'Hatsot ou pas 'hatsot

Bonjour,
nous lisons dans la paracha de Bo qu a l annonce de Moche de la dixieme plaie a Pharaon, l heure qu il lui a indique etait "vers 'hatsot" c est a dire aux alentours du milieu de la nuit.
Le talmud (Berakhot 4a) s interroge pourquoi n a t il pas simplement dit "a 'hatsot" ainsi que Dieu le lui avait dit.
L une des reponses donnees est - comme le dit Rachi - qu il a craint la reaction des conseillers de Pharaon qui auraient dit que Moche est un "blagueur" et avait annonce une heure erronee - si jamais leurs "montres" ne seraient pas ete aussi precises. C est pourquoi il a prefere leur donner une heure plutot vague.
Plusieurs questions se posent a ce sujet; d abord, comment imaginer que les Egyptiens se preocuperaient a se moquer de lui pour une histoire de quelques secondes alors qu ils verraient bien la terrible plaie s abattre sur eux et seraient donc occupes a enterrer leurs morts. De plus, si Dieu lui avait dit "a 'hatsot" quel pouvoir avait il de changer Sa parole? (meme si ses intentions etaient justifies...), nous voyons dans plusieurs endroits dans la tora que les calculs personnels qui nous monteraient a l esprit ne doivent pas changer l ordonnance de Dieu (lorsque Moche a frappe le rocher au lieu de lui parler etc). Et enfin, - a mon humble avis - la sanctification du nom de Dieu aurait ete encore plus grande s il avait mentionne Sa precision et non que Dieu lui meme aurait ete imprecis...

Plusieurs commentateurs ont examiné la question que vous posez ici. Je citerai deux de leurs explications :
Selon rav Eliyahou Méir Bloch z’l de la yechiva de Telshe, tout retard dans le commencement de la plaie aurait porté atteinte à l’honneur de Hachem. Si la plaie avait débuté quelques minutes après le moment attendu, les savants égyptiens auraient douté des pouvoirs divins, ce qui aurait constitué une profanation du Nom. Moïse ne pouvait l’admettre en aucune façon. De même que, lorsque les journaux accusent quelqu’un d’avoir commis un méfait, la réputation de celui-ci en reste atteinte même s’ils publient un démenti, de même Moïse ne voulait-il pas que la moindre parcelle de temps puisse s’écouler dans un climat de doute quant aux pouvoirs de Hachem.
Rav Yits‘haq Stollman, dans son Min‘hath Yits‘haq, voit dans l’attitude de Moïse la volonté de préserver, non pas l’honneur du Tout-puissant, mais celui des enfants d’Israël. Moïse savait que ceux-ci n’étaient pas entièrement préparés à sortir d’Egypte. Ils s’étaient complètement habitués à leur condition de serfs et à la vie d’esclaves, de sorte que l’on pouvait craindre, même après la dernière des dix plaies, qu’ils ne se préparent pas à un départ dans l’allégresse, mais qu’ils continuent de dormir comme à l’accoutumée. Cela aurait constitué pour eux une humiliation terrible. Or, l’on sait que les Egyptiens, ainsi que le note la Guemara, tenaient déjà Moïse pour un badai (« farceur »). Celui-ci n’a pas voulu leur donner raison, même pendant un court instant.

Peut être nous avez vous tendu la perche, mais comment dire que les Egyptiens tenaient Moïse pour un Baddaï, alors qu'il est écrit dans Chemot 11,3 que Moché était très grand dans le pays d'Egypte, aux yeux des serviteurs de Pharaon et aux yeux du peuple ?

On peut être tout à la fois un grand homme et un « farceur », surtout lorsqu’il s’agit d’une tactique élaborée contre un adversaire.
J’ajoute que le texte désigne ici Moïse sous l’appellation de « l’homme Moïse », ce qui est inusité. Il en a été de même d’Isaac (Berèchith 26, 13) et de Jacob (Berèchith 30, 43).
Selon l’ouvrage Nethivei Yechouroun, la Tora cherche dans ces trois cas à souligner que le pouvoir, la richesse et le prestige détenus par les personnages ainsi désignés n’ont pas affecté leur état de ich, la simplicité de leur état d’homme. Cette interprétation me paraît pouvoir résoudre l’apparente contradiction signalée dans la question posée.