La Judée tombe sous la dépendance de Rome.
1. Lutte entre les deux frères Hyrcan II et Aristobule II. - Après la mort de leur mère Salomé, ses deux fils, Hyrcan Il et Aristobule II, se disputèrent le pouvoir. Aristobule II, qui s’appuyait sur le parti des Sadducéens, fut victorieux. Entre les deux partis se fit alors un accord, en vertu duquel la couronne passa sur la tête d’Aristobule II, tandis que Hyrcan II se contentait des fonctions de grand-prêtre.
2. Intrigues de l’Iduméen Antipater. - Cette paix entre les deux frères ne tarda pas à êlre troublée par les intrigues d’Antipater. Celui-ci, issu d’une famille iduméenne, convertie par la force au judaïsme, possédait l’entière confiance de Hyrcan, mais ambitionnait la couronne pour lui-même. Sur son conseil, Hyrcan appela à son secours un roi arabe et recommença les hostilités contre son frère. Aristobule aurait été obligé de se rendre, s’il n’avait pas obtenu momentanément le secours des Romains. Mais ce secours coûta aux Juifs leur indépendance, car les Romains ne voulaient que profiter de ces luttes intestines pour soumettre la Judée. - Bientôt Pompée, général romain, se déclara en faveur de Hyrcan et, comme les partisans d’Aristobule ne voulurent pas livrer Jérusalem, Pompée vint assiéger la ville. Après un siège de trois mois, la ville fut prise d’assaut un jour de sabbat, et les Romains y firent un horrible carnage (63 av.) ; environ 12 000 hommes périrent. Pompée pénétra avec sa suite dans le Saint des Saints ; cependant il ne toucha à aucun vase sacré, ni au trésor du Temple. Aristobule ainsi que ses fils et ses filles furent emmenés prisonniers à Rome. - Cependant Hyrcan ne profita pas de la ruine de son frère. Pompée lui rendit le pontificat, mais lui défendit de porter le diadème. Il lui accorda le titre d’ethnarque ou chef du peuple et le plaça sous la tutelle d’Antipater. Ce cruel Iduméen, qui était à présent le vrai maître du pays, abusa de son pouvoir pour pressurer le peuple et, avec ses richesses, il acheta les faveurs des Romains. Antipater périt empoisonné ; mais un plus grand ennemi encore était né pour le peuple juif - en la personne d’Hérode. second fils d’Antipater.
Hérode (37 av.-4 av.)
1. Hérode gouverneur de la Galilée. - Hérode dépassait encore son père Antipater en astuce. Il commença par flatter bassement les Romains et par blesser le sentiment national juif. Du vivant d’Antipater, qui l’avait nommé gouverneur de la Galilée, il s’était déjà concilié la faveur de Rome par la farouche sévérité avec laquelle il avait combattu les corps francs juifs, qui surgissaient un peu partout, dans le but de secouer Je joug romain. Les Romains considéraient ces patriotes comme des bandits et appelaient leur chef Ezéchias « chef des brigands ». Ezéchias, étant tombé entre les mains d’Hérode, celui-ci le fit décapiter, avec quelques-uns de ses compagnons, sans autre forme de procès, bien que l’application de la peine capitale fût réservée au seul Sanhédrin. Les patriotes juifs furent indignés de l’insolence de l’Iduméen et insistèrent auprès de Hyrcan pour qu’on lui demandât compte de son forfait. Hérode fut enfin cité devant le tribunal pour se justifier. Au jour fixé, lorsque les membres du tribunal eurent pris place, l’accusé parut, habillé de pourpre, couvert de ses armes et entouré de ses gardes, dans une attitude de défi. A cette vue, le courage manqua aux juges. L’assemblée était muette et anxieuse. Un seul juge, l’illustre Chemaya sauva l’honneur du tribunal. Il dit : « L’accusé n’est-il pas devant nous, prêt à nous vouer à la mort ? Mais sachez-le bien, si vous tolérez un pareil outrage à la justice, cet homme-là, arrivé un jour au pouvoir, vous livrera tous au bourreau. » Ces paroles énergiques avaient relevé le courage des juges ; mais le vieil et craintif Hyrcan ordonna la remise du jugement et, dans l’intervalle, Hérode s’enfuit à Damas.
2. Hérode épouse l’hasmonéenne Marianne. - La parole de Chemaya ne tarda pas à s’accomplir. Bientôt après la mort de son père, Hérode s’empara de la ville de Jérusalem et du gouvernement de la Judée, qu’il partageait avec son frère Phasaël. En ‘vue de rehausser son autorité aux yeux du peuple, il répudia sa femme et épousa Marianne, petite-fille de Hyrcan II. Hyrcan II et sa fille Alexandra consentirent à ce mariage, espérant ainsi attacher Hérode à leur famille et vivre plus tranquillement.
3. Hérode chassé par Antigone. - Cependant Antigone II, fils d’Aristobule II, se souleva contre l’usurpateur et tenta de recouvrer le trône de son père. Le peuple, qui haïssait Hérode et Phasaël, appuya Antigone. Avec l’aide des Parthes, Antigone conquit Jérusalem. Hérode s’enfuit, Phasaël se suicida, et Hyrcan fut emmené par les Parthes en Babylonie. Pour le rendre désormais impropre aux fonctions de grand-prêtre, ils le mutilèrent en lui coupant les oreilles. Antigone II fut reconnu par le peuple comme roi de la Judée.
4. Hérode roi. - Entre temps, Hérode, après un dangereux voyage à travers le désert, avait passé par l’Egypte et s’était rendu à Rome. Là, il sut gagner la faveur des puissants, un décret du Sénat le proclama roi de Judée et déclara Antigone II ennemi de Rome. Avec l’aide d’une armée romaine, Hérode marcha contre Jérusalem et en fit le siège. Malgré une résistance héroïque la ville dut succomber. Un jour de Sabbat, où les Judéens ne s’attendaient pas à une attaque, Hérode fit son entrée dans Jérusalem. Les Romains massacrèrent tout, sans distinction d’âge ni de sexe. Hérode lui-même fut obligé d’intervenir, pour calmer la fureur des soldats romains. Antigone fut pris et décapité. - Ainsi mourut le dernier prince de la famille des Hasmonéens, laquelle avait régné plus d’un siècle et avait causé la ruine et l’abaissement de la Judée, après lui avoir donné la grandeur et l’indépendance.
s. Hérode affermit son trône par des massacres. - Hérode était ainsi arrivé au but de ses visées ambitieuses. Mais la majorité de la nation juive le considérait comme un usurpateur. Ce ne fut qu’en s’appuyant sur les Romains et en sévissant contre ses adversaires qu’il put se maintenir sur le trône. Après avoir fait égorger en masse les partisans d’Antigone, il fit massacrer tous les membres du Sanhédrin qui, pendant le siège de Jérusalem, avaient encouragé le peuple à la résistance. Il n’épargnait que les Pharisiens Chemaya et Abtalion qui, pour arrêter l’effusion du sang, avaient conseillé de lui ouvrir les portes de la ville. Imitant les procédés des Romains, il confisqua la fortune de ses victimes.
6. Hérode extermine la race des Hasmonéens. - Deux hommes étaient seuls désormais capables de troubler sa tranquillité : Le vieux Hyrcan II, et Aristobule III, frère de Marianne. Ce jeune homme, d’une beauté rare, était aimé du peuple, qui désirait le voir nommer grand-prêtre. Mais Hérode, craignant que ce descendant des Hasmonéens ne devînt dangereux pour lui, était décidé à le faire mourir. Il l’invita à un festin à Jéricho ; là il proposa aux convives d’aller se baigner dans un étang du jardin ; les amis d’Hérode, suivant l’ordre qu’ils avaient reçu de lui, tout en s’ébattant dans l’eau de l’étang, se saisirent d’Aristobule et le noyèrent. Le tyran simula une profonde douleur et fit faire de magnifiques funérailles à son beau-frère. En la personne d’Aristobule III disparut le dernier rejeton direct de la race des Hasmonéens. - Le sort du vieux Hyrcan ne fut pas moins triste. Par toutes sortes de promesses Hérode parvint à le faire revenir de la Babylonie ; bientôt il saisit un prétexte futile pour livrer ce vieillard octogénaire aux mains du bourreau. - Mais là ne s’arrêta pas encore la fureur d’Hérode ; il alla jusqu’à faire décapiter sa femme Marianne qui lui avait reproché ses crimes et lui avait témoigné à toute occasion son mépris. La belle hasmonéenne, orgueil de la nation, offrit sa tête sans faiblesse et sans crainte et se montra digne de ses nobles aïeux. Alexandra, mère de Marianne, partagea bientôt le sort de sa fille. Hérode n’hésita même pas à faire massacrer les fils de Marianne qui, de descendance hasmonéenne par leur mère, étaient chéris du peuple.
7. Les constructions d’Hérode. - Pour flatter les Romains et pour rendre son nom célèbre, Hérode dissipa l’argent de la nation en élevant des constructions magnifiques. Il reconstruisit la ville de Samarie avec un faste inouï et lui donna le nom de Sébaste, en l’honneur de l’empereur Auguste (Sébastos est la traduction grecque du nom d’Auguste). Il fonda aussi la ville maritime de Césarée et ne se fit point scrupule d’y ériger un temple païen, orné d’une statue de Jupiter Olympien. A Jérusalem même, il bâtit un théâtre et un hippodrome ; il organisa des luttes d’athlètes et des combats d’animaux. Ces spectacles nouveaux révoltèrent le sentiment religieux des Judéens, et quelques patriotes formèrent le projet d’assassiner Hérode au théâtre. Mais le complot fut découvert, et les conjurés livrés au supplice. Pour gagner la faveur du peuple, qui le méprisait du fond du cœur, Hérode fit transformer le vieux temple de Jérusalem en un magnifique édifice, L’inauguration en fut solennelle, et Hérode y fit immoler des victimes innombrables, Mais le peuple ne participa pas volontiers à cette fête ; car au-dessus de la porte principale Hérode avait fait placer un aigle d’or, Quelques jeunes gens, qui avaient essayé d’arracher ce symbole de la puissance romaine, furent cruellement mis à mort.
8. Mort d’Hérode. - Hérode resta sanguinaire jusqu’à la fin de sa vie. Cinq jours avant sa mort, il fit encore tuer le fils aîné de sa première femme. Prévoyant que sa mort serait un sujet de joie pour la nation, il manda à Jéricho les plus notables Judéens, les fit enfermer dans l’hippodrome et ordonna à sa sœur Salomé de les faire tuer par ses gardes, dès qu’il aurait rendu le dernier soupir : il voulait ainsi obliger la nation juive à pleurer lors de ses funérailles, au lieu de manifester de la joie. Ce fut là la dernière et odieuse pensée de ce tyran, qui a fait plus de mal au peuple juif que ses pires ennemis extérieurs. Il avait régné 34 ans. - La dernière volonté d’Hérode ne fut d’ailleurs point exécutée, et le peuple célébra sa mort comme un jour de délivrance et de fête.
(Histoire Sainte Illustrée à l’usage de la jeunesse israélite, par Arthur Weil, Rabbin de la communauté israélite de Bâle).