Ainsi que je l’ai expliqué en réponse à une autre question, il est écrit que la femme de Lot « regarda derrière lui et elle devint un bloc de sel » (Berèchith 19, 26). Pourquoi « derrière lui » et non pas « derrière elle », comme le voudrait la cohérence du texte ?
Rachi, dans son commentaire de ce verset, explique que le mot mè-a‘haraw (« derrière lui ») signifie : « derrière Lot ».
Pour comprendre ce Rachi, apparemment insolite, il convient de se reporter à ce qu’il a écrit à propos de la querelle ayant opposé Qora‘h à Moïse.
Dans son commentaire de Bamidbar 16, 7, il se pose la question : Se peut-il que Qora‘h et sa coterie aient été assez insensés pour oser faire une offrande après avoir été ainsi avertis ? Et il répond : C’est sa vision [de l’avenir] qui l’a induit en erreur : Il a vu dans sa descendance une noble lignée, dont le prophète Samuel, présenté comme valant à lui seul Moïse et Aaron réunis (voir Tehilim 99, 6 et Berakhoth 31b), et il s’est dit que, par le mérite de cette descendance, il allait être sauvé.
Il en a été de même pour la femme de Lot : Elle a « regardé » et, le mot mè-a‘haraw pouvant signifier tout autant « après lui » que « derrière lui », a compté sur ce qui allait venir « après Lot », à savoir sa noble lignée, celle qui ira de Ruth au Messie en passant par la dynastie royale de David. Elle se persuada que, puisque son mari allait engendrer de telles personnalités, elle pouvait agir à sa guise et être sauvée grâce à leur mérite.
Il est vrai que, selon une autre tradition, la femme de Lot a été punie à cause du sel qu’elle a refusé de mettre sur la table. Plus exactement, selon le Midrach (Berèchith rabba 51, 5), elle est allée en demander à ses voisines en leur disant qu’il lui fallait du sel parce qu’elle avait des invités, espérant ainsi qu’elles les feraient dénoncer.
Cette glose midrachique n’ exclut cependant pas les autres, dès lors qu’elles apportent toutes un enseignement.