Beaucoup de commentateurs se sont interrogés sur le chant que Miryam a entonné à la fin de la traversée de la Mer Rouge (« Miryam la prophétesse, sœur d’Aron, prit un tambourin dans sa main, et toutes les femmes sortirent derrière elle avec des tambourins et des danses. Miryam leur dit : “Chantez vers Hachem, car Il est très élevé…” » – Chemoth 15, 20 et 31).
N’avons-nous pas appris que la voix d’une femme est considérée comme une ‘erwa (« impudeur »), et qu’il est interdit à un homme de prêter l’oreille à ce qu’elle chante ?
Nous rapporterons ici l’explication du Kelei Yaqar (ad Chemoth 15, 1 et 2). Celle-ci s’appuie sur une anomalie apparente du texte : Alors que, selon le sens premier du verset, Miryam était censée chanter devant des femmes, il est écrit : « Wata‘an lahèm Miryam » (« Miryam leur dit [au masculin, à savoir “à des hommes”] »), alors que l’ordre du texte aurait voulu que fût écrit : « Wata‘an lahèn Miryam » (« Miryam leur dit [au féminin, à savoir “à des femmes”] »).
Cela veut dire, explique le Kelei Yaqar, que les femmes à ce moment-là ont atteint un niveau égal à celui des hommes quant à leur réceptivité du don de la prophétie. C’est pourquoi la Tora dit lahèm (« à eux ») au lieu de lahèn (« à elles »), comme si Miryam s’était adressée à des hommes.
C’est ainsi, conclut ce commentateur, qu’il convient de comprendre le verset : « [A la fin des temps, c’est] la femme qui entourera l’homme » (Jérémie 31, 22). La femme retrouvera alors, en d’autres termes, cette égalité avec l’homme qui était la sienne au bord de la Mer Rouge.
Ainsi comprendra-t-on aussi cet enseignement du Midrach qui nous apprend que les simples servantes ont vu alors ce que n’a pas vu le prophète Ezéchiel.
On peut donc dire, à propos de l’intervention de Miryam après la traversée de la Mer rouge, que ne s’étant pas adressée aux hommes malgré les apparences contraires suggérées par le texte, ceux-ci ne se sont pas mis en danger de commettre une ‘erwa.