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Ségoula du Tehilim 13

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jchriqui
Messages: 13
Bonjour

Avez-vous déjà entendu parler d'une segoula, à priori du Ben Ish Haï ou du Matok Midvash, de lire 13 fois le tehilim 13 pendant 13 jours, avec des variantes à 13h dans le département des Bouches-du-Rhone ?

De manière générale, comment devons-nous nous positionner sur ce type de pratique souvent collective ? Vaut-il mieux les faire, puisqu'on n'y perd rien ?

Enfin, y a-t-il une différence d'approche entre un homme et une femme concernant l'importance du temps alloué à la lecture de Tehilim ?

Merci.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6656
Citation:
Avez-vous déjà entendu parler de la segoula, à priori du Ben Ish Haï ou du Matok Midvash, de lire 13 fois le Tehilim 13 pendant 13 jours, avec des variantes à 13h dans le département des Bouches-du-Rhône ?

Ce n’est pas du Ben Ish ‘Haï, c’est une Segoula du Rav Daniel Frish (1935-2005), l’auteur du Matok Midvash.

Il me semble que personne avant lui n’avait parlé d’une telle ‘Segoula’, elle est donc très récente puisque ce Rav est Niftar au XXIème siècle.

C’est un peu à la mode de nos jours ces Segoulot chiffrées, lire 13 fois le Tehilim 13, par 13 personnes, pendant 13 jours, le 13 du mois (idéalement du 13ème mois en Adar Beit, sauf si c’est un vendredi 13), en commençant à 13h13, etc. (l’ajout « Bouches-du-Rhône » n’est pas vendeur, il ne plaira qu’aux marseillais).

Ça ressemble un peu à la Segoula de la 9ème heure, du 9ème jour, du 9ème mois, de la 9ème année… (celle-ci trouve sa source dans le Brit Menou’ha) et il y en a une autre, moins connue, avec le 7.

A ce train, d’ici quelques siècles, on aura déjà une Segoula sur chaque Mizmor de Tehilim.
J’attends celui qui dira de lire 119 fois le Tehilim 119…

Il faut aussi intégrer que la numérotation des Tehilim ne comporte pas vraiment un aspect spirituel ; en faisant l’effort de lire le Tehilim 13, le 13 du mois etc. on ne se rend pas compte du ridicule : le Tehilim 13 n’est pas forcément le Tehilim 13 !

En effet, les deux premiers chapitres de Tehilim sont considérés par ‘Hazal (Brakhot 9b) comme étant un seul chapitre
[On y dit que tout chapitre qui était cher aux yeux de David, commence et termine par le mot Ashrei, comme le premier chapitre de Tehilim qui commence par Ashrei Haïsh (Tehilim I, 1) et termine par Ashrei Kol ‘Hossei Vo (Tehilim II, 12) CQFD].

Donc le 13ème c’est le Tehilim 14 !
Vous n’avez plus qu’à recommencer votre lecture Segoula 13 fois avec le Mizmor 14.

Aussi, certains pensent que le Tehilim 9 et 10 n’en sont qu’un.
(du coup le 13 c’est le 15 ! recommencez à nouveau votre segoula !).

En fait, les ‘Hazal disent qu’il y a 147 Mizmorei Tehilim [Yeroushalmi Shabbat (§XVI, 1 daf 79b), voir aussi Massekhet Sofrim (§XVI, 11), Midrash Sho’har Tov (§XXII, sv.Veata Kadosh) (voir aussi §CIV, 1 qui indique 145 Mizmorim…)], or, selon notre découpage actuel, nous en avons 150… Il y a donc probablement 6 Mizmorim à regrouper en 3.

Voilà de quoi chambouler les Segoulot basées sur la numérotation des Tehilim… (Ainsi que la notion de lire 2 fois tout le Sefer pour obtenir la Guematria de Kaper, 300…)

Le Ben Ish ‘Haï, ou Rabbi ‘Haim Palacci et autres rabbanim de cette époque, ont diffusé plusieurs Segoulot.
Il faut comprendre qu’à leur époque, elles étaient nécessaires et bénéfiques.
Par contre, de nos jours, en France, il est souvent (pas toujours) nocif d’adopter ces Segoulot (kal va’homer pour les plus récentes), ça contribue à fragiliser le judaïsme, affaiblir la Yirat Shamayim et diminuer l’importance qu’il convient de donner au Limoud Hatorah.

La Avodat Hashem doit être construite autour de l’étude du Shas et de la Halakha, et du Tikoun Hamidot, les Segoulot ne doivent pas occuper la place bien trop importante que beaucoup leur confèrent.
Celui qui veut pratiquer une Segoula de lecture de Tehilim, a déjà largement le choix parmi les Segoulot "anciennes" pour qu'il ne soit pas nécessaire d'en adopter de nouvelles. Par exemple il peut lire les 10 Tehilim du Tikoun Haklali.

(L'avantage d'une "ancienne" segoula, à part la notoriété de son "auteur", c'est que nos ancêtres l'ont déjà pratiquée. De sorte que ça fera moins office de déviateur de judaïsme. Je ne sais pas si tout le monde va comprendre cette parenthèse. Ceux qui ne la comprennent pas, laissez ça pour plus tard, à relire dans 10 ans.)

Citation:
De manière générale, comment devons-nous nous positionner sur ce type de pratique souvent collective ?


Chacun a sa « Guisha » face à ces pratiques.
Loin de moi d’interdire à quiconque de lire des Tehilim, mais si l’on me demande mon conseil sur cette Segoula du Tehilim 13, je dirais de lire un AUTRE chapitre de Tehilim, et ne pas suivre ce genre de ‘Segoulot’, à moins d’être un proche du Rav Frish.

De manière générale, DE NOS JOURS, suivre ces Segoulot n’amène pas forcément de bonnes choses.

Citation:
Vaut-il mieux les faire, puisqu'on n'y perd rien ?

Si, on perd.
Et on perd beaucoup.
On participe à la dérive du judaïsme qui est (ou devrais-je dire qui était ?) une religion axée sur le Tikoun Hamidot et le Tikoun Hanefesh.

Qu’il y ait un peu de folklore, des Minhaguim, des Segoulot, c’est sympa, mais la nouvelle tendance qui vise à se concentrer sur des (pseudo-)Segoulot et leur attacher toujours plus d’importance, ne m’inspire rien de bon.

Des gens, depuis 2 ou 3 décennies à peine, ont développé et répandu des pratiques qu’ignoraient quasiment tous nos ancêtres.
Comme la Seoudat Aménim et autres réunions et inventions modernes, les voyages sans fin sur des Kivrei Tsadikim dans des pays improbables, etc. etc.

Je ne dis pas que ce soit une Aveira de répondre Amen à une Brakha, ou d’aller prier sur la tombe d’un Tsadik, bien entendu, je dis juste que la tournure que ça prend fait dévier le judaïsme de son rôle, et écarte les juifs de l’essentiel de la Avodat Hashem.

Bien entendu, il sera parfois préférable que des femmes se réunissent pour une Seoudat Aménim à ce qu’elles se réunissent au restaurant (ou pire) dans une ambiance nettement moins propice aux bonnes Midot (-si c’est le cas).
Idem, celui qui voyage pour visiter les Kivrei Tsadikim et y prier, sera toujours mieux que celui qui voyage à l’affut de nouvelles Taavot.
Il faut remettre chaque chose dans son contexte, je dis seulement que ce n’est pas le Derekh de nos ancêtres.

En conclusion, je ne viens pas interdire ces ‘Segoulot’, que celui qui pense se rapprocher de D.ieu par ces Segoulot, les suive.
Je dis juste que si l’on veut avoir mon avis personnel (-pour ce qu’il vaut, sans prétention de ma part ni mépris h’’v vis-à-vis du Rav Frish ou autre rav friand de Segoulot), ça n’est pas le chemin qui mène à D.ieu.

Comment savoir si ces Segoulot nous rapprochent de D.ieu ? Je dirais déjà simplement d’analyser ceci : est-ce que ces personnes qui se réunissent dans une Seoudat Aménim deviennent meilleures ? plus calmes ? plus longanimes ? plus tolérantes ? plus gentilles ? plus respectueuses de la pensée d’autrui ? Est-ce qu’elles s’énervent moins qu’avant avec leurs conjoint et enfants? Gagnent-elles en humilité ?
Si ce n’est pas le cas, c’est que ces cérémonies ne les rapprochent pas de D.ieu.

Vous me direz qu’il y a aussi des gens qui étudient la Gmara et ça ne les rend pas plus patients, plus humbles, plus gentils, plus respectueux d’autrui, moins coléreux, etc.
Je vous répondrais que je n’ai pas dit que tous ceux qui étudient la Gmara le feraient de la bonne manière et avec les bonnes intentions, par contre, la véritable étude de la Gmara est de nature à parfaire les Midot.

Citation:
Enfin, y a-t-il une différence d'approche entre un homme et une femme concernant l'importance du temps alloué à la lecture de Tehilim ?

Dans l’absolu, non, mais depuis longtemps les femmes surpassent les hommes en lecture de Tehilim.
Les hommes quant à eux se doivent de s’investir plus dans l’étude du Talmud, ils ont forcément moins la possibilité de lire des Tehilim.
Voilà pourquoi les femmes, généralement, en lisent plus.
Mais un homme qui n’étudie pas le Talmud devrait en lire autant qu’une femme.
Et c’était souvent le cas dans le passé, celui qui ne s’investissait pas dans la Gmara lisait beaucoup de Tehilim.
jchriqui
Messages: 13
Merci Rav pour votre réponse !

Pour aller un peu plus loin , avons-nous une idée de la logique ou des. mécanismes d'innovations qui se cachent derrière ce type de seguloth ? Il me semble que le Rav Daniel Frish était un tsadik et un talmid hakham, on ne peut donc pas imaginer qu'il ait fait complètement n'importe quoi (je n'affirme pas car je ne le connais pas personnellement).

Est-on dans une logique de symbolique et une forme de kirouv populaire anticipé par ces rabbanim ou plutôt dans une démarche plus sophistiquée ?

Pouvons-nous imaginer qu'il y ait une logique compréhensible derrière ce type de hidoush segoulatique ou doit-on plutôt chercher du côté d'une démarche "marketing" (qui semble bien fonctionner par ailleurs) ?
aralé
Messages: 147
Kvod HaRav Wattenberg,

Vous dites : judaïsme qui est (ou devrais-je dire qui était ?) une religion axée sur le Tikoun Hamidot et le Tikoun Hanefesh.

Le Tikoun Hamidot je vois bien l'objectif à atteindre, ce que je dois réparer en moi, et le moussar offre des outils pour progresser. Et je mesure les progrès.

Le Tikoun Hanefesh, pouvez-vous préciser de quoi il s'agit concrètement ? De même que pour les midot, comment appréhende-t-on l'objectif à atteindre, mesure-t-on les progrès, quels outils pour progresser, etc.

Merci par avance
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6656
A Aralé :

Citation:
Vous dites : judaïsme qui est (ou devrais-je dire qui était ?) une religion axée sur le Tikoun Hamidot et le Tikoun Hanefesh.
Le Tikoun Hamidot je vois bien l'objectif à atteindre, ce que je dois réparer en moi, et le moussar offre des outils pour progresser. Et je mesure les progrès.
Le Tikoun Hanefesh, pouvez-vous préciser de quoi il s'agit concrètement ? De même que pour les midot, comment appréhende-t-on l'objectif à atteindre, mesure-t-on les progrès, quels outils pour progresser, etc.


Le Tikoun Hamidot consiste à parfaire ses Midot.
Le Tikouon Hanefesh consiste à parfaire ses Déot, c-à-d son intellect, ses Hashkafot.

Un homme aux Midot corrigées mais qui accuse des erreurs de hashkafa, est encore imparfait.
La proximité à D.ieu passe par le Tikoun hamidot comme par le Tikoun Hanefesh, les deux sont nécessaires.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6656
A Jchriqui:

Citation:
Pour aller un peu plus loin , avons-nous une idée de la logique ou des. mécanismes d'innovations qui se cachent derrière ce type de seguloth ? Il me semble que le Rav Daniel Frish était un tsadik et un talmid hakham, on ne peut donc pas imaginer qu'il ait fait complètement n'importe quoi (je n'affirme pas car je ne le connais pas personnellement).
Est-on dans une logique de symbolique et une forme de kirouv populaire anticipé par ces rabbanim ou plutôt dans une démarche plus sophistiquée ?
Pouvons-nous imaginer qu'il y ait une logique compréhensible derrière ce type de hidoush segoulatique ou doit-on plutôt chercher du côté d'une démarche "marketing" (qui semble bien fonctionner par ailleurs) ?


Je pense que vos prémisses ne correspondent qu’imparfaitement à une réalité bien plus subtile.
Vous considérez comme axiome de base qu’une Segoula inventée par un Tsadik doit nécessairement correspondre à une réalité tangible.

Ça ne marche pas exactement comme ça.
Il peut y avoir des Segoulot qui ne sont ni « n’importe quoi », ni non plus « une réalité attestée et véridique ».

Disons que certaines personnes peuvent voir un rapport entre certaines choses, et elles ont « raison » selon leur prisme et leur conception du réel.
Mais la conception du réel n’est pas totalement identique chez chacun, surtout chez les kabbalistes.

C’est un peu difficile à expliquer, car si l’on considère que la réalité est relative, on perd vite pied.
Disons que la réalité n’est pas relative, mais que la perception de la réalité l’est, en fonction des prismes de chacun.
Et s’il faut considérer la conception du réel de la majorité, et dénier tout sérieux à ce qui ne s’y insère guère, alors effectivement, cette Segoula c’est du « n’importe quoi ».
Mais je pense que c’est une vue erronée, il faut voir les choses de plus haut.

Un kabbaliste peut voir entre certaines choses des liens qui échappent au commun des mortels, sans pour autant que ce lien soit réel dans une conception « classique » de la réalité.
De ce fait, le kabbaliste ne dit pas « n’importe quoi » (car cela suit une certaine logique et respecte une certaine cohérence), mais ce qu’il dit reste irréel.

[Bien qu’il puisse aussi y avoir d’autres « Segoulot » où un lien REEL existe objectivement tout en étant caché/dissimulé aux yeux des non-initiés.
Disons qu’un premier élément qui nous permettrait de faire ce tri, serait de distinguer entre les Segoulot prônées par les ‘Hazal et celles inventées par les A’haronim.
Puis, même dans ce dernier groupe, distinguer celles qui sont reconnues et admises par plusieurs autorités, de celles qui sont érigées en Segoula par un kabbaliste isolé, quand bien même Tsadik et sincère.]
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6656
J’ajoute encore un 3ème message sur ce fil pour ce soir.

Plus haut j’écrivais :

« Voilà de quoi chambouler les Segoulot basées sur la numérotation des Tehilim… (Ainsi que la notion de lire 2 fois tout le Sefer pour obtenir la Guematria de Kaper, 300…) »

Concernant cette idée de lire 2 fois le sefer Tehilim pour obtenir cette guematria, c’est déjà mentionné dans le Maté Ephraïm (§581, 8), et certains ont déjà souligné l’inconséquence de cette valeur numérique, voir ce que j’ai écrit à ce propos dans mes notes sur le Safa Leneemanim (Varsovie 2021, p.251).
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