Avant de vous répondre, j'ajoute une précision:
Plusieurs personnes m'ont demandé pourquoi je ne fais pas cas du
Mishna Broura (§75, sk.2) dans mon précédent message. Je leur ai répondu qu'étant donné que ses sources sont (comme il l'indique dans
Shaar Atsiyoun 4) le
Pri Megadim et le
'Hayei Adam et que de ces derniers il est difficile d'en ressortir ce que le
Mishna Broura écrit, je n'ai pas voulu mentionner ce
Mishna Broura.
Plusieurs
a'haronim le lui reprochent. Ils ne voient pas comment le
Mishna broura a pu extraire ce qu'il écrit de ces sources qui ne semblent pas dire ce qu'il veut leur faire dire.
Voir le
Piskei Tshouvot §75 note 25 (et aussi
note 24).
(Bizarrement le
Or A'hama qui cherche toujours la petite bête au
Mishna Broura n'a rien trouvé à redire sur ce point.)
De nombreux autres
a'haronim expriment leur désaccord sans s'être donnés la peine de vérifier si c'est bien ce qu'écrit le
'Hayei Adam (qui en fait n'écrit pas du tout ce que le
Mishna Broura cite en son nom !).
C'est entre autres le cas du
'Hazon Ish dans ses annotations sur le
Mishna Broura.
Bon, allez ! Ça suffit ! Soyons plus clair !
Je ne voulais pas mentionner ce qui y est écrit pour gagner à pouvoir faire court, mais c'est trop obscur, alors c'est parti ! J'explique un peu mieux:
Le
Mishna Broura dit (-semble dire, voyez ce que je compte écrire plus bas SDV) que la partie à couvrir s'arrête avec les genoux.
En dessous du genou, il semblerait qu'il n'est nul besoin de se couvrir selon lui.
L'ennui numéro un, c'est qu'il cite ses sources dans son
Shaar Atsiyoun (4) où il dit qu'il a trouvé ce din dans le
Pri Megadim et dans le
'Hayei Adam.
Or, dans le
Pri Megadim (o’’h §75, MZ, 1) ça n'est pas certain. Il ne parle que « bedére'h efshar » (efshar ein 'hashash) et surtout sa comparaison avec les animaux est douteuse puisque les
Tosfot (Mena’hot 37a) établissent déjà une différenciation entre l'être humain et l'animal concernant la partie appelée Shok.
Et pour ce qui est du
'Hayei Adam, il apparaît clairement que selon lui les mollets doivent être recouverts.
Il ne parle que de laisser découverts les pieds (sans les mollets).
Le
Mishna Broura est donc en train d'annoncer un din en le justifiant par deux auteurs qui ne le justifient pas du tout !
Voilà la raison essentielle pour laquelle je ne voulais pas citer ce
Mishna broura.
À part ça, beaucoup de
Poskim sont en désaccord avec lui et maintiennent que seul le pied pourrait être découvert, mais en aucun cas le mollet.
Je ne vais pas vous les citer, il y en a plus de cent !
Mais il faut tout de même comprendre que ce que le
Mishna Broura écrit n'est pas simplement dû à une (grossière) faute d'inattention (dans sa lecture du
'Hayei Adam.) C'est certainement aussi son opinion (et pas seulement une erreur).
Il croyait avoir vu ça dans le
'Hayei Adam, mais il aurait pu le voir ailleurs.
C'est par exemple ce qui est écrit dans le responsa de
Rav 'Haïm Sonnenfeld, Salmat 'Haïm §66 (dans l’édition de 1982 qui reclasse les tshouvot différemment) pour qui le statut de Erva ne s'appliquera pas aux mollets.
Et je pense que le
'Hafets ‘Haim (auteur du
MB) pensait comme
Rav Sonnenfeld sur ce point.
Mais très nombreux sont les
poskim qui considèrent les mollets comme une « partie couverte (/ à recouvrir) ».
Allez, en voici un tout petit échantillon:
- Rabbi Akiva Eiger (shout II, §28)
- Le Mekor 'Haim (Ba’hra’h)(§75, sk1)
- le Hayei Adam (IV, 2)
- le Baal Atania (Shoul’han Arou’h Arav §75, 1 – le texte est implicitement clair sur ce point)
- le Ben Ish ‘Haï (I, parshat Bo, §11, et §12) [voir aussi ce qu'il écrit dans son livre
Od Yossef 'Haï (parshat Bo fin de §2) où il permet de ne pas couvrir quelques 6cm au-dessus de la cheville, mais tout le reste du mollet doit être couvert.
Voici un élément supplémentaire pour répondre à la première question de
Eva777: Selon le
Ben Ish 'Haï, il est permis de ne pas avoir de collants sous une jupe longue jusqu'à 5 ou 6 cm des chevilles !
- shout Tsour Yaakov (II, §1) en se basant sur un
Tosfot Yeshanim Yoma 71b.
- 'Hatam Sofer (even aezer §69) et ('Hidoushei 'Houlin 42b)
- le Divrei Yatsiv (Even Aezer §37) qui interdit même le pied.
- le Rabbi de Satmar ('Hidoushei Thora parshat Shoftim) (issour gamour !)
- Rav Wozner (Shevet Alévy (I, §1) et (III, §91))
- Rav Elyashiv (Ashrei Aïsh §XVI, 16)
- Rav Weiss (Min'hat Its'hak VI, §10) (qui impose même de mettre des collants à la maison ! Mais
Rav Auerbach n'est pas d'accord et permet (explicitement) de ne pas porter de collants à la maison
(Ali'hot Shlomo §XX, 12))
- Az Nidberou (VII, §83), (X, §34) et (XIV, §48 et §49).
- Rav Klein (Mishné ala’hot XII, §311)
- Le Beer Moshé (VIII, §101)
- Rav Ovadia Yossef (j'y reviens plus bas pour répondre à Eva777).
-le 'Hazon Ish (o’’h §XVI, 8)(même s'il n'est pas d'accord avec le
Mishna Broura) écrit qu'il est difficile de se positionner avec des preuves convaincantes dans un tel sujet (kashé lea'hria badavar). Cependant,
Rav Zilber dans
Malboushei Nashim (p.10) écrit qu'il a traité ce sujet avec le
'Hazon Ish par le biais d'une relation épistolaire à la fin de laquelle le
'Hazon Ish s'est rangé à son avis en s'opposant au
Mishna Broura [qui laisse les mollets dépendre du minhag local et en déclarant obligatoire de se couvrir les mollets. Il ajoute qu'il est pénible de contredire le
Mishna Broura, mais la vérité prime.
- Rav Yonathan Shteif (shout Maari Shteif §43) que je citais dans mon précédent message
- le Rabbi de Komarna (Shoul'han Ataor §75, 1)
Ces deux deniers s'appuient sur le
Zohar (III, 142a) que je mentionnais brièvement dans mon dernier message.
Dans ce
Zohar il est écrit:
«
Shok beïsha erva, réguel beïsha erva ». Il semble clair que le pied lui-même soit considéré erva ! (du moins, c'est ainsi que de nombreux
a'haronim l'ont compris).
Cependant, comme je le disais, il convient de suivre le minhag local: Dans les endroits où les femmes (pudiques) ne se couvrent pas les mollets, il me semble difficile d'interdire « ala'hiquement » de manière assurée.
En Eretz-Israël, dans les milieux dits Mizra'histes (= rattachés au parti Mizra'hi = sionistes religieux), les femmes ne mettent pas de collants, mais ont de longues jupes. Je ne pense pas que l'on puisse dire qu'il y aie là infraction à la ala'ha et - au grand dam de certains - j'ajoute même que selon
Rav Elyashiv (qui ne fait clairement pas partie de ce mouvement), dans les « endroits du Mizra'hi » il est permis de ne pas mettre de collants !
(Ashrei Aïsh §XVI, 16 note 27).
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Après tout ceci, j'en reviens à notre étrange
Mishna Broura duquel tout est parti et qui désole et perturbe tant de rabanim.
Je ne sais pas pourquoi beaucoup ont compris du
Mishna Broura qu'il est permis de ne pas mettre de collants. En fait, il ne fait que dire que les mollets ne sont pas considérés Erva par rapport au din de Kriat Shema et davar shébikdousha. Mais cela n'exclut pas qu'on doive se les couvrir "midin tsniout".
Etant donné que le din de Erva (dont on parle ici) est selon beaucoup de
A'haronim lié à ce qui va perturber la kavana, on peut imaginer que même si la tsniout impose de se couvrir les mollets, il est assez rare que la vue d'un mollet puisse perturber une kavana de kriat shema.
Un peu comme les bras (au-dessus du coude) qui sont recouverts selon les lois classiques de la tsniout, malgré qu'il soit difficile d'être perturbé dans ses kavanot à la vue d'un coude ! (voir
Les gardiens de la cité –Blau- p.54)
On pourrait ainsi imaginer qu'il faille couvrir les mollets mais que pour les lois du Shema on soit plus permissif.
Je serais étonné d'apprendre que selon le
'Hafets 'Haim il n'est pas nécessaire de mettre des collants.
Je pense qu'il ne parlait donc que de la loi par rapport au Shema (enfin, c'est assurément que de cette loi qu'il parle, mais je veux dire qu'il n'entendait pas par là qu'il n’est pas nécessaire de mettre des collants).
Je prouve mon approche très simplement:
Rav Sonnenfeld (Salmat 'Haïm §66 op cit) qui écrit la même chose que le
Mishna Broura (qu'en dessous du genou ce n'est pas «erva») écrit aussi
(Salmat 'Haïm §67) – à peine un siman après dans cette édition, et quelques simanim plus haut dans la précédente - qu'il faut être ferme sur les bas et qu'il est inconcevable de permettre de s'en passer (en ajoutant qu'avant la Bat Mitsva il ne faut pas être trop rigoureux avec sa fille sur ce point, seulement l'habituer à cette mida de tsniout calmement).
Nous voyons bien que le
Rav considère qu'il faut absolument se couvrir les mollets même s'il est d'accord que le statut de Erva ne les concerne pas.
Je pense qu'il faut comprendre le
Mishna broura de la même manière. Et selon cette compréhension, il n'y a pas de
Mishna broura qui permettrait de ne pas mettre de collants, et il n'y a plus de raison de se sentir perturbé par ce
MB.
Rav Moshé Feinstein (Igrot Moshé even aezer IV §100) aussi écrira que les mollets ne sont pas « erva ». Mais par tsniout, nous les couvrons.
Voilà encore une seconde raison pour laquelle j'évitais de mentionner ce
Mishna Broura, car selon moi, il n'a aucun rapport avec notre souguia, et ce qu'il écrit concernant les lois du Shema n'est pas importable ni utilisable pour les lois de la tsniout.
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Bien, maintenant j'en viens à la question de
Eva777:
Citation:
Les collants doivent-ils être totalement opaques ? Ou peut-on voir la couleur de la jambe à travers ?
Pourriez-vous s'il-vous-plait me donner l'avis de Rav Ovadia Yossef sur le sujet ?
De plus, existe-t-il un livre réservé à la tsniout selon son avis?
Je ne sais pas s'il existe un livre sur la tsniout selon l'avis de
Rav Ovadia Yossef. Je suis très loin d'être un grand connaisseur des livres de la famille
Yossef. De nombreux internautes qui fréquentent ce site sont bien plus au courant que moi des parutions de ses enfants qui reprennent souvent les décisions de leur illustre père.
Néanmoins, je sais qu'il y a un livre intitulé
Otsar Dinim, rédigé par son fils
Rav Its’hak Yossef, dans lequel il y a (dans l'édition récente) un chapitre
(§60) sur la tsniout.
Puisque vous voulez savoir l'opinion de
Rav Yossef sur l'opacité des collants, sachez qu'il est rigoureux sur ce point
(Taarat Abayit II, p.165) et
(Otsar Dinim §60, 3, note 3 - du fils mais au nom de son père), il impose des collants totalement opaques.
Je ne saurais quantifier cela en deniers en son nom, mais je ne crois pas que l'on s'en tire avec moins de 40 deniers.
Ce n'est pas le seul, dans les communautés 'hassidiques aussi on impose assez souvent des bas opaques. C'est l'avis:
- du
Rabbi de Satmar ('Hidoushei Thora parshat Shoftim)
- de
Rav Klein (Mishné ala’hot XII, §311)
- du
Az Nidberou (X, §34 et XIV, §48 et §49)
- et du
Beer Moshé (IV, §147, 17).
Cependant, le
Igrot Moshé (even aezer IV, §100, ot 6) considérant que méikar adin on suit le
Mishna Broura (il n'y a donc pas de din de Erva sur les mollets), écrit que ce n'est que par tsniout qu'on les couvrira. On pourra donc utiliser des bas transparents.
Mais
Rav Ovadia Yossef est ma'hmir.
De manière générale,
Rav Yossef est très meikel. Dans plusieurs domaines, il recherche à faciliter l'accomplissement des mitsvot et tient à ce qu'en finale la loi ne soit pas insupportable ou trop difficile à accomplir (comme l'inquiétude de nos maîtres concernant un décret que la majorité du peuple ne pourrait respecter). Néanmoins, pour tout ce qui a trait aux femmes, il s'avère être un grand ma'hmir (rigoureux).
Il interdit les collants 20 deniers comme nous venons de le voir. Il indique aussi de porter des collants même si on porte une jupe très longue qui arrive aux chevilles (en précisant que celles qui s'en passent ont tout de même sur qui s'appuyer, mais il le déconseille)
(OD, §60, 4 et note 4. Et vous devez savoir qu'il interdit strictement le port de la perruque
(OD, §60, 11).
[
une remarque au passage: Je lis dans le
Otsar Dinim du
Gaon Rav Its'hak Yossef (§60, 11) qu'il est strictement interdit à une femme de sortir en perruque «
et à plus forte raison qu'il convient d'interdire cela aux femmes sfarades étant donné que la totalité des gueonim sfaradim reconnus l'interdisent » … ça n'est que récemment que les femmes sfarades ont commencé à porter la perruque sous l'influence d'autres femmes mais il faut leur faire savoir que «
tous les gdolei Athora (grands hommes de Thora),
tsadikim et ‘hassidim des communautés orientales (=les sfaradim de tous bord)
n'ont jamais permis de se conduire de la sorte (porter la perruque)
dans nos contrées ».
Fin de citation.
Et j'en suis vraiment étonné car nous avions déjà établi clairement que de nombreux tsadikim et poskim sfarades permettaient la perruque de manière parfaitement claire et explicite (voir mon post du 1er septembre avec ce lien:
http://www.techouvot.com/la_perruque_pour_les_sefaradim_oui_ou_non-vt13657.html
et je serai estomaqué d'apprendre que
Rav Yossef ait manqué toutes ces lectures ! C'est tout bonnement impossible.
Voici quelques-uns des poskim sfarades connus et reconnus (que je citais dans ce post) qui permettent la perruque:
- Rabbi Shalom Messas (Shemesh oumaguen III, §47, 2 et aussi
II,§15-17 et encore
Tevouot shemesh even aezer §137) .
- Le Ben Ish 'Haï (shana shnia Parshat Vayakel §13).
- Rav Bentsion Aba Shaoul (Or Letsion I, §11).
- Le Kaf A'haïm (o"h §75, SK.19).
- Rabbi Ovadia Adaya (Yaskil Avdi VII, even aezer §16).
- Rabbi Yaacov Shimshon Shabtaï (Shabbat Shel Mi sur Shabbat 64b d"h Matnitin).
- Rabbi 'Haim Pallagi (dans Roua'h 'Haim even aezer §21, 3) écrit que les femmes qui viennent de France en Turquie se doivent de se plier aux coutumes locales et se couvrir les cheveux avec un foulard et non une perruque. Il est donc bien en train de dire qu'en France (/dans les pays) où les femmes portent la perruque, c'est permis.
Comment imaginer que
Rav Yossef – champion de lecture des responsa - n'aie pas lu ces livres classiques ?
Comment supposer qu'il ne considèrerait pas ces rabanim comme faisant partie des «
gueonim sfaradim reconnus »?
Le
Kaf A’haim ! le Yaskil Avdi ! Rabbi ‘Haim Pallagi ! le Or Letsion ! Rabbi Shalom Messas !... etc… comment ne pas les considérer reconnus ?
ou pas assez sfarades ?
Ce sont les sommités du monde des rabanim et des décisionnaires sfaradim.
Quoi de plus classique dans la littérature ala'hique sfarade que ces responsa ?
[Je crois que ça ne prend pas de S, puisque c’est déjà au pluriel.
Au singulier, s'il s’agissait d'une seule réponse ala'hique (et pas d'un livre de réponses, car dans ce cas on dit aussi un responsa, pour dire un recueil de responsa) on devrait dire, je crois, un responsum, mais peut-être que le mot ayant été adopté par la langue française s'accorde en nombre ?
Si oui, ça passera certainement dans la masse de fautes que j'ai dû faire dans ce responsum puisque je ne me relis pas, comme je l'ai déjà écrit. Me relire prend beaucoup de temps et risque en plus de m'encourager à ajouter du texte, et on n'en finirait plus !]
Ceci est fort étrange. Je critiquais les personnes qui affirmaient que « TOUS les rabanim sfarades interdisent la perruque » en dénonçant le ridicule d'une telle affirmation (ne serait-ce que par le psak de
Rav Messas, Grand Rabbin de Jérusalem, qui écrit dans
Shemesh Oumaguen (III, §47, 2) que c'est permis – même pour les sfaradim - "beéter gamour lelo pikpouk" sans équivoque ni ambiguïté), et je constate qu'en fait ils tiennent ça de
Rav Its'hak Yossef que je ne sais comment justifier/expliquer.
(J'ai déjà écrit sur ce site, suite à des compréhensions erronées de mes propos par certains internautes, que je n'ai rien de personnel contre
Rav Its’hak Yossef ou son père, 'has veshalom. J'admire ces deux rabanim, et c'est bien pour cela que je m'intéresse à comprendre leurs écrits – du moins, ceux dont je dispose - au lieu de me contenter de les mettre de côté, comme ce que font certains.
Je demande donc aux lecteurs de garder leur calme et de lire ce que j'ai écrit le 17 avril 2011 sur ce post:
http://www.techouvot.com/suivante-vt13145.html
J'en reviens aux tendances ala'hiques de
Rav Ovadia Yossef, fidèle à l'adage rabbinique «
Ein Apotropous learayot » [il n'y a pas de garant en matière de arayot], c'est-à-dire qu'il ne faut pas hésiter à être ma'hmir/strict dans ces domaines, car personne ne peut s'y croire à l'abri du danger). Il se montre très rigoureux dans tout domaine lié à la tsniout, à la mixité etc…
Cette attitude se retrouve assez fréquemment chez les poskim sfaradim. Qu'ils soient d'Irak, d'Egypte, du Maghreb ou d'ailleurs, ils ont une tendance générale à la koula (chacun avec son domaine de prédilection, bien sûr) et une tendance à la 'houmra en ce qui concerne les arayot (tous les rapports entre les hommes et les femmes ; la tsniout, la mixité, le yi'houd…).
Chez les poskim Ashkenazim, on assiste plutôt à un faible prononcé et généralisé pour la 'houmra.
Déjà depuis l'époque des rishonim et encore plus depuis les
a'haronim, en commençant par le
Rama qui semble rechercher les 'houmrot (certains
a'haronim le lui reprochent).
Quand bien-même il ne s'agit que d'une opinion minoritaire, il lui arrive d'opter pour la sévérité, tant l'idée de se baser sur la majorité permissive lui semblait trop risquée.
Pour en revenir aux collants opaques,
Rav Ovadia Yossef est ma'hmir comme dit plus haut.
Il base sa sévérité sur le
Beag (bra’hot fin de §III) cité par le
Maguen Avraham (o’’h §75) qui écrit qu'un habit transparent est comme absent, il sera donc impossible de lire le Shema face à sa propre femme en chemisier transparent. De là,
R.O.Y. en déduit que pour les collants aussi, l'opacité est indispensable.
Néanmoins, c'est précisément contre cette comparaison que
Rav Moshé Feinstein se prononçait en écrivant
(Igrot Moshé even aezer IV, §100, ot 6) que "méikar adin" les mollets n'ont pas de statut de Erva et ce n'est que par tsniout qu'on les couvrira. On pourra donc utiliser des bas transparents.
Le chemisier vient couvrir une Erva, mais ce n'est pas cas des collants qui ne sont là que par pudeur, mais ne sont pas supposés couvrir ni cacher une Erva.
Ainsi, leur transparence ne saurait être problématique.
Il est certain que
ROY a lu cet écrit. Il faut donc en déduire qu'il ne l'approuve pas et s'oppose au
Igrot Moshé en cela, ce qui est assez compréhensible vu la finesse du 'hilouk.
Plus exactement, la svara du
Igrot Moshé s'articule comme suit:
1/ même des collants fins et transparents recouvrent la jambe
2/ donc même sur un endroit considéré Erva on devrait s'en accommoder
3/ néanmoins il demeure un problème, c'est qu'il y a lieu d'être 'hoshesh les irourim, car le corps est visible
4/ donc pour les mollets qui ne sont pas source de irourim, pas d'inquiétude - même s'ils avaient le statut de Erva !
Pour conclure:
- Les bas opaques ne sont pas indispensables, selon plusieurs opinions. Mais
Rav Ovadia Yossef - dont vous demandiez l'avis - est strict sur ce point.
- Pour ce qui est de l'obligation-même de porter des bas (ou collants), la majorité des décisionnaires l'impose (
R.O.Y. aussi) et certains voient dans le
Mishna Broura un psak permissif. Cependant, je pense qu'il faut comprendre sa koula uniquement au sujet du din de Erva et non pour la tsniout, comme ce qu'il ressort clairement du responsum de
Rav Sonnenfeld.
La notion de « mévi lidei irour », pouvant varier d'une époque à l'autre, sera aussi relative à chaque personne (= si quelqu'un perd sa kavana à la vue d'un pied ou d'un mollet, il ne devra pas lire le shema devant une telle vision perturbante).
C'est ce qu'écrit le
'Hazon Ish (o’’h §XVI, 8) et une vision n'amenant pas au irour ne sera pas problématique pour la lecture du shema, selon ce qui ressort du
Divrei 'Hamoudot (Bra'hot III, 116) cité par le
Shearim ametsouyanim baala'ha (§V) dans son
kountrass a'haron (10).
- De manière générale, je réitère l'idée de tenir compte des us et coutumes concernant les bas (pieds ou mollets), de ne pas condamner/mépriser celle qui n'en porte pas, même si on s'astreint soi-même à en porter.
(Même si je sais que de nombreux tsadikim disaient qu'il faut reprocher aux femmes sans collants (que l'on connait) de ne pas en avoir, comme le
Rabbi de Belz cité dans le
shout Tsour Yaakov p.272).
Mais il ne faut pas non plus s'imaginer que c'est un plus facultatif, car pour une pléthore de poskim/rabanim, c'est obligatoire (pas seulement selon
Rav Ovadia Yossef).
Il est très difficile de se positionner ala'hiquement dans ce genre de discussions car la tsniout est un concept relatif à beaucoup de choses, à l'époque, au lieu, etc…
Ce que je sais plus clairement, c'est que celles qui suivent leur Rav en ayant le sentiment de bien faire les choses sont dignes de louanges.
Mais celles qui vont suivre leur Rav car il est plus cool et n'impose pas le port des collants, ou celles qui vont suivre leur Rav qui impose les collants mais ne vont pas se conduire de manière tsnoua malgré leurs collants, ne sont pas sur le bon chemin.
Il faut suivre son Rav ET avoir le sentiment de bien faire les choses Leshem Shamayim.