Ça en fait des questions !
Ces sujets nécessitent de laisser mûrir un peu les réponses dans votre esprit. Je vous livre quelques idées en vrac et il faudra essayer d’analyser les choses avec le temps.
1) L’idée du Olam Haba où l’on siège tous ensemble dans une grande yeshiva est une image. Il s’agit de dire que dans un monde totalement spirituel, sans matière, la jubilation ne saurait être comparée à autre chose qu’au plaisir intellectuel.
2) Vous demandez ce qu’il en est d’une femme qui aurait participé à l’étude de son mari et de ses enfants en le leur permettant, mais qui, elle-même, n’aurait pas étudié.
Là aussi, la réponse est très longue, mais brièvement : il faut comprendre que dans l’esprit des Sages, la femme et son mari ne sont pas DEUX entités séparées, le mariage est vu comme une fusion, si ce n’est du corps, au moins de l’âme, de telle sorte qu’il s’agirait d’une âme « répartie » dans deux corps. Votre question reviendrait à se demander au sujet d’une personne qui aurait étudié la Torah avec ses yeux ses oreilles sa bouche et son cerveau, qu’en sera-t-il de ses poumons ou de son nez ou de sa main gauche ou de sa cheville droite?
La réponse est que c’est un tout, l’âme est « répandue » dans tout ce corps.
Ainsi, les deux âmes des époux sont comme fusionnées en une.
Il est vrai que l’on peut parfois douter d’une telle fusion lorsqu’une tension constante existe entre mari et femme, mais dans le « plan » idéal, les époux sont supposés s’entraider et se compléter.
Jusqu’à l’émancipation de la femme, il semblait assez logique que mari et femme ne fassent qu’un, mais il est vrai que s’ils ne se sentent pas solidaires à 100% comme bras droit et bras gauche, on peut se poser la question.
3) Il ne s’agit pas de « se reposer éternellement » dans un ennui dramatique. Mais plutôt de jubiler éternellement dans une ambiance agréable où l’on n’est plus restreint par les limitations du corps.
4) Il n’y aura pas d’objectifs comme vous l’entendez, mais il est difficile d’expliquer en quelques mots ce qu’est une vie sans vie, sans corps, sans matière.
5) Celui qui était ici-bas diminué mentalement ou par le temps (mort étant bébé…) ne souffrira pas dans l’autre monde, on ne peut pas lui reprocher son manque de performance si on ne lui en donne pas les moyens. אין הקב"ה בא בטרוניא עם בריותיו
6) Celui qui a été bon et honnête toute sa vie mais n’a pas (ou pas assez) pratiqué le judaïsme, là c’est encore plus long à expliquer en détail ; Il faut distinguer entre deux extrêmes : celui qui n’a pas pratiqué par mauvaise volonté et mauvaises midot, et celui qui n’a pas pratiqué car il n’avait aucun moyen de savoir qu’il le fallait, alias le « Tinok Shenishba ».
Le premier étant répréhensible, et le second totalement innocent.
Toutefois, 99% des cas se situent entre ces deux extrêmes, c’est en fonction de leur proximité à l’une ou l’autre qu’ils seront considérés.
Le concept de Tinok Shenishba nécessite d’être manié avec intelligence et discernement, il faut par exemple remarquer qu’il y a eu dans l’histoire du peuple Juif des périodes durant lesquelles dans certains endroits, il semblait facile d’être très pratiquant ou l’inverse.
A partir de là, avant de juger quelqu’un, il faut se demander comment se serait-il comporté s’il était né ailleurs (ou à une autre époque).
La génération des juifs polonais et lituaniens qui abandonnaient la pratique (disons tout le siècle précédant la Shoah), ou celle similaire des pays Sfarades (1920-1980) ne doit pas être comparée aux nouvelles générations où il est plus facile/tendance/etc. d’être pratiquant.
7) Globalement, la règle est qu’il n’y aura aucune injustice. Mais la subtilité est qu’il ne faut pas se contenter des perceptions et repères que nous avons dans notre monde matériel pour se faire une idée précise de l’au-delà.
8) Vous demandez encore : « est ce que les néshamots qui se sont connues en bas se retrouveront ? ». Ceux qui sont déjà passé par-là ne peuvent pas nous le dire, donc je n’en sais rien.
Il faut prendre du recul par rapport à la notion de retrouvailles, de connaissance, et par rapport aux perceptions de manière générale dans le monde d’en-haut.
Se demander si des Neshamot qui se connaissent en bas se retrouveront en-haut, suppose d’emblée que la connaissance dans le monde d’en-haut ressemble à celle que nous connaissons. Rien n’est moins sûr.
Si l’on imagine que la connaissance de l’âme une fois détachée du matériel, devient infinie, lesdites neshamot se « retrouveront », mais retrouveront aussi les autres neshamot qui leurs étaient étrangères ici-bas. D’autant qu’il est possible que les autres Neshamot (celles qui nous sont inconnues ici) nous étaient comme proches et connues avant de rejoindre ce monde, il conviendrait donc de parler de retrouvailles même par rapport à elles. Certains voient le monde des Neshamot dans un esprit de fusion, à un niveau moindre que celui dont nous parlions plus haut (entre les époux), toutes les Neshamot se rejoindraient en une grande Neshama…
Mais ces idées sont à la fois hypothétiques et hasardeuses, car rien ne nous permet de l’affirmer, même si certains textes semblent les tenir pour acquises.
9) Les seuls éléments que l’on peut « affirmer », ou au moins penser pouvoir légitimement prédire, c’est qu’il n’y aura aucune injustice, ni non plus, au Gan Eden, aucune souffrance, aucune tristesse de ce genre (vouloir retrouver une âme qu’on ne trouverait pas). Le bon sens l’indique et le bon sens est le Shalia’h direct du bon D.ieu dans ce monde, il est digne de confiance.