Je cite les éléments de la question par petites citations –et pas nécessairement dans l’ordre- afin de tenter d’ordonner et de segmenter un peu ma réponse :
Citation:
- est ce que je suis astreint/obliger de suivre le choulhan arouh ? Bien sur je parle dans le cas ou g un autre possek sur qui etre some'h mais qui va a lencontre du mehaber.
- qd ya une mahloket ds la guemara comme par exemple beth shamai et beth hillel, et on dit que la halaha va comme beth hillel, est ce que beth shamai va ecouter beth hillel bien qu'il pense quil a tord ?
Concernant
Beth Shamay, nous voyons dans le
Talmud qu’ils suivaient leur propre opinion
(mishna Yevamot 13b) tant que la ala’ha n’avait pas été tranchée comme
Beth Hillel.
Une fois que la ala’ha est tranchée par le grand sanhedrin, il est interdit au ‘ha’ham opposant d’indiquer la conduite à suivre comme il le faisait par le passé, néanmoins il lui est toujours autorisé de « penser » ce qu’il pense ; il peut même enseigner ce qu’il pense pourvu qu’il précise que ce n’est pas la ala’ha. (cf.
Sanhedrin 86b et 88b)
Selon le
Rambam (Mamrim II, 1), si les Sages d’une génération ont décidé d’une ala’ha (-pas d’une gzeira) d’une certaine manière et les Sages d’une génération suivante trouvent une objection à ce Psak, ils peuvent s’y opposer même s’ils ne les égalent pas « be’ho’hma oubeminian ».
Mais nous parlons de s’opposer à un psak même lorsqu’il est validé par les Sages contemporains –pas d’une génération à l’autre, si c’est à l’époque du grand Sanhedrin, c’est la loi du Zaken Mamré.
Il est cependant licite de penser ce que l’on pense (tant qu’on peut prétendre au titre de ‘ha’ham –sans quoi, il a lieu de craindre le ridicule), ce qui est interdit c’est de créer du désordre au niveau de la pratique, pour laquelle il faudra se plier à l’opinion élue par le grand sanhedrin, sous peine d’être taxé du titre de Zaken Mamré.
Nous concernant, lorsqu’il s’agît de s’appuyer sur un possek qui diverge du psak du
Shoul’han Arou’h, il ne peut y avoir d’interdit lié au grand sanhedrin puisque/si le possek en question ne s’oppose pas au grand sanhedrin.
Celui qui suivra un autre Possek que le
SA ne saurait donc être accusé de l’interdit du Zaken Mamré, néanmoins il pourrait toujours être critiquable au titre d’inconscient ou de négligeant.
Au-delà de ceci, il risque aussi de se détacher de la communauté, ce qui n’est pas bon non plus.
Bien sûr tout dépendra de chaque cas (certains détails ne sauraient détacher de la communauté)
Voir aussi :
http://www.techouvot.com/produire_un_hidoush-vt14877.html?highlight=
Par conséquent, lorsqu’on parle de suivre un autre possek que le
SA, il convient de distinguer entre un possek antérieur ou ultérieur au
SA ;
s’il s’agît d’un ancien qui n’a pas été retenu au niveau de la pratique, il y a de fortes chances pour que suivre son opinion contribue à nous éloigner de la communauté [et il est même certaines fois possible de commettre par là un écart plus grave encore que le « simple » fait de se détacher de la communauté].
Par contre, s’il s’agît d’un possek plus récent, il est très fréquent qu’il soit au contraire précisément suivi par la communauté.
En effet, il est une erreur qu’il est nécessaire de souligner :
Lorsque nous disons que nous suivons le
Shoul’han Arou’h au niveau ala’ha, ça ne veut pas dire que nous suivons les décisions du
rav Yossef Karo, mais cela signifie que nous suivons les décisions du « livre Shoul’han arou’h » AVEC tous ses commentateurs.
Si vous ouvrez un
SA, vous constaterez qu’il n’y a que très peu de texte du
rav Karo sur chaque page, la grande majorité du texte est composé de commentaires de rabbins ultérieurs qui ont ajouté leur grain de sel et leur vision de la souguia.
Ce qui fait que très fréquemment ces commentaires ne sont pas de simples gloses, mais des opinions différentes de celle du texte central –celui du
rav Karo.
Lorsqu’on parle de suivre le
SA, il s’agît du livre -pas du rav.
On suit donc les «
nossei kelim » (commentateurs du
SA) et non l’opinion du
SA.
Chaque communauté a ses habitudes concernant le choix du possek à suivre en finale, mais de nos jours
AUCUNE COMMUNAUTE AU MONDE NE SUIT LE RAV YOSSEF KARO A 100%
Même le
rav Ovadia Yossef (zatsal) et ses fils qui disent ne suivre que le
rav Karo et lui donner systématiquement la préférence, ne le font pas réellement.
Une comparaison systématique de leurs psakim et de ceux du
rav Karo montrera de multiples divergences.
Citation:
- est ce que je peux etudier une sougia et en tirer des maskanot pr en faire "MA" halaha. ( פוסק לעצמי )
Je suppose qu’il est inutile de vous préciser que cette question ne peut assurément pas se poser concernant une personne dont le niveau en étude du
Talmud laisse à désirer.
Je le précise tout de même (pour d’autres lecteurs) car j’ai déjà entendu des personnes soutenir que chacun pouvait se permettre de se fixer sa propre ala’ha.
Il est évident que si l’on n’a pas –au moins- étudié une fois la massé’het et les souguiot concernées, la volonté de se fixer sa propre ala’ha ne peut être mue que par un orgueil démesuré qui frise le ridicule ou par une déplorable déficience cérébrale qui inspire la pitié.
Il me semble tout aussi logique que l’on ne pourra pas se contenter d’une étude des souguiot officiellement liées au sujet, mais qu’il est impératif d’avoir survolé l’ensemble du
Talmud [comme le dit le
Talmud Yeroushalmi (rosh ashana 17a) Divrei Thora aniim bimkoman veashirim bemakom a’her] et d’avoir étudié convenablement les règles de psika.
Nous parlerons donc d’une personne qui a survolé l’ensemble du
Talmud, étudié les règles de psika et approfondi les souguiot liées au sujet sur lequel son opinion diverge de celle du
SA.
Là, il convient de distinguer trois cas :
a) Son psak correspond à celui d’autres poskim A’haronim : il peut s’y conformer, même si ce n’est pas ce qui est généralement appliqué par la communauté (-dans la mesure où ceci ne le détachera pas conséquemment de la communauté) et qu’il contredit le
SA.
b) Son psak correspond seulement à celui de certains Rishonim (qu’aucun A’haron ne retient) : il est fort peu probable que se conformer à son psak ne l’éloigne pas de la communauté.
c) Son psak ne correspond au psak d’aucuns de ses prédécesseurs : Il est quasi certain qu’il a manqué une connaissance ou une étape du raisonnement et ferait mieux d’aller étudier un peu de moussar avant de vouloir jouer au possek, s’il n’excelle pas en
Talmud, peut-être réussira-t-il à percer en moussar ?
Si nous parlons de quelqu’un qui a bien étudié (pas seulement survolé) son
Talmud et qui a fait ce que l’on appelle du « shimoush »(il devrait savoir de lui-même quelles sont ses limites lorsqu’il n’est pas d’accord avec une conclusion du
SA, mais) en principe il est à même de décider de sa propre ala’ha à 100%.
Ainsi, même s’il y a de grandes chances que le
Rav Karo s’y connaissait mieux en Talmud que tout possek du XXIème siècle, il y a un « plus » à se fixer sa propre ala’ha (lorsqu’on en a le niveau).
Voir ce qu’écrit à ce sujet le
Maaral dans
Netiv Athora (fin de perek XV) et voir aussi :
http://techouvot.com/ben_adam_lehavero_et_la_nouvelle_religion_alaha-vt16913.html?highlight=
En effet, le
Rav Karo ainsi que les autres poskim étaient des hommes qui ont étudié la totalité du
Talmud et sont arrivés à des conclusions ala’hiques, un véritable possek devrait donc être en mesure d’être en désaccord avec le
SA, de pouvoir le contredire au point « d’effacer » un séif écrit par le
Rav Karo, s’il est certain de sa lecture de la souguia.
Sans cela, on ne peut parler que de « moré oraa » ; d’indicateur de ala’ha, mais pas de « possek ».
Bien sûr, avant d’effacer un séif du
SA, il faut « se lever tôt ».
Et surtout, il ne faut pas s’imaginer que quiconque se proclamant en désaccord avec le
SA, se hisse par là au niveau de « possek » et se voit couronné du titre de « décisionnaire ».
Au contraire, généralement il se hisse au niveau de Baal gaava et est couronné du titre d’imbécile.
Citation:
- ma question porte aussi sur la mahchava, une facon de penser qui na aucune nafka mina sur la alaha lemaasse
Par exemple:
Contrairement a presque ts les posskim le rambam pense que le kichouf nest que illusion et cest les faibles desprit qui y croient etc... Hilhot Avodat cohavim 11,17
Est ce que du fait que c un daat yahid alors il est mevatel ?
Concernant le kishouf (la magie), l’exemple est mauvais, vous décrétez que le
Rambam est solitaire (daat ya’hid) lorsqu’il n’accorde pas foi à la magie, cependant, il n’était absolument pas le seul !
Voici par exemple une quinzaine d’auteurs allant dans son sens:
-Le
Shoul’han Arou’h Y’’D §179, 6 (qui cite le
Rambam sans le nommer –cf.
Beer Agola 12)
-Le Ibn Ezra Vayikra XIX, 4 , 31 et shemot XVII, 11
-Rabbi Yedaya Apnini Bédiersi (de Béziers)(alias le Be’hinat Olam) dans sa lettre au Rashba (shout Arashba I, §418)
-Méiri sanhedrin 101a.
-Ikarim (Albo) III, 10
-Menorat Amaor (‘hatimat ner rishon et d’autres endroits)
-Mekor ‘haim (commentaire sur le Ibn Ezra) sur kedoshim daf 76a (éd.
Mantoue 1559)
-Kouzari IV, §23
-Or A’haim shemot XVII, 21
-Yashar Micandia, sefer Ilem p.23 et pages 118-119 (éd. de 1864)
-Le ‘Hinou’h parshat kedoshim mitsva 249 (mitsva « shelo lena’hesh ») et mitsva 250 et 511.
-Abrabanel Shemot XXII, 17
-Tseida ladere’h maamar II klal 4
-Pri Megadim, Rosh Yossef, ‘houlin 105
-R. Shimshon Rephael Hirsch sur Shemot XXII, 7 et VII, 11. Voir aussi sur Vayikra XIX, 31
-Radak (et r. Shmouel ‘Hofni Gaon) (I Samuel, §28) sur la baalat Ov (et c’est lié par la même logique car ceux qui insistent pour accorder de la foi aux pouvoirs de la magie se justifient en disant que si la Thora l’interdit c’est que « ça marche »… Ce à quoi rétorquent les autres que la Thora interdit précisément de croire à de telles balivernes).
-R. Be’hayei Dvarim XVIII, 10
-Ralbag (I Samuel XXVIII, 7)
Enfin, il y en a encore d’autres, mais dire que le
Rambam est daat ya’hid sur le sujet n’est pas vrai du tout.
Quant à la question elle-même, en matière de « pensée », de Ashkafa, il n’y a pas vraiment de « Ala’ha ». (comme l’écrivent de très nombreux auteurs, par exp.
Piroush amishna du Rambam sanhedrin X, 3)
Parlons déjà d’une ashkafa qui ne porte absolument pas à conséquence, même au niveau des croyances, c’est plus fréquent dans l’explication et l’interprétation d’un texte agadique –par exemple.
Il n’y a pas d’obligation de se conformer à l’interprétation d’un rishon –voire d’un Tana ou Amora lorsqu’il explique un passouk d’une certaine manière, tant que cela n’entraine rien au niveau ala’ha.
En effet l’interdit d’être en désaccord avec le
Talmud ne porte que sur la partie Ala’hique, voyez le
Or a’haim (pti’ha 3) et le Tosfot Yom Tov (Nazir V,5), [-le
Kessef Mishné (mamrim début de perek 2) porte sur la partie Ala’ha] et beaucoup d’autres encore, desquels il ressort qu’il est licite d’être en désaccord avec un Rishon sur un sujet de Agada, même avec des Sages du
Talmud !
Certes ce n’est pas souhaitable, mais si l’on a une autre lecture d’un texte agadique QUI NE PORTE PAS A CONSEQUENCE AU NIVEAU ALA’HA, il est juste de penser ce que l’on pense et l’on ne saurait être taxé d’hérésie pour autant.
Concernant la Ashkafa (qui pourrait ressortir aussi d’une agada), en dehors de ce qui touche aux principes de la foi exprimés par
Maimonide, nous ne trouvons pas d’interdit de se distinguer au niveau des croyances.
Et même l’obligation de se conformer à la totalité des fameux articles de foi de
Maimonide est très controversée.
Si le
Rambam retient 13 principes, d’autres n’en retiennent que 3
[le Rashbats dans Ohev mishpat, le Albo dans sefer aïkarim et le Maarsha fin de rosh ashana et Psa’him 108] ou encore 6
[R.H. Crescas], alors que d'autres considèrent que le concept même de « ikarim » de la religion est faux
[Radbaz §344 et 1413, Abrabanel Rosh Amana §23, ‘Hatam Sofer fin de shout Y’’D §256 et d’autres pour qui chaque élément de la Torah est capital (et pas seulement 13 points)].
En tout cas, pour ce qui ne concerne pas les articles de foi, malgré que la lecture que l’on en aura portera à conséquence au niveau des croyances /Ashkafot, il est licite de se faire sa propre opinion, même si elle est contraire à celle d’Anciens.
Là aussi, celui qui ne serait pas encore acquitté de son devoir de survoler au moins une fois les textes de base ne devrait pas tirer de conclusions hâtives de son peu de lecture, il est probable qu’il trouve des contradictions à ses idées dans ses lectures futures.
Mais pour le cas qui nous occupe, il est tout à fait permis de penser comme le
Rambam concernant la magie, même si on n’a pas encore terminé son
Talmud et Midrashim (étant donné que le
Rambam s’en est acquitté).
Voilà, j’ai tout de même le sentiment de ne pas avoir été parfaitement clair car j’écris sans yishouv adaat et je n’arrive pas à me concentrer, mais comme j’ai beaucoup de retard sur
Techouvot et que tout le monde me presse de reprendre un peu l’écriture, je ne peux pas attendre d’avoir la tête claire et d’être vraiment disponible pour écrire quelques réponses.
Pour accentuer le tout, je ne me relis pas, veuillez m’en excuser.