A Yhbtysey:
Oui, je pense qu’il ne convient pas de mettre les tfilin à un non juif.
Mais je ne connais pas de Lav l'interdisant.
Il faut savoir que certains rishonim considéraient qu’un pécheur n’a pas le droit de mettre les tfilin, ils comprenaient la gmara Shabbat (49a) qui dit que pour avoir les tfilin sur soi il faut « un corps propre » dans un sens de propre de péchés.
(Méiri 49a et Bra’hot 14b) (Shibolei Aléket 191b)
Il y a une base à cette idée dans le Talmud Yeroushalmi (Bra’hot II, 3), dans la Psikta Rabati (XXII, 5) et dans le Midrash Tehilim (§103).
Voyez aussi le Rav Yoel Teitelbaum dans son Al agueoula veal atmoura (§57 et 58 -à partir du milieu de la page 102).
Mais de ce qui ressort du Talmud Bavli (qui prime en matière de ala’ha) le sens est tout autre.
Le Talmud explique clairement que la propreté en question n’exclut pas le pécheur de la mitsva de tfilin, mais est une mise en garde contre d’éventuelles flatulences lorsqu’on porte les tfilin.
Le Thora Shléma (Bo, milouim p.257 –voir encore p. 258) fait remarquer que selon notre Talmud, il est impossible de soutenir cette idée d’interdiction de tfilin à l’impie.
Mais il cite une certaine version différente d’un mot qui change le sens qui serait, selon lui, à l’origine de cette explication du Méiri.
(Il existe aussi une idée d’interdire les tfilin seulement à l’orgueilleux (Elia Raba XXV, 2) qui n’est pas retenue)
Mais la ala’ha est fixée selon notre version du Talmud, comme le concevaient beaucoup de Rishonim comme:
-le ‘Hinou’h (mitsva 421),
-Rabeinou ‘Hananel cité par le Tashbets (je distingue ici le TashbEts katan du TashbAts gadol) (§272),
-Rav Hay Gaon cité par le sefer Aïtour (I, 7 daf 61b),
-le sefer Aeshkol (II, tfilin, p.90),
-le Smag (essé III) cité aussi par le Maarik (§174) et Rabeinou Be’hayei (ou Rabeinou Ba’hya pour les intimes) (Kad Akéma’h, tfilin).
Donc un impie est tenu de mettre les tfilin.
Néanmoins nous voyons que l’idée de mettre les tfilin n’est pas chose si évidente, il faudrait un certain mérite de mitsva.
Celui qui n’a pas ce mérite de mitsva sera malgré tout tenu de mettre les tfilin car en tant que juif il a une obligation de mettre les tfilin (selon le Bavli), mais pour un non juif qui n’en a pas l’obligation, il n’est donc pas raisonnable de les lui mettre.
Cela n’indique pas encore qu’il faille se battre pour empêcher le non juif de mettre des tfilin de lui-même, mais simplement qu’il ne sied pas à un juif de les lui mettre.
On trouve aussi une idée de « mauvaises pensées » ; une personne qui sait qu’elle entretiendra de mauvaises pensées (voir Shoul’han Arou’h ora’h ‘haim §XXXVIII, 4 –irour taavat isha) ne doit pas les mettre selon le Rama (ad loc), mais ça n’est pas l’opinion du Rav Yossef Karo (dans son Beth Yossef) qui impose de les mettre et de ne pas entretenir ces pensées.
Voir encore Mishna Broura (§XXXVIII, sk.15).
Il est encore une idée qui mérite d’être mentionnée, ce qu’écrit le Shimousha raba (cité par le Rosh sur il’hot tfilin et par le Ma’hzor Vitry II, p.645) : il ne convient de mettre les tfilin qu’à une personne qui lit la Thora, les Prophètes, les Hagiographes et le Talmud.
Cependant cette idée est repoussée par le Ma’hzor Vitry (II, p.645) pour être contraire à ce qui ressort du Talmud (Souka 42a).