L’attitude que doit avoir un Juif devant le malheur est dictée par la Michna : « On a la même obligation de bénir [Hachem] pour le mal que pour le bien, ainsi qu’il est écrit : “Tu aimeras Hachem ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir” (Devarim 6, 5) […] “De toute ton âme”, même s’Il enlève ton âme… » (Berakhoth 9, 5).
Commentaire de Bartenoura : « Lorsque tu récites la bénédiction : “Béni le Juge de la vérité”, tu dois la dire avec la même joie et le même allant du cœur que lorsque tu Le remercies pour le bien. »
Le livre de Job est tout entier consacré à ce que l’on appelle le problème de la théodicée, c’est-à-dire à l’injustice apparente que constituent les souffrances du juste opposées aux félicités de l’impie. Le chapitres 38 et 39 projettent une certaine lumière sur ce problème. Ils affirment, en bref, que l’homme est insignifiant, trop insignifiant pour pouvoir sonder les desseins divins. Quant à la bonté de Hachem, elle reste un mystère que l’homme ne peut espérer percer.
Au cours des malheurs que l’histoire nous a fait traverser, et devant ceux qu’elle inflige à l’humanité, comme la catastrophe de ces derniers jours, le Juif n’a jamais rien abandonné de sa ferveur. Il a toujours su qu’il lui est interdit de mesurer son intelligence et son savoir à ceux de Hachem.
Qu’il me soit permis d’ajouter ceci :
Je viens de lire dans le site Aish HaTorah, sous :
[http://www.aish.com/spirituality/philosophy/The_Tsunami_and_God.asp]
un article du rabbin Benjamin Blech qui me paraît rejoindre notre réflexion, intitulé : The tsunami and God, dont je vous livre ci-après une adaptation partielle en français :
« Il est étrange de constater l’écho porté aujourd’hui encore par les propos des amis de Job relatifs à des fautes que celui-ci aurait commises et qui seraient à l’origine de ses malheurs. Des prédicateurs américains prétendent que Hachem a permis que les Etats-Unis soient attaqués le 11 septembre à cause de l’immoralité de certains de ses citoyens. Cette explication a du mal à résoudre la question de savoir pourquoi tant d’innocentes victimes ont péri dans ces attentats. Hachem n’aurait-il pas pu viser ses cibles avec plus de précision ?
Aucun élève de Terminale n’ignore que si A est la cause de B, cela ne signifie pas que B est toujours le résultat de A. Des clous sur une route provoquent des crevaisons, mais toutes les crevaisons ne sont pas causées par des clous. Il est vrai que la Tora nous apprend que le péché est suivi par des conséquences tragiques, mais cela ne veut pas dire que chaque tragédie est le résultat du péché.
Les mystiques ont tendance à mettre l’accent sur l’insignifiance des événements qui s’abattent sur ce monde-ci comparée à la béatitude qui nous attend dans le monde à venir. Nos maîtres nous apprennent que ce n’est jamais à nous de juger les autres, mais qu’il nous appartient de nous concentrer sur nous-mêmes et d’examiner comment nous pouvons améliorer le monde.
Notre façon de résoudre le mystère de la coexistence de Hachem avec le mal consiste à affirmer que toutes les victimes ne sont pas des criminels. Il arrive, certes, que le péché soit la cause de la rétribution divine. Mais nous ne sommes pas des prophètes, et l’on nous apprend que l’on ne doit pas « être juge unique, car il n’est de juge unique que l’Unique » (Avoth 4, 8).
Affligeons-nous pour les victimes du tsunami et épargnons-leur notre condamnation. Maintenons notre foi en Hachem, non pas parce que nous pouvons justifier Ses voies, mais parce que Ses voies dépassent notre compréhension. Et que notre première question devant cette tragédie ne soit pas : “Pourquoi est-ce arrivé ?”, mais : “Que puis-je faire pour leur porter secours ?” »
