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Se prosterner dans la Quédoucha

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MBMB
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Faut-il se prosterner vers chaque côté quand on dit la quédoucha au moment de vé-kara zé elle zé vé-amar ? À quoi ça correspond ? Pourquoi le faire ?
Rav Binyamin Wattenberg
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Citation:
Faut-il se prosterner vers chaque côté quand on dit la quédoucha au moment de vé-kara zé elle zé vé-amar ? À quoi ça correspond ? Pourquoi le faire ?


C’est pour faire comme les malakhim qui sont ponim zé el zé (qui se tournent l’un vers l’autre) pour se consulter avant de dire trois fois Kadosh.

C’est aussi la raison pour laquelle on se tient pieds joints durant la Kdousha, afin de "ressembler" aux malakhim, au sujet desquels il est dit (Ye’hezkel 1,7) ורגליהם רגל ישרה [cf. Troumat Hadeshen (§28) et Kitsour Shoul’han Aroukh (§20,4) (comme on le fait durant la Amida -Shoul’han Aroukh O’’H §95,1)].

On a demandé à Rav Méir Mazouz pourquoi les gens s’inclinent des deux côtés à ce moment, il a répondu (Shout Vayikhtov Mordekhaï (Elmkayes) Netivot 2009, p.240, §71) qu’il ne sait pas mais que c’est probablement pour faire comme les Malakhim etc.

C’est aussi ce qu’a répondu rav ‘Haïm David Halévy dans son Shout Mayim ‘Haïm (II, §7).

Toutefois, si c’est l’interprétation répandue (considérant que Vekara zé el zé signifie aussi se tourner l’un vers l’autre), il convient de souligner que le Zohar (I,71b) nous dit que les malakhim se tournent vers les deux côtés puis au centre lorsqu’ils disent trois fois kadosh -et non avant de le dire.
[Voir aussi l’étonnante explication du Radak sur Yeshaya (6,7), qui pourrait s’accorder avec cela.]

Ce Minhag (de se tourner sur les côtés lorsqu’on dit Kadosh et non avant) a existé lui aussi, il est mentionné, au nom du Arizal, dans Amoud Haavoda (partie Vikoua’h Hashoel Vehameshiv §159 -éd. de 1863 réimprimée à N.Y. en 1988, daf 50d).
Il est aussi mentionné dans « Megalé Amoukot Bekavanat Hatfila » (recueil de R. ‘Haïm Liberzohn) (Berditshev 1902, daf 13a sv. Kesheyomar) et dans le Sidour de Lelov « Tfila Ledavid » comme indiqué par le Minhag Israel Torah (o''h §125,2) (qui mentionne ces trois sfarim).

Cependant, la question a été posée à Rav ‘Haïm Kanievsky (Daat Noté, tome 1, hil. Tfila, p.362, §301), quel est l’origine et quel est le sens de ce minhag ? Il a répondu qu’il ne sait pas qui a « inventé » ce minhag, que lui ne le pratique pas et qu’il ne sait pas d’où ça vient.

Quand ça commence comme ça, c’est décourageant, si même Reb ‘Haïm Kanievsky ne peut pas indiquer une source à ce Minhag, que voulez-vous que je vous dise ?

Ce n’est pas le seul à avoir une difficulté à indiquer le sens ou la source de cette habitude, voir aussi Shout Rivevot Ephraïm (III, §61) et (VII,§50,2) qui ne sait pas d’où ça sort.

Rav Mikhael Peretz dans Ossé Shalom (remarques sur Ben Ish ‘Haï) écrit (p.297, note 6) que certains disent qu’il n’y a aucune source à ce Minhag, et il n’est pas en mesure d’en apporter.

J’ai vu qu’on a demandé au Rav B. Y. Zilber (Shout Az Nidberou XIII, §32,3) s’il fallait commencer par s’incliner à gauche (comme en fin de Amida – Shoul’han Aroukh O’’H §123,1) ou à droite (en raison de la règle כל פינות שאתה פונה לא יהו אלא דרך ימין – Yoma 15b,17b,45a,58b, Zva’him 62b et Sotah 15b), en disant Vekara Zé el Zé Veamar dans la Kdousha, il a répondu qu’il ne sait pas et qu’il ne s’incline ni d’un côté ni de l’autre, et que ceux qui en ont le minhag pourront le faire dans l’ordre qu’ils souhaitent [c’est aussi ce qu’a répondu Rav Ovadia Yossef cité dans Hatfila Vehilkhoteiha (I,§22,30, p.314, note 57) que l’ordre n’importe pas] et qu’au lieu de faire des Dikdoukei Aniout (couper les cheveux en quatre sur des détails insignifiants), ils feraient mieux de faire attention à avoir la kavana de ce qu’ils disent et ne pas répondre à la Kdousha machinalement.

Du coup je n’ose plus dire qu’il m’apparait plus logique de commencer par la droite si on se base sur la comparaison avec les Malakhim, au sujet desquels il nous est dit dans le Zohar (I,71b) qu’ils se tournent vers le sud (et disent Kadosh), puis vers le nord (et disent Kadosh), et enfin vers l’est (et disent Kadosh) (et lorsqu’on est face à l’est, le sud est à droite).

J’ai aussi vu que le Shout Rivevot Ephraïm (V,§103,2) a écrit, avec assurance, qu’il faut commencer par la droite, mais étrangement, il a changé d’avis plus tard (VI, §52,2), il écrit qu’il ne se souvient plus où il avait vu qu’il fallait commencer par la droite (il ne semblait pas l’avoir lu, mais disait que c’était évident...), et qu’il change d’avis et dit qu’il faut commencer par la gauche, comme on le fait en fin de Amida.

J’en suis étonné car la raison pour laquelle on commence par la gauche en fin de Amida c’est parce qu’on se retire de devant D.ieu et on va donc considérer Son côté droit d’abord (et c’est notre côté gauche), mais cela ne s’applique pas vraiment ici a priori.
C’est aussi ce qu’écrit rav ‘Haïm David Halévy dans son Shout Mayim ‘Haïm (II, §7), que la raison invoquée en fin de Amida ne concerne pas notre cas.
Voir aussi en ce sens le Shout ‘Hemdat Avraham (Dayan) (III, §19, p.130) et le Yalkout Yossef (éd. 2004, o’’h V, §125,6, p.201).

-------------------- J'ouvre une parenthèse ----------------------------

[On pourrait imaginer justifier la position inverse, comme le fait R. Sheinfeld dans Osri Laguéfen (IX, p.207,4), mais ce n’est pas très convaincant.
Ou encore le Shout ‘Houkei ‘Haïm (Koenig) (III, §80,2) dans sa réponse adressée au Rivevot Ephraïm, où il explique en se basant sur le Malbim (Yeshaya 6,3) (mais il aurait pu se suffire du Targoum pour ce qu’il dit…) comme quoi les Malakhim se demandent mutuellement l’autorisation de dire Kadosh, et par conséquent ils se tournent certainement d’abord à gauche qui correspond à la droite du Malakh consulté...

J’ai beaucoup à redire.
Je me contente de demander qui lui a dit que chaque Malakh ne prend l’autorisation que d’un seul autre Malakh, et non de deux (ou de deux groupes) et c’est pourquoi il se tournerait des deux côtés ?
Et si c’est le cas, pourquoi imaginer que le malakh s’adresse à un malakh qui se trouve juste en face de lui (pour que la droite soit à gauche), il peut parfaitement s’adresser à un malakh qui est à sa droite.
Et surtout en citant le Malbim, cela anéanti un peu son raisonnement, car le Malbim vient expliquer par quel truchement le vocable « Vekara » se retrouve traduit (dans le Targoum) par « oumekablin ».
Le Malbim explique donc que les malakhim ressentent les influences des autres malakhim et c’est ainsi qu’un malakh ressent comme si l’autre l’avait invité à penser à la Kdousha de D.ieu (« dire Kadosh »). Du coup, dans ce contexte, difficile de dire qu’on imagine que le malakh se trouve face à un autre au point que sa droite soit sa gauche…

S’il fallait justifier la position inverse (commencer par la gauche), je le ferais plutôt de cette manière :
La raison pour laquelle il apparait plus logique d’opter pour un début par la droite, c’est en vertu de la règle citée plus haut : « כל פינות שאתה פונה לא יהו אלא דרך ימין », cependant, certains A’haronim ont réussi à l’interpréter à l’envers en disant que « Derekh Yamin » ne signifie pas vers la droite, mais depuis la droite (et donc vers la gauche).
Il y aurait plusieurs incidences pratiques à cette nouvelle lecture du Talmud, ces auteurs préconisent notamment d’inverser l’ordre des Naanounim du Loulav (est-nord-ouest-sud)…

Il y a à redire là-dessus aussi, car certains textes semblent indiquer que ce n’est pas la bonne compréhension, et nous trouvons des A’haronim qui s’insurgent contre cette interprétation erronée (selon eux).
Parmi eux, le Beèr Shéva (Sotah 15b) qui les traite de ‘hakhamim de pacotille et les accusent de se prendre pour le grand Sanhédrin en s’imaginant que nous les croirions sur parole même s’ils nous disent que la droite est la gauche… alors qu’ils vont à l’encontre des Anciens, le Mordekhaï, Maharam de Rothenburg, Troumat Hadeshen , Mahari Kolon, Maharil, Beit Yossef… qui tous expliquent qu’il s’agit d’aller VERS la droite, et la lecture simple du Talmud dans Sotah (15b) (ופנה לימינו) indique bien qu’ils ont raison. (c’est aussi ce qui ressort de Yoma 15B et 45a).

Je souligne au passage que le Beèr Shéva écrit dans sa préface qu’il a envoyé son Sefer pour demander des approbations aux sages de Tsfat, puis aux sages de Pologne et à leur tête son maître Rav Mordekhaï Yaffé l’auteur du Levoush.
Et il écrit que son Rav le Levoush ainsi que d’autres rabanim ont passé au peigne fin chaque micro détail de ce Sefer et n’ont rien trouvé à redire, ni à ajouter ni à retrancher.
Voilà ce qui m’étonne : le Levoush en personne, est un des plus connus pour sa position contraire aux Rishonim en expliquant (Levoush O’’H §676,5) que Derekh Yamin signifie depuis la droite vers la gauche…
Comment son élève (le Beèr Shéva) n’en était pas au courant ?
Et comment le Rav serait passé sur ce texte du Beèr Shéva qui l’insulte -lui, son propre Rav – sans broncher, et sans trouver à redire quoi que ce soit, ne serait-ce que pour alléger les reproches qui lui sont faits ? Ce qui me pousse à croire que le Levoush n’aurait peut-être pas exactement passé tout le sefer Beèr Shéva au peigne fin.

A part le Beèr Shéva et autres commentateurs qui s’opposent fermement à cette lecture contredite par les Rishonim, il y a un autre problème à cette « justification » que je propose (concernant Vekara zé el zé Veamar qui débuterait par la gauche) :
En effet, bien que les A’haronim lient notre question à cette règle (de כל פינות שאתה פונה לא יהו אלא דרך ימין), l’interpréter comme voulant dire « depuis la droite vers la gauche » ne justifierait pas la chose, car on pourrait dire que cette règle ne s’applique que dans le cadre d’un déplacement, d’une évolution, mais si l’on « revient au point de départ », ça n’a plus de sens, et l’avantage à donner à la droite serait d’une autre nature, en vertu de la priorité que l’on donne à la droite au titre de ‘hashivout, comme pour l’habillement.]

--------------------- Fin de parenthèse -------------------------

Rav Moutsafi dans Shivat Tsion (II, §7, sk.106) écrit que l’habitude la plus répandue est de se tourner d’abord vers la gauche (comme en fin de Amida) mais que son père (Rav Salman Moutsafi) disait de commencer par la droite et apportait comme preuve le Zohar que j’ai cité. (Il disait cela en donnant l’impression de ne pas avoir remarqué que notre minhag est de le faire pendant vekara zé el zé et non pendant Kadosh Kadosh Kadosh…).

J’ai lu dans les remarques de Rav Méir Mazouz sur le Ben Ish ‘Haï (I, Trouma §5) (p.545, note4) qu’il dit lui aussi que c’est uniquement en fin de Amida que l’on commence par la gauche car on considère que c’est la droite par rapport à D.ieu, mais que pour Vekara zé el zé veamar on commencera par la droite.
Idem pour « Boï Kala » et (pour certains) « Yamin Ousmol Tifrotsi » du vendredi soir, et pour le cohen dans Birkat Cohanim (on commencera par la droite).

On retrouvera encore cette position de Rav Méir Mazouz dans son Shout Mekor Neéman (I, §125) où il précisera que la « priorité à droite » concerne aussi Be’hayeikhon Ouvyomeikhon du Kadish (pour ceux qui ont le minhag de se tourner des deux côtés à ce moment).

Pour Boï Kala, a priori, on pourrait appliquer la même logique que pour la fin de la Amida, et s’imaginer face à la Shkhina, et donc commencer par la gauche.
C’est d'ailleurs ce que faisait le ‘Hakham Tsvi, cité (par son fils) dans le Sidour Beit Yaakov (daf 146a) et aussi dans Likoutei Maharia’h (éd. 1991, II, p.331).

En tout cas, le Minhag ancien où l’on se tournait ainsi lorsqu’on disait Kadosh (et non lors de Vekara…), tel que rapporté par les trois Sfarim que j’ai indiqués plus haut au nom du Minhag Israel Torah (le Amoud Haavoda au nom du Arizal, le Megalé Amoukot Bekavanat Hatfila et le Tfila Ledavid), correspond exactement à ce qui ressort du Zohar (I,71b) que j’ai mentionné, et il s’agit de commencer par se pencher vers la droite avant la gauche.

Rav Wolbe écrit dans Alei Shour (II, p.431) que les Malakhim sont en paix entre eux et se respectent (voir aussi Yalkout Shimoni Yeshaya §404), c’est pourquoi, lorsqu’on s’apprête à dire la Kdousha « comme les malakhim » (נקדש את שמך בעולם כשם שמקדישים אותו בשמי מרום), on se tourne autour de nous pour "vérifier" qu'on aime bien tous ceux qui nous entourent... (dans ce cas, le rabbin qui siège isolé au Mizra’h n’aurait pas à se tourner puisqu’il n’y a personne à côté de lui, ou encore, ceux qui se trouvent sur les côtés de la synagogue n’auraient qu’à se tourner d’un seul côté…).
Selon cette vision des choses, effectivement, peu importe l’ordre (droite ou gauche d’abord).

Pour ma part, je préfère expliquer qu’en imitant les Malakhim qui se consultent mutuellement, on souhaite ancrer en nous le respect de nos semblables, même lorsqu’on est certain de bien agir (comme lorsqu’on proclame D.ieu Kadosh), il est important de toujours respecter et honorer les autres. (Ainsi, cette explication concerne aussi celui dont la place à la synagogue est près du mur…)

J’ai vu une idée quelque peu ressemblante dans le Kaf Ha’haïm (Palacci) (§15,1) concernant un minhag (je ne connais personne le pratiquant encore de nos jours) qui consiste à se faire mutuellement des signes (de rapprochement) de la main avant la Amida, qui serait aussi inspiré de la bonne entente entre les malakhim qui prennent l’autorisation de leurs « congénères » de formuler leur prière et que ces signes correspondants au « vekara zé el zé » matérialisent la bonne entente qui règne parmi les fidèles et leur esprit unifié.

Voir encore Yemin Moshé (Kountras Ish Iter §25, note 35), et Otsar Hatshouvot (d’un Talmid ‘Hakham anglais que je remercie, R. Shlomo David Klein שליט"א, qui m’avait envoyé son sefer il y a une dizaine d’année) (I, §83, p.267) où il parle de cette question de l’origine de ce minhag.


PS: J'ai été long et n'ai pas le temps de me relire pour corriger les éventuelles fautes, sorry.
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