi solidement établie, et un moyen pour eux d'acquérir de l'autorité en s'attribuant à eux-mêmes le droit de conférer de hautes fonctions. » (Flavius Josèphe, La guerre des Juifs, IV, 3 : 6-7).
« Toute loi humaine était foulée aux pieds par ces scélérats ; ils tournaient en dérision les choses divines et raillaient les oracles des prophètes comme autant de propos de charlatans. Et pourtant ces paroles des prophètes enseignaient bien des choses sur le vice et la vertu ; en agissant à l'encontre, les zélateurs travaillèrent à vérifier les prophéties contre leur propre patrie. Car il y avait une ancienne parole, due à des hommes animés de l'esprit divin, annonçant que la ville serait prise et le Saint des Saints incendié par la loi de la guerre au temps où éclaterait la sédition et où les mains mêmes des citoyens souilleraient le sanctuaire de Dieu ; or les zélateurs, tout en ne croyant pas à cette prédiction travaillaient à son accomplissement » (Ibid, IV, 6 : 3).
« Eléazar, fils de Simon, après avoir tout d'abord séparé du peuple et entraîné dans le Temple les zélateurs - feignant il est vrai, un sentiment d'irritation contre les forfaits quotidiens de Jean, qui n'interrompait point ses meurtres, alors qu'en réalité il ne pouvait supporter d'être soumis à un tyran plus jeune que lui - Eléazar fut poussé à la sécession par l'ambition du pouvoir et le désir de dominer tout lui-même. Il entraîna Judas fils de Chelcias, Simon, fils d'Esron, tous deux notables, et avec eux Ezéchias, fils de Chobaris, qui n'était pas sans réputation. Chacun d'eux était accompagné d'un assez grand nombre de zélateurs ; ils se rendirent maîtres de l'enceinte intérieure du Temple et posèrent leurs armes au-dessus des portes sacrées sur les métopes du Saint des Saints. Pourvus de copieuses ressources, ils prenaient confiance ; car les offrandes sacrées s'offraient à eux en abondance, surtout pour des gens aux yeux desquels il n'y avait rien d'impie ; mais leur petit nombre leur inspirait des craintes : ils restaient donc le plus souvent inactifs là où ils étaient. Quant à Jean, s'il avait la supériorité des effectifs, il occupait une position désavantageuse ; les ennemis, qu'il avait devant lui, garnissaient la hauteur ; ses attaques n'étaient pas sans danger, alors que sa rage lui interdisait l'inaction. Il subissait plus de pertes qu'il n'en infligeait à Eléazar et à sa troupe, et cependant il ne renonçait pas à son dessein. Il y avait donc des combats continuels : sans cesse on lançait des traits ; partout le sanctuaire était souillé de carnage.
Cependant Simon, fils de Gioras, que le peuple, dans une situation désespérée, avait appelé à lui et accepté pour tyran, parce qu'il comptait sur son appui, tenait la ville haute et une grande partie de la ville basse ; il commençait à attaquer avec plus de violence le parti de Jean, qui était lui-même assailli d'en haut car, dans les assauts, il était sous la main de ses adversaires, comme ceux-ci sous celle du parti qui occupait le sommet. Jean, pressé ainsi des deux côtés, subissait et infligeait des pertes avec une égale facilité, et de même qu'il était inférieur aux troupes d'Eléazar, ayant les siennes placées plus bas, la possession d'un terrain élevé lui donnait l'avantage sur Simon. Aussi repoussait-il d'un bras vigoureux les attaques venues d'en bas, tandis que ses machines contenaient l'effort de ceux qui, sur la crête, lançaient leurs javelots du haut du Temple ; il avait, en effet, en assez grand nombre, des oxybèles, des catapultes et des onagres, dont les projectiles non seulement repoussaient les ennemis, mais tuaient beaucoup de gens occupés aux sacrifices. Les Juifs, bien qu'incités par la rage à tous les sacrilèges, n'en laissaient pas moins entrer ceux qui voulaient sacrifier - leurs concitoyens, avec défiance et en les observant, les étrangers, en les fouillant. Ceux-ci, même après avoir apaisé la cruauté des factieux pour obtenir l'entrée, devenaient souvent les victimes accidentelles de la sédition. En effet, les traits des machines, lancés avec toute leur force jusqu'à l'autel et au Temple, atteignaient les prêtres et ceux qui offraient des sacrifices. Beaucoup de ceux qui, venus des extrémités de la terre, s'empressaient autour de ce lieu sacré, si révéré de tous les hommes, tombaient eux-mêmes devant les victimes et arrosaient de leur sang l'autel vénéré de tous les Grecs et des Barbares. Les corps des habitants du pays et des étrangers, des prêtres et des laïcs gisaient confondus ; le sang de ces divers cadavres formait des mares dans les enceintes sacrées. Quel traitement aussi affreux, ô la plus infortunée des villes, as-tu subi de la part des Romains qui entrèrent pour purifier par le feu les souillures de la nation ? Car tu n'étais plus, et tu ne pouvais rester le séjour de Dieu, puisque tu étais devenue la sépulture des cadavres de tes citoyens et que tu avais fait du Temple le charnier d'une guerre civile » (Ibid, V, 1 : 2-3).
« Jean alla jusqu'à employer, pour la construction de machines de guerre, du bois réservé au culte. Car comme le peuple et les grands prêtres avaient décidé naguère d'étayer le Temple pour l'exhausser de vingt coudées, le roi Agrippa fit transporter du Liban, à grands frais et au prix de grands efforts, le bois nécessaire : ces poutres méritaient d'être vues pour leur rectitude et leur volume. La guerre interrompit ce travail : Jean fit équarrir ces poutres et les employa à élever des tours, ayant observé que leur longueur était suffisante pour atteindre ses adversaires au sommet du Temple » (Ibid, V, 1 : 5).
« Aux approches du jour des azymes, le quatorze du mois de Xanthicos [mars-avril], à cette date où les Juifs passent pour avoir commencé à secouer le joug des Égyptiens, les partisans d'Eléazar ouvrirent en partie les portes du Temple et y reçurent ceux des citoyens qui voulaient y entrer pour adorer Dieu. Jean, profitant de la fête pour dissimuler sa ruse, munit d'armes, qu'il leur fit cacher, ses compagnons les moins connus, non purifiés pour la plupart, et se hâta de les envoyer au Temple pour s'en emparer par surprise. A peine dans l'enceinte, ils se débarrassèrent de leurs vêtements et parurent soudain complètement armés. Aussitôt s’éleva dans le Temple un grand trouble, un grand tumulte : les gens du peuple, sans lien avec la sédition, crurent que l'attaque était dirigée contre tous indistinctement, tandis que les zélateurs se croyaient seuls menacés. Ceux-ci, abandonnant désormais la garde des postes, s'élancèrent du haut des créneaux avant qu'on en vînt aux mains et cherchèrent un refuge dans les souterrains du Temple. Quant aux citoyens, tremblant près de l'autel et se pressant confusément dans l'enceinte, ils étaient foulés aux pieds, frappés sans relâche à coups de bâton et d'épée. Beaucoup de Juifs paisibles, victimes d'inimitiés et de haines privées, furent tués par leurs ennemis, comme s'ils étaient de la faction contraire ; tous ceux qui avaient autrefois offensé quelqu'un des conjurés et qu'on reconnaissait à ce moment, se voyaient entraîner comme zélateurs au supplice. Mais tandis qu'on infligeait tant de cruels traitements aux innocents, on accorda une trêve aux coupables et on laissa partir ceux qui sortirent des souterrains. Maîtres de la partie intérieure du Temple et de tout l'appareil sacré, les conjurés commencèrent à s'enhardir contre Simon » (Ibid, V, 3 : 1).
« Dès que les dépouilles du peuple manquèrent à Jean [de Gischala], il recourut au pillage sacrilège des objets sacrés, fit fondre un grand nombre d'offrandes du Temple et d'ustensiles nécessaires au culte, vases, plats, tables ; il n'épargna pas même les cratères envoyés par Auguste et son épouse. Car les souverains de Rome avaient les uns après les autres honoré et orné le Temple mais, à ce moment, c'était un Juif qui détruisait les offrandes des étrangers. Jean disait aussi à ses compagnons qu'on pouvait sans scrupule tirer parti des choses divines dans l'intérêt de Dieu, et que ceux qui défendaient le Temple pouvaient s'en nourrir. C'est ainsi qu'il épuisa le vin sacré et l'huile que les prêtres gardaient en réserve, dans le Temple intérieur, pour les holocaustes ; il les distribuait à la multitude qui le suivait, et ceux-ci se frottaient d'huile et buvaient le vin sans la moindre peur » (Ibid, V, 13 : 6).
« Les révoltés proférèrent un torrent d'injures contre les transfuges et établirent au-dessus des portes sacrées leurs oxybèles, leurs catapultes et leurs onagres, en sorte que tout le pourtour du Temple, sous l'amoncellement des cadavres, ressemblait à un cimetière et le Temple même à une citadelle. Ils s'élançaient tout armés dans l’enceinte sacrée et inaccessible aux profanes, les mains encore chaudes du meurtre de leurs compatriotes ; ils poussèrent à un tel point la scélératesse que l'indignation qui eût dû être justement ressentie par les Juifs, si les Romains avaient exercé contre eux de pareilles violences, était alors inspirée aux Romains par les Juifs, coupables de sacrilèges contre leur propre culte » (Ibid, VI, 2 : 3).
Les rabbins partagent-ils l'opinion de F. Josèphe ? Comment sont considérés aujourd'hui les séditieux de l'époque ? La loi générale selon laquelle seuls les peuples païens étaient figurés par des monstres hideux (voir livre de Daniel) a-t-elle modifié dans l'un ou l'autre écrit juif pour qualifier les révolutionnaires ? Même question en ce qui concerne la mer (Yam) par opposition à la terre (Eretz). Existe-t-il dans le Talmud ou ailleurs un texte qualifiant de bête cruelle les séditieux ?
Merci par avance.