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Avelout chez un goy

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MrQuestion
Messages: 162
Bonjour Rav Wattenberg,

Question insolite:

Est-ce que la notion de avéloute sur le décès des parents lo alénou, existe aussi pour un goy ? Ou bien ce n’est pas dans ses chéva mitsvot et ça ne sert à rien ?

Merci pour votre réponse.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6640
Citation:
Est-ce que la notion de avéloute sur le décès des parents lo alénou, existe aussi pour un goy ? Ou bien ce n’est pas dans ses chéva mitsvot et ça ne sert à rien ?


Voyez à ce sujet le Midrash Routh Raba (II, 13) et Radal (ad loc §31).
Ce Midrash raconte que Rabbi Méir avait un ami non juif, nommé Avnimus (Hagardi).
Lorsque sa mère décéda, R. Méir alla le visiter pour le consoler et le trouva, lui et sa famille, assis comme des endeuillés.
Plus tard, lorsque son père décéda, là encore R. Méir alla faire Ni’houm Aveilim, mais il trouva la famille affairée et occupée à son travail.
Il fit remarquer à Avnimus qu’il semble qu’il fut moins attaché à son père qu’à sa mère (puisqu’il ne porte pas le deuil pour ce dernier). Et Avnimus lui répondit par le verset du Ruth (I, 8) « Shovna Isha Lebeit Ima », où il n’est pas dit « Lebeit Avia » (Naomi dit à ses brus de retourner chacune chez sa mère -et non chez son père), indiquant donc -du moins chez les non-juifs- une plus grande proximité avec la mère.

Le Radal sur place (§31) écrit qu’il semble de ce texte du Midrash qu’un non-juif doive porter le deuil sur sa mère (mais pas nécessairement sur son père).

Peut-être que l’on peut faire une distinction avec l’époque où la pritsout faisait que le non-juif n’avait pas vraiment de preuve que son père officiel était bien son père, la notion de « mariage » telle que répandue aujourd’hui en Occident venant plutôt du christianisme (qui s’est inspiré du judaïsme) n’existait pas encore dans les esprits, les non-juifs considéraient le mariage autrement et la fidélité n’était absolument pas au RDV.

Alors que de nos jours, bien que (dans certains pays) les infidélités soient répandues, la situation n’est pas comparable avec celle dont nous parlons, il y a 19 siècles. A notre époque, un non-juif (vivant dans un cadre familial normal) devrait donc aussi porter le deuil sur son père.

[Bien que la Gmara Yevamot (98a) dise que la règle stipulant que « אין אב לגוי » ne soit pas dépendante du doute que pourrait avoir le non-juif sur l’identité de son père, et que même dans un cas où la filiation ne souffre d’aucun doute, la règle s’appliquera malgré tout et il n’y aura pas de lien de parenté du point de vue halakhique.
Néanmoins, cette règle dépend d’une réalité liée à la Hefkérout générale (de l’époque), qui fait que même dans le cas où c’est bien son fils, le lien affectif n’était pas le même.
C’est pourquoi je pense qu’il y a -de nos jours- un sens « halakhique » à un non-juif qui voudrait porter le deuil sur son père.
Cette idée ne sera probablement pas partagée par tous, car ma lecture se base sur d’autres considérations qui impliquent une certaine compréhension de ce que disent ‘Hazal par « אפקריה רחמנא לזרעיה », mais comme il n’y a pas d’enjeu Halakhique (puisqu’un non-juif portant le deuil sur son père ne constituerait aucunement une infraction halakhique), je ne m’attarde pas sur ce point.
Le Goy qui ne me croit pas n’est pas tenu de penser qu’il a le droit de porter le deuil sur son père 😊.]

De plus, il se pourrait que la déduction d’Avnimus ne soit fondée que pour les femmes et non pour les hommes, car ‘Hazal (Bereshit Raba §60, 7) disent bien אין האשה רגילה אלא לבית אמה [pour expliquer le verset (Bereshit 24,28) où Rivka a couru raconter à sa mère et non à son père.]
Ce qui expliquerait pourquoi Naomi dit à ses brus que chacune retourne « chez sa mère », et la déduction d’Avnimus ne s’appliquerait pas dans son cas (et un non-juif devrait s’affliger de la perte de son père comme pour celle de sa mère).

Toutefois, Rabbi Méir (dans le Midrash Routh Raba op cit) semble approuver les dires d’Avnimus, mais je crois possible qu’il ait voulu lui dire son approbation sur son comportement sans pour autant valider sa preuve à partir de Naomi.
D’ailleurs, les mots de R. Méir sont « יפה אמרת, שאין אב לך », c-à-d qu’il valide la position d’Avnimus en soulignant la faiblesse du lien de parenté d’un non-juif avec son père (en suivant la règle אין אב לגוי), mais pas pour la supposée preuve à partir de Naomi et ses brus.

En conclusion, un non-juif qui voudrait porter le deuil sur l’un de ses parents (bien que ça ne fasse pas partie des fameuses « Sheva Mitsvot ») ne serait pas une absurdité, son comportement aurait un sens et un écho dans le judaïsme.
De toute manière, tout ce qui est lié au Kavod des parents contribue à intégrer la Mida de Hakarat Hatov et est nécessaire, chez les juifs comme chez les non-juifs. Voyez à ce propos Igrot Moshé (Y’’D II, §130).

[Et de façon plus générale, un non-juif qui souhaite accomplir une Mitsva en a le droit et en sera récompensé, seules quelques Mitsvot sont « réservées » aux juifs (comme Shabbat, Limoud Hatorah, …).]
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