Non.
Je vous fait de suite un copié-collé d'un article que j'avais écrit dans le Ptit Hebdo à ce sujet et dans le but d'écarter le public francophone de cette rumeur qui s'est répandue à tort.
Peut-on surseoir au trempage d'un ustensile?
Il est une idée répandue au sein de certains milieux francophones selon laquelle il serait permis d'utiliser, à
titre exceptionnel et unique, un
ustensile de cuisine acheté à un non-juif sans l'avoir trempé auparavant dans un mikvé. Si tel était le cas, une personne ayant, par exemple, acheté un
ustensile un soir à une heure où le mikvé est fermé, aurait le droit de l'utiliser immédiatement, à condition toutefois de s'engager à le tremper dès le lendemain.
Il me semble que cette autorisation n'est pas fondée au plan halakhique, et voici pourquoi.
Notons d'emblée que l'usage unique et
exceptionnel d'un
ustensile ne nous dispense en aucune façon de le tremper. La preuve en est que selon le Rav Ovadia Yossef Chlita, celui qui utilise un plat en aluminium à usage unique allant au four et ayant été acheté à un non-juif, est tenu de le tremper avant de s'en servir. Si tel n'est pas le cas des ustensiles à usage unique en plastique, c'est pour la simple raison que le plastique n'est pas un matériau nécessitant d'être trempé, et non pas parce qu'ils sont à usage unique.
D'autre part, on ne peut en aucun cas justifier cette autorisation en prétendant qu'un
ustensile devant être trempé le lendemain peut être considéré comme ayant été déjà potentiellement trempé dès la veille. En effet, s'il est vrai que cette équivalence entre ce qui est en potentiel et ce qui est en acte est retenue à propos d'autres sujets (conférer par exemple Traité Ména'hot 102:b), nous n'en trouvons pas la moindre trace à propos du sujet nous concernant. Dès lors, celui qui utilise un
ustensile de la sorte avant de l'avoir trempé enfreint un commandement d'ordre thoranique (ou d'ordre rabbinique s'il s'agit d'un
ustensile en verre).
Il me semble que ce contre-sens peut trouver sa source dans cet enseignement des décisionnaires à propos du cas suivant:
Soit un marchand de vaisselle auquel un particulier emprunte assiettes, verres et couverts. Ce dernier est-il tenu de les tremper avant de les utiliser? Non, car en ce cas l'obligation du trempage n'incombe ni à l'emprunteur, car ces ustensiles ne lui appartiennent pas, ni au marchand, dès lors que celui-ci ne les détient qu'afin de les vendre et non afin de les utiliser pour se restaurer.
Certains décisionnaires ont pensé pouvoir étendre cette halakha à cet autre cas:
Soit le propriétaire d'une salle de réception ou d'un restaurant. Celui-ci a-t-il l'obligation de tremper sa vaisselle? En fonction de ce qui précède il semblerait qu'il n'y soit pas tenu. En effet, ses clients ne sont pas obligés de manger dans une vaisselle trempée, dès lors que celle-ci ne leur appartient pas. Quant au propriétaire, il n'y est pas non plus tenu, dès lors qu'il n'utilise pas cette vaisselle pour se restaurer lui-même.
Cependant, d'autres décisionnaires refusent d'assimiler ces deux cas de figure l'un à l'autre. Selon eux, le cas du propriétaire de restaurant diffère de celui du marchand de vaisselle en ce que le premier, serait-ce à fin commerciale, détient sa vaisselle pour servir ses clients, tandis que le second ne la détient que pour la vendre à ses clients et non pour leur servir une quelconque nourriture. Par conséquent, selon eux, le premier (le restaurateur) est tenu de tremper sa vaisselle, tandis que le second (le marchand de vaisselle) ne l'est pas.
Il apparaît donc que le contre-sens dont nous avons fait ici état trouve sa source dans l'idée selon laquelle l'autorisation de manger dans un restaurant dont la vaisselle n'a pas été trempée se justifie par le fait que l'on n'y mange qu'à
titre exceptionnel. Or, ainsi que nous l'avons montré, telle n'en est pas la raison.
En conclusion, et ainsi que cela me l'a été confirmé par le Rav Bakchi Doron Chlita et par le Rav Steinbou'h Chilita, il n'est en aucune façon permis d'utiliser un
ustensile de cuisine avant de l'avoir trempé dans un mikvé, serait-ce à
titre exceptionnel et même en ayant pris l'engagement de le tremper au plus tôt.
De même j'ai fait un cours sur cela sur Espace Thora
http://www.espacetorah.com/rabbin/37/4251
Je vous demande de bien vouloir répendre cette contre rumeur tout autour de vous!
Merci et Kol touv!