L'attitude à avoir selon moi est de se demander pourquoi ça dérange le mari.
Si sa femme ne dansera pas, pourquoi sa présence là-bas lui déplaît tant?
Il ne faut pas "étouffer" sa femme, il faut la laisser libre de ses choix (-si elle dispose de tous ses moyens).
Si c'est parce qu'il sait qu'elle aura de mauvaises fréquentations sur place, ça peut se comprendre, mais je ne pense pas qu'il convienne de lui "imposer" une vue. Il peut la mettre en garde, lui expliquer ce qui lui déplaît et si elle souhaite lui faire plaisir, elle n'y ira pas.
Les Sages disent: "
Eizéi isha ksheira, kol shéossa retson baala" (en fait les mots plus précis sont:
Ein le'ha Isha ksheira benashim éla isha shéi ossat retson baala)
(Rama Even Aezer fin de §69) (Tana Debei Eliahou Raba §9)
De manière générale, un mari n'a pas à "se mêler" du degré de religion de son épouse, sauf lorsqu'il est concerné.
Par exemple, si elle ne respecte pas shabbat et il serait amené à consommer non kasher par sa faute, ou encore dans ce qui concerne la tsniout -comme éventuellement dans notre cas.
(il en va de même pour la femme, elle ne doit pas se mêler des affaires qui ne le regardent pas, si son mari ne met pas assez de kavana dans le birkat amazon par exemple, ce n'est pas SON problème, elle peut bien entendu lui conseiller de faire un effort, l'encourager, mais pas le contraindre. Sauf s'il s'agît de choses qui LA concernent.)
Il n'y a pas de issour défini interdisant de se rendre à cette réception, mais si sa présence sur place traduit un manque de tsniout conséquent, le mari est en droit de s'y opposer.
Je ne connais pas votre cas particulier, mais en général se rendre à de telles réceptions ne constitue pas -selon moi- un manque de tsniout avéré (bien sûr tant qu'elle reste assise dans un coin avec ses amies).
Pour ce qui est des références, voyez
Igrot Moshé (O"H I, §41) concernant un mariage où les hommes et femmes ne sont pas séparés à table (mais seulement pour les danses) et même si dans notre cas il n'y aura pas de me'hitsot, puisqu'elle ne danse pas, une femme n'a pas vraiment d'interdit de voir des hommes danser tant qu'elle ne les "regarde" pas danser.
(l'interdit ne concerne que le cas où elle "regarderait" un homme danser, si elle ne fait que le "voir", pas de problème).
Il est vrai que certains poskim considèrent qu'une femme peut regarder un homme danser
(Le Rabbi de Satmar dans Divrei Yoel o"h §10, 9 et dans Taarat Yom Tov VI, p.42) (et voir Birkei Yossef Y"D §335), mais je suis étonné qu'ils semblent avoir "oublié" que les
rishonim ne partageaient pas cet avis:
Rabbi Yehouda 'hassid dans
Sefer 'hassidim (§614) écrit que de la même manière qu'un homme ne doit pas écouter une femme chanter, ainsi une femme ne doit pas écouter un homme chanter!
Car "tout ce qui est interdit à l'homme l'est aussi à la femme".
De cette règle générale nous comprenons qu'il est interdit à une femme de regarder un homme danser, tout comme d'observer/de "scruter" un homme avec des arrières pensées.
Je souligne que l'avis rigoureux concernant écouter un homme chanter ne semble pas retenu, sans quoi, il n'y aurait pas d'ezrat nashim dans les synagogues depuis qu'on y chante des airs liturgiques.
Certains
a'haronim s'en étonnent dans leurs annotations sur le
sefer 'hassidim, comme le
Guilyonei Dvar Yeoshoua ou encore le prolifique
Adéret (rabbi Eliahou David Rabinovicz-Teomim) dans ses
Agaot Adéret sur le sefer 'hassidim (§614).
Toutefois, j'ai pensé répondre à cet étonnement général jusque là resté sans réponse (à ma connaissance), par un autre écrit du même
Rabbi Yehouda 'hassid.
Il s'agit de son
Sefer AGuematriot (§30) où il écrit qu'un homme qui se fait beau pour que les femmes le regardent aura une part dans leur péché
(ce qui correspond à son opinion selon laquelle une femme n'a pas le droit de regarder un homme avec des arrière-pensées), puis il ajoute: et ne me rétorque pas que
Rabbi Yo'hanan qui se tenait à la sortie du mikve (cf.
Bra'hot 20a) nous prouve que les femmes n'ont pas d'interdit (lui-même fermait les yeux qu'il avait de toute façon du mal à ouvrir, voir
Baba Kama 117a et Rashi Taanit 9a), car les femmes avaient honte (d'entretenir de telles pensées au sujet d'un si grand rav).
Nous voyons de là que dans le cas où il est légitime de penser que les femmes éprouveront une retenue et une honte par rapport à une situation, il n'y a pas lieu de craindre ces mauvaises pensées.
Ainsi, je trouve assez logique de dire qu'à la synagogue, il est possible de se montrer moins rigoureux et de permettre à une femme d'écouter un homme (le 'hazan) chanter, en espérant qu'elle aurait honte de se laisser aller à de telles pensées en pleine synagogue. (ce qui n'est pas le cas d'un homme, qui, comme chacun sait, est plus "sensible" sur ces notions, Cf.
Sotah 48a Keesh baneoret.)
Selon cette interprétation, il résulte qu'une femme qui sait qu'elle n'a pas "assez honte" et se laisse aller à de mauvaises pensées, n'aura pas le droit d'aller à la synagogue en cas de risque de "'hazanout irrésistible" (ou devra sortir le cas échéant).
Le
shout Tshourat Shay (I, §125, daf 28a) écrit qu'il faudra veiller à placer la Ezrat Nashim de telle sorte que les femmes ne puissent pas "regarder"
(= avec intérêt) les hommes.
Le gaon
rabbi Yekoutiel Yehouda Halberstam, Rabbi de Klausenburg-Sanz, écrit dans son
Divrei Yatsiv (Even Aezer §35) que ce n'est pas pour rien que - fût un temps - il n'y avait pas d'Ezrat Nashim dans beaucoup de synagogues et même là où il y en avait, il y avait des rideaux qui empêchaient de se voir.
Il écrit que dans la ville de Sanz, la ezrat nashim se trouvait à l'étage au-dessus des hommes et il y avait un trou dans le sol (qui était le plafond des hommes) qui permettait d'entendre la tfila, mais pas de voir les hommes.
Il explique que c'est peut-être la raison pour laquelle les jeunes filles célibataires ne viennent (venaient?) PAS à la shul, étant plus sujettes à ce yetser ara...
[Il ajoute encore que
l'épouse du Rabbi Reb Heshel avait dit du passouk dans
Tehilim (§122, 1) "
Sama'hti beomrim li beth hashem nele'h", la melitsa suivante:
Sama'hti beomrim li = je me suis réjouie de ce qu'on m'a dit "LI", c-à-d "aré at mekoudeshet li" (la phrase de consécration du mariage), car ainsi,
Beth Hashem Nele'h = à la maison de D. nous pourrons aller (car elle ne pouvait pas aller à la shul avant d'être mariée].
Il s'étonne encore de son interlocuteur qui pensait pouvoir amener une preuve de
Bra'hot (20a) (l'histoire de
R. Yo'hanan qui se trouvait à la sortie du Mikve pour que les femmes le voient etc...) pour dire qu'une femme peut regarder un homme, en écrivant "'
has veshalom de s'imaginer que R. Yo'hanan parlait de beauté physique!...".
(Pourtant, c'est la preuve sur laquelle s'appuie son oncle le
Rabbi de Satmar (Divrei Yoel o"h §10, 9), mais ça ne sera pas le seul endroit où ces deux gueonim avaient des avis très différents.)
Rav Wozner dans son
Shout Shevet Alévy (V, §197, 2) écrit aussi qu'une femme n'a pas le droit de "regarder un homme avec des arrières pensées", alors qu'un homme lui, n'a même pas le droit de regarder une femme (mais seulement de la voir) car étant plus "sensible" il en viendrait plus facilement aux mauvaises pensées.
C'est pour cela écrit-il, que nous acceptons l'existence de la ezrat nashim, car en principe une femme qui vient à la synagogue ne vient pas dans cet esprit etc...
Voir encore
Igrot Moshé (Even Aezer I, §69) qui écrit que la drasha sur
lo tatourou a'harei levave'hem -"zé znout", concerne aussi les femmes.
Du
Sefer a'Hinou'h (§188) aussi il semblerait que les femmes soient concernées par ces issourim, il écrit sur "
lo tikrevou legalot erva" que cela inclut entre autre de ne pas regarder (etc...) et que cet interdit concerne les hommes et les femmes car il leur est interdit à elles aussi de regarder d'autres hommes que leur mari...
Aussi, il faut préciser que si dans le
Talmud il n'y a pas de texte explicite traitant de ce point, nous trouvons dans le
Midrash Shmouel (XIII, 8) que de la même manière qu'un homme n'a pas le droit de "nourrir ses yeux"
[lazoun einav. ça peut être une idée de nourriture ou bien de "znout", mais les deux sont liés, voir les commentateurs sur Isha Zona dans Yeoshoua II, 1] de la vue d'une femme, ainsi une femme n'a pas le droit de "nourrir ses yeux" de la vue d'un homme.
Je ne sais pas pourquoi tous les
a'haronim ne citent ce
midrash qu'à travers le
Yalkout Shimoni (Shmouel I, 9, §108) qui le reprend et non de sa véritable source.
Après tout ceci, je suis terriblement étonné du
Gaon Rabbi Ovadia Yossef (dekol raz la anis lei) dans son
Shout yabia Omer (I, §VI, 5) qui ne mentionne pas et semble ne pas tenir compte de ces rishonim (il mentionne le Sefer 'hassidim, mais pas le 'hinou'h etc...) et écrit que la seule source dans divrei
'hazal serait le
Yalkout Shimoni (op cit) et que ce dernier n'est pas en mesure d'établir une loi qui n'est pas établie dans le
Talmud.
[Petite note au passage: ROY donne pour référence le Yalkout Shimoni sur Shmouel §105, mais il faut corriger §108.
En fait, ayant vu ce midrash cité dans le Otsar Aposkim, il en a recopié la référence sans vérifier le texte lui-même et il se trouve qu'il y a une erreur d'impression dans le Otsar Aposkim.
Je ne sais pas si le texte a été corrigé dans le Yabia Omer imprimé (que je ne possède pas pour vérifier), j'ai consulté les écrits de Rav Ovadia "avant impression".]
Cette règle n'est vraie que dans le cas où le
Talmud indique une loi différente de celle du
Midrash, mais ce n'est pas le cas.
Seulement
ROY considère que la
gmara Bra'hot (20a) parlant de
R. Yo'hanan indique clairement qu'on n'interdit pas aux femmes de regarder les hommes.
En fait, à l'instar du
Rabbi de Satmar (op cit), sa preuve se base sur la compréhension de la
gmara repoussée par le
Divrei Yatsiv (qui écrivait
'has veshalom que l'on parle là de beauté physique etc...), elle est donc très discutable et dans la mesure où elle est discutable (et non évidente) on en revient à la règle qu'en absence de preuve claire à partir du
Shas, on s'inspire du
Midrash...
De plus, dans les
Rishonim nous voyons qu'ils considéraient que c'est interdit aux femmes de la même manière qu'aux hommes (donc exactement comme le
midrash Shmouel) et en l'absence de
rishonim s'y opposant explicitement, il paraît impossible de venir les contredire -surtout que les seules sources explicites et indiscutables au niveau des
'hazal indiquent exactement la même chose que ces
rishonim.
Suite à cela,
Rav Ovadia Yossef cite le
Shout Shoné Ala'hot (V, §222) qui s'oppose à ce qu'à écrit
ROY dans Yabia Omer (I, o"h §6, 5) [qui était cité dans le
Otsar Aposkim (§21, 7) suite au
Rabbi de Satmar qui tient la même position (tous deux sont meikilim)] et lui reproche (
ROY reproche au
Shoné Ala'hot) de ne citer que le
Yabia Omer pour s'y opposer et de ne pas mentionner le
Rabbi de Satmar...
Pour contrer la preuve du
Yabia Omer, le
Shoné Ala'hot écrit qu'il y a une différence entre VOIR et REGARDER, ce que
rav Ovadia Yossef repousse.
Mais je ne suis pas convaincu par le raisonnement qui lui permet de repousser cette "cassation" de preuve.
(en plus du fait que cette distinction se retrouve à moult endroits dans les a'haronim, y compris concernant ce point.)
Je n'entre pas plus dans les détails car c'est probablement assez confus comme ça pour le lecteur, désolé.
Afin de venir un peu en aide à
rav Ovadia Yossef, j'ai pensé prouver de quelques
Rishonim qu'ils ne pensaient pas comme le
Sefer 'hassidim (même si cela n'indique pas encore qu'ils soient aussi en désaccord avec le
Sefer A'hinou'h).
Il s'agit du
Kol bo (§45), du Sefer Aeshkol (il'hot meguila §9) et du Or'hot 'Haim (il'hot Meguila §2) qui écrivent que les femmes ne peuvent pas acquitter les hommes de la lecture de la Meguila car "
kol beïsha Erva".
Cependant, ces auteurs ne voient pas d'inconvénient au fait que des hommes acquittent des femmes de cette même lecture...
Tout ceci est extrêmement discutable car il y a là de multiples souguiot enchevêtrées, mais en ce qui nous concerne et nous intéresse dans l'immédiat, je pense que nous pouvons admettre que ces
rishonim ne considéraient pas qu'il y ait un interdit pour une femme d'écouter un homme chanter.
Toutefois, cela n'exclut pas qu'ils puissent penser qu'une femme n'ait pas le droit de "regarder" un homme.
Ainsi, je n'irai pas jusqu'à dire que la ala'ha à retenir est de considérer les femmes comme les hommes concernant écouter l'autre chanter (car les femmes y sont moins sensibles), mais pour "regarder" (que je distingue de "voir"), puisque c'est explicite dans le
Midrash, dans les
Rishonim et dans plusieurs
a'haronim, il convient de suivre cette position (tout en considérant là aussi une différence au niveau de la sensibilité des uns et ds autres).
(Ceci n'engage que moi, je sais que c'est une ma'hloket
a'haronim et que ma position ne correspond pas à celle du
Rabbi de Satmar et Rav Ovadia Yossef, mais le grand nombre d'opposants et surtout leur stature, m'imposent la rigueur. Ceux qui pensent pouvoir s'opposer à ce que j'ai écrit ont bien raison, c'est leur droit et je ne compte nullement imposer mon opinion à autrui.)
Pour en revenir à nos moutons (je m'excuse d'avoir totalement dévié du sujet initial, je n'ai pas fait attention) et
POUR CONCLURE:
1) une femme ne doit pas "regarder" un homme (=avec des arrières pensées)
2) elle peut l'écouter chanter tant qu'elle est sûre de ne pas entretenir de mauvaises pensées à cause de cette écoute.
3) Il n'y a pas d'interdit de se rendre à un mariage sans me'hitsa tant qu'il n'y a pas de danses (où s'il y a une me'hitsa pour les danses).
4) Il n'y a pas d'interdit ala'hique défini (=systématique) pour une femme de se rendre dans un mariage sans me'hitsa même s'il y a des danses dans la mesure où elle s'en tient éloignée.
5) On ne doit rien imposer en matière de religion à son conjoint, tant que son manque de piété ne nous concerne pas directement.
6) Une femme ksheira est une femme qui fait plaisir à son mari (-même si elle sait que ses inquiétudes ne sont pas fondées, comme ça le dérange, il convient de s'en abstenir. Mais le mari doit se montrer compréhensif, surtout si c'est le mariage d'une amie ou d'un membre de la famille auquel l'absence de sa femme serait très mal interprétée).
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J'en viens maintenant à la deuxième question, il est assez tard et je suis fatigué, aussi je ne pourrais pas être très long, même s'il y a beaucoup à dire.
De toute manière, il s'agît là d'un sujet extrêmement délicat et il est indéniable que la grande majorité des femmes ne comprend pas exactement ce que D. attend d'elles avec cette notion de tsniout.
Certaines s'accommodent avec le livre
Oz Veadar de
Rav Falk (ou ses adaptations en français), d'autres en sont révulsées.
J'en ai déjà parlé ailleurs, voir ceci:
http://www.techouvot.com/collants_pour_les_femmes-vt13581.html?highlight=
Je trouve particulièrement difficile de sensibiliser les jeunes filles/femmes à ce sujet, elles ont souvent le sentiment que les "obligations de tsniout" sont de lourds fardeaux à supporter.
Il est une belle idée que vous pourrez lire dans un écrit de
Rav Yits'hak Jessurun (rav Yeshouroun de Marseille)
intitulé "Le mariage a-t-il encore une signification". Voyez en page 21 la note 22.
Si cet écrit vous est inaccessible, je tenterai bli neder de vous le retranscrire.
Etant fatigué, je m'arrête là sans me relire (et sans ignorer qu'un si long message écrit dans un tel état de fatigue ne saurait être exempt de fautes sans relecture).