A Cheela-techouva :
Citation:
Dans la tfila du matin, on lit "Abayé, ... Hava méssader seder hamaarakha etc..."
Dans de nombreux sidourim on insiste sur l'importance de marquer un arrêt.
Le Ich Mtsliah, qui suit les psakim de Rav Mazouz, enlève même le mot "hava" après abayé ! Il me semble que c'est pour éviter ce hshash de prononcer le Nom d'Hashem comme il est écrit, et ce, même sans intention.
il semble donc que l'intention soit indifférente et qu'on ne puisse pas prononcer le Nom d'Hashem.
Deux choses : d’abord ce nom, le téragramme, est différent, car il est nous interdit de le prononcer même dans le cadre d’une bénédiction.
On parle de
Hogué et hashem beotiotav …
C’est pourquoi je demandais au questionneur (
Gab0111) de préciser le nom dont il parlait.
Ensuite, vous noterez que la majeure partie des juifs ne craignent pas de réciter ce passage qui figure dans quasiment tous les Sidourim depuis des lustres.
Je ne possède pas le
Sidour Ish Matslia’h (que vous mentionnez) pour y vérifier ce qu’il y dit, mais je sais que l’idée est déjà mentionnée dans le
Ben Ish ‘Haï (I, Mikets §9) qui indique d’ajouter le mot « Hou » (
Abayé hou hava messader…).
Si l’on en vient à corriger le Sidour, j’aurais opté pour une correction plus proche du texte, comme changer
Hava en
Haya (=Hava en hébreu) (ou tout bonnement supprimer le mot
Hava étant donné qu’il
ne figure pas dans la Gmara).
Mais je trouve tout ça excessif et ne pense pas qu’on puisse l’imposer halakhiquement.
J’ajouterais encore que bien que dans le texte original -celui de la
Gmara Yoma (33a), le mot
Hava est manquant comme je le disais (=
Abayé messader …)
[et le Dikdoukei Sofrim n’indique pas de variante], nous pouvons tout de même prouver à partir du Shas que ses auteurs ne craignaient pas que l’on prononce les mots «
Abayé Hava… » car ils figurent à la suite en de maints passages :
Abayé Hava Yativ
(Baba Metsia 30b) (Brakhot 30b) (Mena’hot 35b) (Psa’him 115b , 120b)
Abayé Hava Ka Yativ
(Souka 29a)
Abayé Hava Kaé
(Shabbat 112a, 147a) (Yevamot 103b)
Abayé Hava Shakil
(Psa’him 111b)
Abayé Hava Yahiv
(Shabbat 19a)
Abayé Hava Sayer
(‘Houlin 105a)
Abayé Hava Nayim
(Souka 26b)
On peut voir ça aussi avec d’autres personnages du Talmud (fils d'Abayé ou femme d’Abayé) :
Rab Bevay bar Abayé Hava Shakhia’h
(‘Haguiga 4b)
Devithou DeAbayé Hava la
(Nedarim 23a)
On pourrait encore s’inquiéter de la même chose lorsque le texte présente un mot terminant par « yé » juste avant le mot « hava », comme dans
Yoma (53a) «
Kad Hava Baé Rabbi Yo’hanan lessagouyé hava ga’hin… » ou encore
Nedarim (49b) «
Kad nafik rabbi Yehouda letsalouyé hava mikhsei… »
(quoi que dans ces deux cas, on pourrait imaginer une pose naturelle entre les mots où une virgule aurait droit de cité) et dans
Nida (20b) «
Temouyé Hava mitamei la » et dans le
Yeroushalmi il y a encore plusieurs textes qui présentent cette proximité.
On pourrait imaginer encore pire dans certains passages de la Gmara où il est écrit «
Mihavé »
(où l’on trouve donc tout le tétragramme en un seul mot et devancé d’un Mem).
Voir
Yoma 21b,
Ktouvot 77b,
Shabbat 104a
et Meguila 14a.
Quoi que le son « Yé » serait absent.
Quant à mon idée selon laquelle l’intention joue même si l’on prononce réellement un nom de D.ieu, vous lui trouverez un renfort dans le
Tosfot Souka (5a) et aussi un peu dans le
Tosfot Shvouot (35a).
Voyez aussi le
Shout Tsapi’hit Bidvash (§8) http://www.hebrewbooks.org/pdfpager.aspx?req=501&st=&pgnum=55 (D’’H Veshamati) qui s’oppose à ceux qui voient un problème halakhique au fait de dire «
Abayé Hava » et cite le
Tosfot de Shvouot (35a) en ajoutant que le
Piskei Hatosfot y afférant
(§50) est encore plus tranché sur la question.
Rav Ovadia Yossef le cite dans son
Yabia Omer (VIII, o’’h, §11) et autorise lui aussi de dire «
Abayé Hava » -tout en « autorisant » à se montrer rigoureux pour ceux qui le souhaitent.
De plus, il faut souligner que dire «
Abayé Hava » ne correspond pas encore au tétragramme, pour cela il aurait fallu avoir «
Hova » en place de «
Hava » et même en lecture ashkenaze, le Hé est ponctué d’un Pata’h et le Vav d’un Kamats (donc =Havo et non Hova).
Dire
Yehava (sans vouloir parler de D.ieu) n’est pas problématique.
D’ailleurs en hébreu on dit «
Yehavé » pour dire «
constituera » (par exemple dans la phrase «
Hamishpat hazé yehavé reaya shémoutar levatot bitouy zé »).
Donc je ne comprends vraiment pas ce
Ben Ish ‘Haï ni ceux qui le suivent.
Il y a un autre point qu’il faudrait aussi approfondir, c’est que la prononciation du nom Abayé n’est peut-être pas la vraie.
Peut-être est-ce
Abay -ou autre lecture qui ne terminerait pas par « yé ».
Il est assez rare de pouvoir prouver comment les mots étaient ponctués/prononcés il y a plusieurs siècles, c’est plus facile depuis que nous avons des livres en français (ou anglais etc.) mais nous trouvons parfois des traces des anciennes prononciations grâce à des retranscriptions –souvent du fait de non-juifs.
Par exemple pour
Abayé, nous trouvons en effet des indices laissant supposer qu’il y a quelques siècles, certains prononçaient
Abaï ou
Avaï (sans le Yé final), voir
De Abbreviaturis Hebraicis, c’est un livre (en latin) qui a plus de quatre siècles, qui date de 1613, par l’hébraïsant
Johannes Buxtorf (père).
Dans la
seconde édition (Bâle 1640), c’est en page 20-21 et en page 105, il retranscrit ce nom ainsi :
Abhai (ce qui revient à
Avaï, il souligne (-en
page 21 -pour les latinophones,) qu’il s’agît d’un
Veth et non d’un
Beth).
Toutefois, on ne peut faire une confiance aveugle à cet auteur qui commet assez souvent des erreurs au niveau de la retranscription en caractères latins.
Il commet aussi des erreurs tout court dans ses ouvrages « rabbiniques », comme le soulignait déjà
Rav Eisenstein dans
Otsar Israel (III, p.14).
Voyez aussi le
Aroukh Hashalem (I, p.6, sv. אביי) qui ponctue ce nom par « pata’h, pata’h, ‘hirik », ce qui donne
Abayi ou
Abaï.
Mais cela ne se termine pas par Ye ou Yé, donc aucune crainte pour ce qui nous préoccupe.
J’ai émis l’hypothèse dans mes shiourim sur la Gmara à plusieurs reprises que la vraie prononciation serait
Abiyé ou
Aviyé -là encore, cela termine par « Yé ».
Mais on peut aussi imaginer Abiy / Aviy.
[Selon une
Tshouvat Hagueonim, citée par le
Aroukh (erekh Abayé), le véritable prénom d’
Abayé était
Na’hmani et
Rabba son oncle qui l’a adopté –
car Abayé était orphelin des deux parents dès sa naissance- ne voulait pas l’appeler par son prénom qui se trouvait être aussi celui du père de
Rabba (et grand-père d’Abayé), il l’appelait donc
Avi ou
Abi comme pour dire mon (petit) père et c’est devenu אביי Abiy/ou Abiyé/ou Aviyé/ou Abayé…]
Cela pourrait expliquer pourquoi les auteurs du Shas et du Sidour ne voyaient pas de problème à ce que le mot
Hava suive le nom d’
Abayé (qui se prononcerait par exemple
Abiy), mais ceci est un autre sujet et je pense que de toute manière, ce n’est pas le mot
Hava qui serait problématique mais
Hova et qu’en tout cas, l’intention joue et prononcer le nom de D.ieu sans en avoir l’intention n’est pas répréhensible, comme prouvé précédemment.