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Lecture critique de la Torah.

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RHY
Messages: 140
Bonjour;

Je viens de lire que la ville d'Ur, à l'époque d'Avraham et de Moché, était sumérienne - et non chaldéenne.

Comment comprendre ?

Peut-être pourriez-vous m'expliquer s'il vous plaît comment certains anachronismes apparaissent dans le texte de la Torah, comme le remarque déjà le Ibn Ezra (Béréchit 12;6 et Dévarim 1;2 de mémoire) ?

La Kénesset Haguedola a sélectionné et compilé certains livres du Na'h (Baba Batra 15a). S'est-elle limitée strictement à ces livres et à ces activités, ou pourrions-nous croire qu'elle a également touché à d'autres livres, en modifiant également quelque peu le contenu, après le retour de l'exil de Babylone et les métamorphoses qu'elle a entrainées ?

C'est une problématique très intrigante et alambiquée, pour qui veut rester fidèle à la Emounat 'Ha'hamim; je ne doute pas que vous pourriez m'aider.


Peut-être puis-je vous demander, en complément, une indication de lecture: connaissez-vous un bon livre, sérieux et argumenté, qui explique le façonnement de la Torah Ecrite et de la Torah Orale, ainsi que l'articulation entre les deux, notamment d'un point de vue historique - j'ai en effet un mal fou à trouver dans le (Ta)na'h une matrice au Judaïsme sous sa forme traditionnelle rabbinique.
Où est la primauté de l'étude ? Où sont nos valeurs ? Et nos Tsadikim ? Ils ont plutôt l'allure de héros virils, avec une épée à la main et des femmes dans la tête !

Merci par avance, votre travail est plus que digne de louanges.

Avec tout mon respect et ma sympathie.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6640
Citation:
Je viens de lire que la ville d'Ur, à l'époque d'Avraham et de Moché, était sumérienne - et non chaldéenne.
Comment comprendre ?
Peut-être pourriez-vous m'expliquer s'il vous plaît comment certains anachronismes apparaissent dans le texte de la Torah, comme le remarque déjà le Ibn Ezra (Béréchit 12;6 et Dévarim 1;2 de mémoire) ?
La Kénesset Haguedola a sélectionné et compilé certains livres du Na'h (Baba Batra 15a). S'est-elle limitée strictement à ces livres et à ces activités, ou pourrions-nous croire qu'elle a également touché à d'autres livres, en modifiant également quelque peu le contenu, après le retour de l'exil de Babylone et les métamorphoses qu'elle a entrainées ?
C'est une problématique très intrigante et alambiquée, pour qui veut rester fidèle à la Emounat 'Ha'hamim; je ne doute pas que vous pourriez m'aider.
Peut-être puis-je vous demander, en complément, une indication de lecture: connaissez-vous un bon livre, sérieux et argumenté, qui explique le façonnement de la Torah Ecrite et de la Torah Orale, ainsi que l'articulation entre les deux, notamment d'un point de vue historique - j'ai en effet un mal fou à trouver dans le (Ta)na'h une matrice au Judaïsme sous sa forme traditionnelle rabbinique.
Où est la primauté de l'étude ? Où sont nos valeurs ? Et nos Tsadikim ? Ils ont plutôt l'allure de héros virils, avec une épée à la main et des femmes dans la tête !


Vous posez trop de questions pour un seul post.
Essayons tout de même de répondre.

Je vous cite :
Citation:
Je viens de lire que la ville d'Ur, à l'époque d'Avraham et de Moché, était sumérienne - et non chaldéenne.


Je crois que vous avez lu ça au nom du professeur Römer dont il a déjà été question ici :
https://www.techouvot.com/karan_or_panav-vt8028219.html

Ce « grand professeur » ne doit pas savoir lire l’hébreu, sans quoi il aurait pu lire les commentateurs classiques, comme le Radak qui indique, sur place (Bereshit XI,28), que l’appellation Our-Kasdim ne date pas de l’époque d’Avraham (mais de Moïse), car le nom de la ville ne signifie pas « Our en Chaldée », mais « Our des enfants de Kessed », du nom de son fondateur qui devait donc être un fils de Kessed [lui-même fils de Na’hor et donc neveu d’Avraham (cf. Bereshit XXII, 22)].

Si nous avions déjà constaté que ce prof. Römer n’excellait pas en hébreu (cf. lien plus haut), et qu’il ne se soit pas donné la peine de vérifier les commentateurs classiques de la Bible avant d’émettre ses théories, je suis tout de même étonné qu’il n’ait pas lu le Sefer Hayovlim (XI, 3) [alias Livres des Jubilés, qui fait partie des textes non canonisés par les juifs (mais l’est par certaines églises) et qui est traduit dans toutes les langues européennes et même plus], où il est explicite ( !) que la ville porte ce nom en référence à Kessed comme l’écrit le Radak (à la différence, que d’après le Radak « Our » signifie une vallée, alors que selon le Sefer Hayovlim, « Our » est le prénom du fils de Kessed en question, qui l’a nommée Our-Kasdim à son nom et celui de son père -car tous les enfants de Kessed s’appelaient « les Kasdim »).

Voici le verset :
ויבן אור בן כשד את אור כשדים ויקרא את שמה בשמו ובשם אביו

Voilà qui est bien déplorable pour un professeur chrétien, bibliste, philologue et exégète et qui occupe la chaire « Milieux bibliques » du Collège de France…
Ah elle est belle la France !

Bref, il ne faut pas s’inquiéter outre-mesure quand vous lisez une affirmation péremptoire de la part d’un professeur de Bible, quand bien même serait-il hautement distingué parmi les Amei Haarets et autres incultes, ça n’a que peu de valeur.

Je crois que s’ils connaissaient les champions de la Bible (dont je ne fais PAS partie) qui existent parmi les juifs pratiquants, ils cacheraient soigneusement leurs professeurs pour éviter les humiliations.

Il y avait aussi chez les chrétiens (surtout chez les protestants, forcément) de grands spécialistes de la Bible, qui avaient étudié les commentateurs classiques et qui avaient une très bonne connaissance de la langue hébraïque.
Je ne sais pas s’il y en a aujourd’hui du même calibre mais si oui, ils se font discrets face à tous les « grands professeurs ».

Même chez les catholiques nous trouvions encore de vrais spécialistes du judaïsme il n’y a pas si longtemps. Comme A. Vincent, Maître de conférences à la Faculté de Théologie Catholique de l’Université de Strasbourg, qui a publié en 1932 (chez Bloud & Gay) un très bon ouvrage « Le Judaïsme ».
Cet auteur était fort bien informé, bien que son œuvre ne soit pas exemptes d’erreurs -loin s’en faut.
A part les fautes de frappe/orthographe (plus d’une vingtaine !), il contient des dizaines (peut-être même une cinquantaine) d’erreurs, dont certaines sont grotesques.
Mais globalement, l’auteur fait tout de même preuve de connaissances assez précises.

Je cite :
Citation:
Peut-être pourriez-vous m'expliquer s'il vous plaît comment certains anachronismes apparaissent dans le texte de la Torah, comme le remarque déjà le Ibn Ezra ( Béréchit 12;6 et Dévarim 1;2 de mémoire ) ?

Le Ibn Ezra considère qu’il y a de petits ajouts tardifs dans la Torah, il semble penser que les douze derniers versets de la Torah ne sont pas de Moïse mais de Josué.
Nous trouvons dans le Talmud (Baba Batra 15a) une discussion sur les huit derniers versets de la Torah qui, d’après R. Yehouda (ou R. Ne’hémia), ont en effet été ajoutés par Josué après la mort de Moïse.
L’idée déplait à R. Shimon pour qui chaque lettre de la Torah a été écrite par Moïse.

Il semblerait que le Rambam ait retenu l’opinion de R. Shimon, car il écrit (dans sa préface au Mishné Torah) que Moshé a écrit TOUTE la Torah avant son décès et avec sa main.

Ce qu’il écrit dans Hilkhot Tshouva (III, 8) est moins contraignant, il écrit :
שלשה הן הכופרים בתורה האומר שאין התורה מעם ה' אפילו פסוק אחד אפילו תיבה אחת אם אמר משה אמרו מפי עצמו הרי זה כופר בתורה
Il n’y est pas dit que Moshé est l’auteur de chaque lettre, mais que chaque lettre a été écrite par prophétie dictée par D.ieu et celui qui dirait que Moïse aurait écrit une lettre (enfin, il parle de « mot ») de lui-même serait un Kofer, mais dire que Yehoshoua ait écrit quelques lettres/mots/versets dictés par la prophétie reste possible.

Par contre dans la Hakdama du Mishné Torah il semble suivre l’avis de R. Shimon et écrit :
כל התורה כתבה משה רבנו קודם שימות בכתב ידו ונתן ספר לכל שבט ושבט

A ce stade, nous pourrions dire que le Rambam aurait retenu l’opinion de R. Shimon alors que le Ibn Ezra opterait pour celle de R. Yehouda.

Cependant des questions subsistent :
-comment le Rambam condamne (dès lors) R. Yehouda ?
-pourquoi la Gmara ne souligne pas son hérésie comme pour R. Hillel (sanhed. 98b) ?
-comment le Rambam va répondre aux arguments du Ibn Ezra ?
-comment le Rambam recommande chaudement le commentaire du Ibn Ezra à son fils alors qu’il professe et profère des hérésies selon lui ?

J’en ai parlé -il y a quelques années- avec le Rav Moshé Tsuriel-Weiss, il m’avait dit que le Rambam pensait en effet que chaque lettre est de Moshé, comme l’opinion de R. Shimon, mais il ne considère Apikoros que celui qui penserait qu’un mot (ou plus) de la Torah serait personnel et non dicté par la prophétie.

Dans la mesure ou Rabbi Yehouda/Ne’hémia et le Ibn Ezra sont d’accord que chaque ajout dans la Torah l’a été par prophétie, le Rambam ne les considère pas hérétiques, quand bien même il ne partage pas leur avis.

La définition du Rambam est calquée sur les mots de la Gmara (Sanhedrin 99a)
האומר אין תורה מן השמים ואפילו אמר כל התורה כולה מן השמים חוץ מפסוק זה שלא אמרו הקדוש ברוך הוא אלא משה מפי עצמו

Je cite :

Citation:
Peut-être puis-je vous demander, en complément, une indication de lecture: connaissez-vous un bon livre, sérieux et argumenté, qui explique le façonnement de la Torah Ecrite et de la Torah Orale, ainsi que l'articulation entre les deux, notamment d'un point de vue historique - j'ai en effet un mal fou à trouver dans le (Ta)na'h une matrice au Judaïsme sous sa forme traditionnelle rabbinique. Où est la primauté de l'étude ? Où sont nos valeurs ? Et nos Tsadikim ? Ils ont plutôt l'allure de héros virils, avec une épée à la main et des femmes dans la tête !

Nos Tsadikim « des héros virils avec une épée à la main et des femmes dans la tête » ?! Vous exagérez.
Vous vouliez peut-être poser votre question sur David ou Shimshon, mais pas sur l’ensemble des Tsadikim de la Torah.

Voyez Avraham, Its’hak, Yaakov, Moshé, Aharon… sont-ils dépeints comme « des héros virils avec des femmes dans la tête » ?

Pour David, vous devez savoir ce que la Gmara en dit dans Shabbat (56a) כל האומר דוד חטא אינו אלא טועה ce qui n’indique pas qu’il n’ait pas fauté, mais seulement qu’il ne s’agit pas de la faute telle qu’elle est décrite dans les psoukim (car elle était divorcée etc.).
Il y a eu faute, mais pas Eshet Ish.
Quoi qu’il en soit, en effet, il y a eu faute et ce n’est pas un épisode glorieux pour David qui va s’en repentir toute sa vie.

Pour Shimshon et Shlomo, il faut d’une part savoir que ça leur a été reproché par les ‘Hazal et d’autre part comprendre que leurs écarts ne sont pas exactement ceux que l’on pourrait croire non plus, voyez Rambam (Issourei Bia XIII, 16).

Donc même s’il y a eu des erreurs de leur part, c’est souligné par honnêteté et afin de critiquer ce penchant (et non de le glorifier).

Le héros biblique/ Tsadik n’est pas celui qui n’aurait jamais fauté, mais celui qui -s’il a fauté, sait s’en repentir et se racheter.
La Bible n’a pas pour vocation de nous mentir en dépeignant des héros invincibles et infaillibles, au contraire, Shéva Yipol Tsadik vekam (Mishlé XXIV, 16) ! Le Tsadik arrivera à se reprendre et faire tshouva sincèrement même s’il a trébuché sept fois.
L’erreur est humaine, un moment de faiblesse peut arriver à tout le monde, le Tsadik est celui qui ne s’y complait pas et cherche toujours à se parfaire, afin de se rapprocher encore plus de D.ieu.
Ou selon l’expression de Rav Chajkin : « Tomber dans la boue, c’est normal. Rester dans la boue, c’est animal » (Pour la gloire de Hachem p.337).
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