Faut-il ou non fêter les anniversaires ?
Vaut-il mieux les passer sous silence ?
C'est un sujet très largement débattu dans nos sfarim, certains sont persuadés que cette coutume est purement et simplement "non-juive" et qu'il ne faut surtout pas la suivre, mais je crois que c'est plutôt par ignorance de ce qui a été écrit sur le sujet.
Il y a tellement de choses qui ont été dites sur ce thème qu'on a du mal à s'y retrouver.
Je vais tenter bez"h une synthèse des différentes positions rabbiniques et leurs raisons, afin que chacun puisse se faire une idée et relativiser certaines appréhensions, car en survolant la littérature rabbinique, j'ai vu un peu tout et son contraire.
Je vais tenter d'être précis dans les références afin de permettre au lecteur de s'abreuver "à la source", d'autant que je ne pourrais pas systématiquement rapporter le détail des idées mentionnées dans chaque ouvrage, sans quoi nous obtiendrions un livre volumineux.
Afin de le rendre plus digeste, je vais sectionner mon propos en chapitres:
1) la notion de Mazal/chance liée à ce jour
2) ceux qui sont "contre"
3) ceux qui sont "pour"
4) comment le fêter
5) la conclusion.
BON MAZAL
Nous trouvons une notion de chance ce jour-là, de bon mazal ; il est dit dans le
Yeroushalmi Rosh Hashana (III, 8) que Amalek plaçait des soldats au front le jour de leur anniversaire car ils auraient alors un bon « mazal » et Moshé a "
mélangé les mazalot", le
Korban Haeda explique qu'en levant les mains, Moshé "mélangeait/perturbait" les mazalot pour contrer le bon mazal des guerriers d'Amalek.
Cette idée se retrouve chez le
'Hida qui écrit
('Homat Anakh, Iyov 3) au nom des kabbalistes que le jour de son anniversaire est un jour de bon mazal.
Ça expliquerait le souhait consacré lors de ce jour : Mazal Tov !
(voir aussi Ben Yehoyada Brakhot 28a, qu'un miracle en ce jour ne diminue pas les mérites du bénéficiaire…)
Il y a aussi
rabbi Tsadok Hacohen Rabinovicz de Lublin dans son
Ressissei Layla (Divrei 'Halomot 20) qui écrit qu'un homme n'a rien à craindre le jour de son anniversaire et si la
gmara Kidoushin (38a) nous dit que les Tsadikim décèdent le jour de leur anniversaire
(et qu'il y a donc à craindre !), c'est parce que pour eux, la mort est une accession à un niveau supérieur
(et est donc positive).
[Je doute qu'ils en fussent tous persuadés, il semblerait que certains tsadikim n'étaient pas si joyeux de quitter ce monde. L'histoire que l'on raconte sur le
Gaon ou sur le
‘Hazon Ish (ou autres, selon les versions), qui aurait pleuré avant de mourir en disant regretter un monde où l'on peut acheter des mitsvot pour quelques pièces comme les tsitsiot, nous montre bien que les sentiments sont partagés…].
Je préfère une explication plus plausible du
Maguen Avraham dans son
Zayit Raanan sur le
Yalkout Shimoni ('Habakouk 3) qui répond à la même question en disant que c'est une bénédiction pour le tsadik de décéder le jour de son anniversaire car «
D.ieu complète les années du juste au jour près » (cf.
Kidoushin 38a, Sotah 13b et Rosh Hashana 11a).
(ce qui revient à dire qu'en décédant ce jour-là, cela indique qu'ils auraient pu mourir avant mais qu'ils ont bénéficié de prolongations, c'est donc « positif »).
Mais il faut signaler que certains auteurs considèrent que ce bon mazal en ce jour, ne concerne que les non-juifs (comme Amalek) (cf.
Taam vadaat Bereshit XL, 20), cependant, voir
Nefesh 'Haya (O"H §580).
Voilà peut-être pourquoi nous trouvons plusieurs auteurs très réticents quant à l'idée qu’un juif puisse fêter un tel jour.
CONTRE :
Voir par exemple le
Torah Shleima (Kasher)(Vayeshev p.1522 note 49) qui cite un manuscrit
('Hemat Ha’hemda) commentaire sur le passouk
(Bereshit 40, 20) qui dit qu'aujourd’hui encore,
les non-juifs ont l'habitude de fêter les anniversaires (on en comprend que les juifs, non).
On comprend même du
Rav Aharon Zeldner dans son
Maté Aharon (p.68) qu'offrir un cadeau à un ami le jour de son anniversaire serait une coutume non-juive à ne pas pratiquer.
Certes, dans la
Gmara (Moed Katan 28a) il nous est conté que
Rav Yossef fêta ses 60 ans, mais cela indique qu'il ne devait pas fêter les anniversaires - ni lui, ni les autres Amoraïm - et c'est seulement celui de 60 ans qu'il souhaita fêter car - comme il le dit - cela l'exclu de la peine de Karet qui consiste à mourir avant 60 ans.
Le
Min'hat Elazar (le Rabbi de Munkasz ) dans son
Divrei Torah (V, §88) écrit qu'il n'y a rien à fêter le jour de l'anniversaire puisque les Sages nous disent
(Erouvin 13b) qu'il eut été préférable à l'homme de ne pas naître.
[Cet argument semble étrange lorsqu'on constate différentes expressions dans les prières et bénédictions qui remercient D.ieu pour la vie qu'Il nous donne (le Gomel par exemple), ce qui semble indiquer que la vie ait son intérêt…
De plus, le Ramban (Shemot XIII, 16) écrit qu'il faut remercier D.ieu de nous avoir créés.
Il faut donc tempérer l'enseignement cité (de Erouvin 13b), on ne peut pas l'interpréter comme si D.ieu avait commis une erreur de nous avoir créés !
C'est uniquement vis-à-vis de NOUS les hommes qu'il eut été « noa'h », agréable, plus facile, si nous n'avions pas été créés.
Plus facile, certes, mais pas « préférable », car D.ieu sait ce qu'Il fait.]
C'est aussi la position de nombreux auteurs, comme:
le
Rav Horovitz de Strasbourg (-puis au Badats de Jérusalem) dans son
Shout Kinian Torah Bahalakha (III, §21),
du
Arougat Habossem (II, §215),
du
rav Abelsohn (Shout Knesset Avraham Yoel, §6 p.116 –relié avec le shout Ets 'Haim) (et voir aussi dans son
Knesset 'Hakhmei Israel, kountras 3, §66, 4 daf 65b et Kountras 6, §115, 1 daf 125a),
de
R. Tsadok Hacohen (Likoutei Maamarim §13, p.140),
du
Rabbi de Klausenbourg-Sanz (Mikhtevei Thora II, 82 p.55),
de
Rav Shlomo Zalman Bloch (Hatsadik R. Shlomo, p.29, ot 18),
du
rav Patsonovsky (Pardes Yossef Vayeshev Milouim p.48 et dans la nouvelle édition, Bereshit II, p.777),
du
Rav Dunner (Leket Sheélot Hametsouyot IV, p.13 et Kol Hatorah 65, p.164),
du
Rav Stern (auteur du Beèr Moshé) et du Rav Wozner (auteur du Shevet Halévy) tous deux cités par le
Rav Harfenes dans Beit Vaad La'hakhamim (adar 2009, p.356)
et du
shout Lehorot Natan (IX, §5, 9) (ce dernier tolère un repas d'anniversaire s'il est exclusivement réservé aux érudits, comme l'a fait
Rav Yossef dans
Moed Katan 28a – cf.
Lehorot Natan IX, §5, 11).
Néanmoins, concernant le
Arougat Habossem, il faut noter que son fils
(Shout Migdalot Merka'him, O"H, §31) relativise grandement cette opposition de son père en expliquant le contexte très particulier de la rédaction de ce responsum et le cas spécifique de la personne qui était concernée.
Voir encore le
Shout Vayaan Yossef (§73) dans le même sens en minimisant l'opposition du
Arougat Habossem qui ne s'opposait qu'aux grandes fêtes avec publication, mais qui n'avait rien contre une petite seouda intime à la maison.
(voir aussi
Kvod 'Hakhamim (Jérusalem 1982- p.208, maamar de rav Méir Eisenstein) qui explique le
Arougat Habossem dans le même sens).
Voir encore le
Hapéles (shana III, 1903, p.633) contre les anniversaires et où est cité le
Beer Its'hak de
rav Ist'hak Ber Levinzohn (p.34) qui trouvait que les anniversaires étaient des fêtes non-juives qui frisent la Avoda zara, malgré que ce Rav lui-même frisait la Haskala !
[le Rav H.D. Halévy (Assé Lekha Rav IV, §26) ne l'a pas lu, mais écrit qu'il est évident qu'il n'y a aucun issour Avoda Zara ni de 'Houkot Hagoyim, car la partie Avoda Zara qu'il y avait chez certains idolâtres, c'est les sacrifices qu'ils apportaient à leurs dieux, mais fêter un anniversaire est en soi une idée saine.]
Il y a encore le
Kinian Torah Bahalakha (III, §21) qui s'oppose lui aussi à fêter les anniversaires, cite à l'appui le
Rabbi de Vizhnits, le Ahavat Israel, qui a refusé de faire une seouda pour son anniversaire de 70 ans et s'est contenté de réciter beaucoup de Tehilim et Bakashot.
Il cite aussi son grand-père
Rav Pin'has 'Haim Horovitz, le Pit'ha Zouta, qu'il surprît le jour de son anniversaire - le 18 tamouz 1938 - à pleurer en lisant des Tehilim.
Il expliqua à son petit-fils qu'il pleurait sur les souffrances vainement causées à sa mère lors de sa naissance, 80 ans plus tôt…
[Toutefois, voyez comment le Rav Eisenstein (dans Zikhron Shlomo, p.214 et suivantes) repousse chaque argument du Rav Horovitz.]
C'est aussi le cas de
Rav Israel de Rouzhin qui a refusé énergiquement la fête que son épouse lui avait préparée par surprise et a congédié tous les invités (cf.
Shout Knesset Avraham Yoel - Abelsohn - §6 p.116 et Knesset 'Hakhmei Israel §115, 1 daf 125a).
Pas qu'il faille être ashkenaze pour s'opposer aux fêtes d'anniversaires. Le
rav Khalfon Moshé Hacohen dans son
Yad Moshé (Vayeshev, §63 daf 70b) écrit que l'habitude de fêter les anniversaires est très présente en Europe, mais que nous autres (les juifs) marquons plutôt cette date par le jeûne et le repentir, préférant en cela l'utile à l'agréable.
Voir aussi le
Gdoulat Yehoshoua ('helek 2 , Hakdama).
Et c'est aussi l'avis du
Rav Shmouel Mohliver (Midei 'Hodesh Be'hodsho, II, Jérusalem 1957, p.192)(Shana Beshana 1976, p.237).
Le
Otsar Kol Minhaguei Yeshouroun (4ème éd. §XXVII, 4 , p.60) (3ème éd. St Louis 1917-8, Hashmatot §14, p.304) considère que fêter son anniversaire est une habitude non-juive et le seul que l'on trouve fêtant son anniversaire dans le 'houmash est un pharaon.
[Il précise aussi que lorsque les disciples du
Rav Its'hak El'hanan Spektor de Kovno, en 1889, ont voulu lui fêter ses 50 ans de rabbinat, il s'y opposa fermement –
mais là c'est un anniversary et non un birthday.
Je précise quant à moi qu'il y a une faute de frappe sur le renvoi à la note de l'auteur dans sa 4ème édition, p.60, sur le nom du Rav Its'hak El'hanan il y a un "1" et dans la note 1 on lit qu'il est né en Italie en 1679, mais c'est une erreur, la note 1 se rapporte au Rav Lampronti et il faut remplacer ce 1 par un 2.
Il y a aussi erreur lorsqu'il parle de 50 ans, c'était pour les 25 ans de rabbinat à Kovno, comme nous le voyons écrit - à l'époque - dans le Hatsfira (n°68) et plus tard dans Shana Beshana (1976, p.237), même si ça faisait déjà 52 ans qu'il était rabbin dans différentes villes.
Le refus du Rav a été publié lui aussi dans
Hatsfira (n°77 - 11 Nissan 1889), voir encore à ce sujet le
Toldot Its'hak (de rav Yaakov Lifshitz) (p.114) et voir aussi le
Darkenou (shana II, guilion 3, p.16) et le
Pardes Yossef (Vayeshev Milouim p.48) qui cite plusieurs opposants aux anniversaires,
dont « le Toldot Its'hak d'un rav italien avec la haskama du rav de Kotna ».
Ce sefer m'est inconnu, il y a bien un Toldot Its'hak du rav Its'hak Luzzato mais c'est un livre de poèmes et chants qui ne comporte ni approbation du rav de Kotna, ni d'opposition aux fêtes d'anniversaire.
En fait, le Pardes Yossef s'est embrouillé en copiant les références sur ce sujet à partir du Darkenou (op cit) qui indique le Toldot Its'hak PUIS le Kokhav Miyaakov d'un rav italien avec approbation du rav de Kotna. (Dans le Kokhav Miyaakov c'est p.54)]
(Je souligne au passage que de nombreux autres rabanim ne voyaient pas d'inconvénient à ce que l'on fête les années de leur rabbinat ou de leur action pour la Torah, souvent par la publication d'un sefer Hayovel, comme pour
R. Shimon Schkopp pour ses 50 ans d'enseignement
(voir ce qu'écrit dans ce recueil le rav Moshé Avigdor Amiel. Il y aura d'ailleurs plus tard un sefer Hayovel pour ce rav Amiel aussi, en 1943), Rav Méir Shapira de Lublin (en 1930) pour ses 20 ans au service de la Torah,
Rav Fishman-Maïmon pour ses 50 ans (en 1926), un sefer Hayovel pour les 70 ans du
Rav Rabinovicz (N.Y. 1930), un autre pour les 70 ans de
rav Azriel Hildesheimer (
Shaï Lemora).
Pour son rav,
rav Its'hak Bernays, on a fêté en grande pompe les 25 ans de rabbinat à Hambourg en 1846. Voir
Shana Beshana 5736 p.238)
On trouve aussi des rabanim opposés à la célébration d'un anniversaire (rond) de décès d'un tsadik !
En 1890, certains ont voulu célébrer les 50 ans du décès du
'Hatam Sofer, faire une grande Hiloula pour marquer le coup, mais les élèves du
'Hatam Sofer s'y sont opposés, il s'agissait de
Rav Naphtali Sofer (voir début du
Kountras Beth Ephraïm qui est imprimé en fin du
Et Sofer tome 2) et de
Rav Yehouda Modern (étrange patronyme pour un disciple du 'Hatam Sofer, symbole de l’opposition au modernisme déviant de la massoret) pour qui c'est une habitude non-juive et directement inspirée dans ce cas des Maskilim qui avaient récemment (en 1886) fêté les 100 ans du décès de leur maître
Mendelssohn.
« Hiloula » oui, mais « particulière pour les 50 ans », non !
Voir ses mots dans
Leket Shoshana (1942, §19) et dans
Beth Vaad La'hakhamim (Nissan 5771, p.463).
C'est l'idée qu'il y aurait une raison particulière de marquer le coup lors des années symboliques parce que « rondes », qui déplaisait à ces rabanim.
Personnellement, je ne vois pas trop pourquoi cette notion devrait être classée comme hérétique/non-juive, si ce n'est - ce qui les a motivés à mon sens - en raison de la ressemblance avec les Maskilim dont les aspirations étaient rarement saintes.
Les Rabanim à cette époque faisaient tout pour écarter leurs ouailles des Maskilim afin d'enrayer la propagation du « virus » Haskala, c'est une sorte de disposition prophylactique.
Ça aurait donc été purement conjoncturel, ainsi, de nos jours « l'interdiction » ne serait plus
de mise, mais
démise.
C'est probablement ce qui pourrait expliquer que pour les 100 ans du décès du
'Hatam Sofer (en 1940), il y a eu un
Sefer Hazikaron publié ainsi qu'une grande Hiloula à Presbourg, présidée par
R. Akiva Sofer en personne.
J'en reviens à l'idée du
Otsar Kol Minhaguei Yeshouroun (op cit) pour qui fêter un anniversaire n'est pas juif.
Il semble que ce soit aussi l'avis du
Aderet dans son
Nefesh David (p.129) qui n'appréciait pas qu'on lui souhaite un joyeux anniversaire, que ça n'a jamais été une fête chez les juifs et nous ne trouvons ce jour fêté dans le 'houmash que chez pharaon, alors que la
Gmara Erouvin (13b) nous dit qu'il aurait été préférable de ne pas naître…
Il souligne tout de même que les Tsadikim ont de quoi se réjouir de leur naissance, selon l'avis du
Tosfot (Avoda Zara 5a).
Le
Aderet s'est tout de même réjoui le jour de ses 60 ans pour les mêmes raisons que
Rav Yossef dans
Moed Katan (28a), comme il l'écrit dans une lettre
(Eder Hayakar II, Igrot, p.93, §14).
Il y précise aussi qu'il fait attention chaque année de tenter de ne pas se souvenir que c'est son anniversaire car cela lui cause une grande tristesse (car «
il est préférable de ne pas naître… »).
Toutefois, je suis perplexe, car le même
Aderet écrit dans son
Har Hamoria (éd. Ahavat Shalom, p.59) qu'il récita la brakha de Shehé'hiyanou pour son anniversaire avec beaucoup de joie !
Cependant, il faut noter le contexte, il était malade, avec 41°C de fièvre ( !) et était sûr d'y passer. Aussi, lorsqu'il a trouvé les forces de prier Maariv de Shavouot avec le Tsibour, il était joyeux.
Dans ce cadre, on peut comprendre le Shehé'hiyanou. (d'autant qu'étant né à Shavouot, si certains disent la brakha sur un fruit ou un habit, lui la faisait peut-être sur le Yom Tov, malgré qu'il écrive qu'il la récita pour son anniversaire).
[je mentionne au passage que
Rabbi David Pardo, auteur de nombreux sfarim dont le
Lamnatséa'h LeDavid et le
'Hasdei David, écrit à la fin de son commentaire
Shoshanim LeDavid qu'il le termine le jour de son anniversaire de 34 ans, le 1er Nissan 1752, et ça n'a pas l'air de l'attrister du tout d'y penser…]
Il y a en tout cas une tendance très nette à rattacher la fête d'anniversaire au pharaon et ça serait donc à considérer comme une réjouissance « non-juive ».
POUR :
Toutefois, on pourrait tout aussi bien voir les choses autrement, comme le
Rabbi de Sadigura (cité dans
Messilot –kislev 5747)(voir aussi
Avir Yaakov - du rabbi de Sadigura - p.161) pour qui, si la Torah nous précise que c'était une fête en l'honneur de l'anniversaire de pharaon, ce n'est pas en vain, c'est qu'il convient d’apprendre de là que l'on doit fêter les anniversaires, malgré que pharaon ne soit pas une référence, c'est le fait que la Torah nous mentionne cette habitude qui nous indique qu'elle est à suivre, à l'instar du principe selon lequel on ne mélange pas deux fêtes
(ein mearvin sim'ha bessim'ha) que l'on apprend de la Torah qui nous indique que telle était l'habitude des non-juifs et en particulier du vilain Lavan (cf.
Bereshit XXIX, 27) (voir
Yeroushalmi Moed Katan I, 7) et c'est aussi la source de l'idée des 7 jours de festivités lors d'un mariage…
C'est qu'il convient d'apprendre du fait que la Torah tienne à nous le mentionner, même si les protagonistes ne sont pas juifs.
Cette habitude ne doit donc pas être considérée comme étant un minhag non-juif, il n'y a pas de problème de
'houkot hagoyim dans le fait de fêter un anniversaire (cf.
Shout Beth David, §176).
Le
rav Méir Mazouz (annotations sur le Ben Ish 'Haï shana 1, Reé §7, p.580) écrit qu'il a entendu que certains s'opposent au fait de fêter les anniversaires mais qu'il lui semble avoir lu que le
Baal Shem Tov fêtait le sien - le 18 Eloul - et il en déduit qu'il n'y a donc aucun souci.
[Il ne se souvient pas où il a lu cela au sujet du Baal Shem Tov, mais je suppose que c'est dans la littérature 'Habad, par exemple dans Sefer Hassi'hot (1943, p.154, 187), le Kountras 'Haï Eloul, et Kerem ‘Habad (II, p.100)]
Son beau-frère, le
Rav Its'hak Berdah est plus clair encore dans son
Shout Its'hak Yeranen (V, §54) et valide le minhag de fêter les anniversaires en écrivant que ceux qui le font ont sur qui s'appuyer.
Rav Nissim Karélits ('Hout Hashani, §195, 1, 6 p.215), contrairement au
Rav Zeldner cité plus haut, ne semble pas considérer qu'il soit problématique d'offrir un cadeau pour un anniversaire.
Voir aussi le
rav Halévy dans
Assé Lekha Rav (IV, §26) pour qui il n'y a aucun problème.
Rabbi Avraham Pallagi fêtait son anniversaire chaque année à partir de ses 70 ans-selon le témoignage de son fils
rabbi Avraham Pallagi (Tsavaa Me'haim §40).
Voir aussi
Guinzei 'Haim (youd §16).
C'est aussi ce qu'a fait
(fêter annuellement son anniversaire dès l'âge de 70 ans) rabbi David 'Hazan cité dans le
Yishrei Lev (daf 2b).
(voir contre cela le
Knesset 'Hakhmei Israel - kountras 3 - §115, 1 pour qui uniquement les anniversaires de 60 et 70 méritent attention, mais pas les suivants.)
Nous trouvons aussi dans le
Midrash Sekhel Tov (XL, 20)(p.247) que
la majorité des « gens » aiment (me'havevim) le jour de leur anniversaire, ils s'en réjouissent et font un festin. (Mais ce n'est pas clair s'il parle des goyim ou même des juifs.)
Le
Ktav Sofer ne devait pas vraiment fêter en grande pompe chacun de ses anniversaires, mais il tint à fêter publiquement celui de ses 50 ans (cf.
Shout Ktav Sofer Y"D, §148).
[voir Afarkasta Deania (I, §123) qui s'en étonne car cela irait à l'encontre de la position de son père le 'Hatam Sofer qui écrit (Torat Moshé, Vayera, Bereshit XXI, 8) qu'Avraham fêtait chaque année le jour de la circoncision de son fils Its'hak - et non le jour de sa naissance]
Nous savons aussi - comme mentionné plus haut - que
Rav Yossef fêta ses 60 ans
(Moed Katan 28a).
Cette habitude a été suivie par plusieurs rabanim, comme le
Troumat Hadeshen, cité par son élève dans le
Leket Yosher (II, Y"D, p.40), ou encore le
Rabbi de Tshortkov et le
rabbi de Rudzimin cités par
R.A. Nayerman dans son
Toafot Reèm (tome 1, Varsovie 1936, p.30, §23).
On mentionne même l'idée de remercier D.ieu plus particulièrement le jour des 60 ans, comme le
Pélé Yoets dans son
'Hessed Laalafim (§221-230, sk.8, p.372) qui préconise de réciter la bénédiction de Shehé'hiyanou sans « shem oumalkhout » ou alors de préparer un fruit ou un habit neuf pour cela.
C'est aussi l'avis du
Ben Ish 'Haï (I, Reé, §9) pour les 60 et les 70 ans.
Par contre, pour les 70 ans, nous trouvons dans le
shout 'Havot Yaïr (§70) qu'il faut réciter la bénédiction de Shehé'hiyanou (sans restriction), mais il n'est pas suivi en cela et le
'Hida (Birkei Yossef- Shiyourei Brakha §223, sk.2) imposera les mêmes restrictions que pour les 60 ans, c-à-d sans prononcer le nom de D.ieu ou bien en portant un habit neuf
(ou mangeant un nouveau fruit).
Voir aussi
le
Pri Megadim (Mish. Zahav §444, sk.9),
le
Shout Tsits Eliezer (XVIII, §33),
shout Tshouva Meahava (II, §239),
Sama'h Nefesh (erekh Shehé'hiyanou),
Tsavaa Me'haim (par rabbi Avraham Pallagi, §40),
Hagahot 'Hatam Sofer (O"H §225),
Shout R. Yedidia Tia Weill (Y"D §106 p.224 de la récente édition),
Kaf Ha'haim (§223, sk.28),
Ben Ish 'Haï (I, Reé, §9),
Shout Beth Israel (Landau)(§32),
Shout Beth David (§176),
'Hessed Laalafim (§221-230, sk.8),
Divrei Israel (II, p.175)
et Afarkasta Deania (I, §123)
qui tous s'opposent à réciter la brakha "uniquement en raison des 70 ans", car on ne doit la réciter que dans les situations indiquées par les 'Hazal, comme l'écrit le
Shout Olat Shmouel (Kauder)(I, §22).
[Opinion repoussée par le
Tshouva Meahava pour qui le 'Havot Yaïr n'est pas absurde
(en préconisant la bénédiction en l'absence de takanat 'hazal) car, comme l'écrit le
Ba'h, c'est une brakha qui a été fixée sur la joie de l'homme (et non sur les situations précises indiquées).]
Mais le
Rabbi de Komarno (Shoul'han Hatahor §223, 7) indique bizarrement - et contrairement à tous ces poskim - de réciter le brakha
(comme le 'Havot yaïr)
(le
Rabbi de Komarno a souvent une position marginale dans ce livre).
Voir encore ce qu'écrit le
rav Shlomo Tsvi Shik dans son
Shout Rashban (I, §61). Selon lui le
'Havot Yaïr dirait de ne PAS faire la brakha (!), mais il se prononce lui-même personnellement « pour ».
Toutefois, il conviendra tout de même de marquer le jour. Le
'Hafets 'Haim, pour ses 70 ans, avait invité
rav El'hanan Wasserman et
rav Yossef Shlomo Kahaneman autour d'un peu de gâteau et de boisson et il récita Shehé'hiyanou !
(Mishnat Yaakov II, §225).
Mais selon d'autres sources
(He'hafets 'Haim, 'hayav oupealo, p.312), il aurait récité cette brakha (en ce jour) sur un nouvel habit.
Difficile de savoir à qui faire confiance quand on sait que les deux sont aussi « contredits » par le
Rav Shlomo Zalman Bloch qui, lorsqu'il entendit dire que le
'Hafets 'Haim aurait donné une petite collation pour ses 70 ans, s'exclama: «
Sheker Gomour ! Dos iz nit kein arbeit far dem 'Hofets 'Haim, s'iz nit a yiddishe weg ! »
(Hatsadik R. Shlomo, p.29, ot 18). En d'autres termes, selon lui, il est absolument impossible que le
'Hafets 'Haim ait agît ainsi, car cela n'est pas « juif » de fêter son anniversaire… (cf.
Or Israel 24, p.193 note 103).
Le
'Hafets 'Haim fêta aussi ses 90 ans et termina ce jour-là son livre
Beth Israel (cf. He'hafets 'Haim, 'hayav oupealo, p.25).
J'ai moi-même été invité à l'anniversaire de mon maître
Rabbi 'Haim Yaakov Rottenberg, pour ses 80 ans
(cf. Shout Beth Israel -Landau- §32) (et c'était son dernier anniversaire, il est niftar peu avant ses 81 ans), il n'a pas fait la brakha de shehé'hiyanou, mais il y avait du gâteau quand même.
Rav Fishman-Maïmon aussi a fêté ses 80 ans,
Rav Reouven Margulies a participé à cette «fête»
(Ma'hanayim LXXII du mois d'Eloul 5722 -1962, page 41).
Le
rav Nathan Adler, en poste à Londres, a voyagé jusqu'à Hanovre en Allemagne pour l'anniversaire de 80 ans de sa mère
(Lettre de Rav Shlomo Eiger, imprimée dans Igrot Sofrim, 1, p.83).
Il semble que le
Rav Sonnenfeld aussi ait « fêté » ses 80 ans et le
Rav Mendel Alter (fils du Sfat Emet) lui présenta ses vœux malgré quelques réticences quant à l'origine douteuse du minhag des anniversaires (voir sa lettre imprimée dans
Kerem Shlomo - Bobov - vol.205, p.47).
Mais pour les 60 ans, il est probable qu'il n'y ait rien vu de douteux, car son grand frère, le
Imrei Emet, organisa un repas d'anniversaire pour ses 60 ans (du Imrei Emet) et durant le repas il annonça la raison de la réjouissance
(Shout Maharaav –R. Avraham Binyamin Zilberberg- N.Y. 1941, tome 2, §61).
C'est aussi ce qu'avait fait
rav Yossef (Moed Katan 28a).
Le
Shout Shraga Haméir (rav Schneebalg) (IV, §69) est favorable au fait de fêter les 70 ans.
Le
Sdei 'Hemed fêta ses 70 ans
(Hameassef X, Tevet 5665, IV, p.43 et p.46), le rabbi de Vizhnits aussi fêta ses 70 ans dans la joie avec ses élèves
(Israel Saba Kadisha, II, p.177).
C'est aussi ce que fît
Rav Mikhael Goldberger [cf. Shout Rashban I, §61 où le Rav Shik lui écrit qu'il a appris par son fils (le fils du rav Goldberger) que son père (rav Mikhael Goldberger) allait bientôt fêter ses 70 ans et que selon lui (rav Shik) il conviendrait alors de faire la brakha de Shehé'hiyanou et que lui-même s'il pouvait y assister l'aurait aussi récitée (au titre de Haroé et ‘havéro a’har 30 yom) ainsi que la brakha « shé'halak me'hokhmato liyeréav » (que l'on récite à la vue d’un grand sage en Torah)].
Fêter les 70 ans d'un Tsadik est noble et souhaitable selon le
'Hessed LeAvraham (Brudno)(tome 2, pti'ha, p.6 §4).
Voir aussi
La voix percutante (p.282-3) ou en hébreu
Kol 'Hotsev (p.263-4) (La traduction française comporte une erreur en p.283, le 'Havot Yaïr n'est pas du 'Hatam Sofer) au sujet des 70 ans de
Rav Schwadron.
En 1860, pour les 70 ans de
Shir (Rav Shlomo Yehouda Rapoport), ses élèves avaient préparé une fête ainsi que des honneurs pour leur rav, mais il refusa les honneurs
[expliquant modestement qu'il était né en l'an Takan/TIKEN (1790) mais qu'il n'avait rien été Metaken – Ma Tikanti ?] (Toldot Shir de Bernfeld, p.126)
Pour un repas lors des 70 ans, on trouve une source supplémentaire dans le
Mekor 'Hessed (de l'extraordinaire Rav Reouven Margulies) sur le
Sefer 'hassidim (§213, note 1) : le
Yeroushalmi (Yevamot VIII, 3) dit que la peste sévit (au moins) une fois tous les 60 ou 70 ans. Dès lors, celui qui arrive à ses 70 ans a assurément échappé à la peste qui s'est déclarée « à son époque », voilà une bonne raison de faire une « seoudat Hodaa » !
Cette habitude de « faire une seouda » pour son anniversaire, étant validée par de multiples et différents auteurs comme le
'Havot Yaïr (§70), le Shout Beth Israel (Landau)(§32), le Beèr Moshé (Yeroushalaïmsky)(Maamar Zikhron Tov, daf 138a, §5) et le Ben Ish 'Haï (I, Reé, §9) - et de nombreux autres - semble acceptée ou au moins tolérée par tous, exceptés ceux cités plus haut.
Nous trouvons même dans le
Or'hot 'Haim (Bukhner)(éd. Cracovie 1654, §16) que les repas des anniversaires de 60 et de 70 ans revêtent le caractère de Seoudat Mitsva.
On trouve l'idée de réjouissance le jour de l'anniversaire
(au moins celui d'un tsadik) dans le
Midrash Tan'houma (Pekoudei XI) qui dit que D.ieu a souhaité mêler la joie du Mishkan à la joie de l'anniversaire de Its'hak (le 1er Nissan).
Voir aussi le
Tosfot ainsi que le
Rosh (Nazir 14a) qui expliquent la question qui se pose lorsque quelqu'un dit «
je serai comme Moshé le 7 adar » (est-il Nazir ou non ?) en indiquant qu'il est possible que cette personne fasse allusion à la date de décès de Moshé et donc c'est un jour triste durant lequel les endeuillés s'engagent dans une Nezirout, ou bien faisait-il allusion à l'anniversaire de naissance de Moshé (qui était aussi un 7 adar) et ça serait donc un jour de fête et de joie…
Contrairement à ce qu'écrit le
Rav Fraenkel dans son
Encyclopédia labar-mitsva (p.217), il semble que les juifs fêtaient les anniversaires de leurs rois, voir
Oshéa (VII, 5) «
yom malkénou » et dans le
Metsoudat david (ad loc) qui explique qu'il s'agît de l'anniversaire du roi et on y donnait un festin.
Cependant voir le
Malbim qui explique autrement.
Le
Ben Ish 'Haï (I, Reé, §17) écrit que c'est une bonne habitude de fêter les anniversaires chaque année et que certains fêtent le jour anniversaire de leur circoncision.
Puis il indique que dans sa famille, ils ont l'habitude de suivre le premier minhag (=fêter le jour de la naissance).
Le
Shout Beèr Eliahou (Katz)(II, Y"D §32) écrit que, selon lui, l'avantage du jour de la circoncision ne saurait concerner que les douze premiers anniversaires, mais à partir de la Bar Mitsva, il est plus logique de fêter le jour de l'engagement aux mitsvot, qui est celui de la naissance.
R. Avraham Pallagi aussi dans son
Veavraham Zaken (Youd, §19) mentionne le minhag de fêter les anniversaires.
Le
Yabia Omer (VI, O"H, §29) aussi trouve cela positif.
C'est aussi une habitude prise au sérieux chez les hassidim de Loubavitsh. La littérature 'habad est truffée de conseils et remarques sur la conduite à adopter le jour de son anniversaire et lui trouve même des sources dans la Kabbale
(Shaarei Halakha Ouminhag II, §302).
Le premier rabbi de 'Habad - le
Baal Hatania (ou le
Alter Rebbe pour les intimes) - est né le 18 Eloul, comme le
Baal Shem Tov...
Le
Tiferet Israel, dans son testament
(Hamaayan –tamouz 1971- ot 6) demande à ses enfants de se souhaiter de bons vœux mutuellement les jours de leurs anniversaires respectifs.
Après avoir vu que de nombreux rabanim considèrent positivement la fête d'anniversaire, il nous reste à définir ce qu'il convient de faire pour fêter un anniversaire convenablement.
COMMENT LE FETER
Le jour de l'anniversaire, il convient de
- réciter Shehé'hiyanou sur un fruit ou un habit neuf
(Shout Guinzei Yossef §4, 2 citant son beau-père, le Rav Deutsch, auteur du Shout Pri Hassadé),
- donner beaucoup de Tsedaka
(R. 'Haim Pallagi dans Tsedaka Le'haim –maarekhet ayin §555)
- en faire une « journée de prières »
(Melitsei Esh p.54)
- réserver cette journée ou au moins la majeure partie de cette journée au service divin
(Torat Shalom –Schneersohn- p.398)(Kerem 'Habad II, p.102) (voir aussi Hapardes, année 62 volume 9, p.2 au nom du rabbi de Loubavitsh)
- étudier beaucoup ce jour-là
(Shout Hillel Omer, O"H §139).
La coutume dans les yeshivot est de « faire mishmar », c-à-d d'étudier toute la nuit de l'anniversaire des 20 ans.
On veillera aussi à réserver un moment pour l'introspection et le 'Heshbon hanefesh sur l'année passée, comme on le voit dans le
'Hout Hameshoulash (éd. Munkasz 1893, tome 1, daf 59b-60a note de bas de page) qui raconte qu'une fois le
Ktav Sofer s'était enfermé le jour de son anniversaire (de 54 ans) et une personne étant entrée dans son bureau l'y trouva assis au sol en pleurant, lui demanda ce qui se passait et il lui répondit qu'il pleurait sur la perte de temps accumulée durant ses années passées (voir aussi la préface au
Ktav Sofer Al Hatorah, p.29)
Dans le
Shout Hadar (§18), l'auteur indique que son maître - le
Rav de Stretin- tenait à monter à la Torah le jour de son anniversaire
(ce qui n'est pas réalisable chaque année…).
Dans le
Divrei Ye'hezkel Shraga (parshat Vayakel) et le Tehilat 'Haim (p.409) il est écrit que le
Divrei Ye'hezkel de Shinova tenait à être shalia'h tsibour pour la prière le jour de son anniversaire
(ça c'est praticable plus souvent).
C'est aussi ce que faisait
R. Shaoul Broch (Shaoul Be'hir Hashem, Ashkavta derabbi, p.275)
Voir aussi
Torat Shalom (p.406) qui - pour le jour de son anniversaire - préconise de monter à la Torah, de donner de la Tsedaka, d'ajouter des moments de prière, de Tehilim, d'étude et d'introspection, dire shehé'hiyanou sur un fruit ou un habit (etc.)
J'ai lu aussi au nom du
rabbi de Spinka cité dans le
Shout 'Hakal Its'hak (I, 3) qu'il convient chaque année, le jour de son anniversaire, de prendre sur soi un engagement sur un point au sujet duquel on sait devoir parfaire.
Si on ne se trouve pas de mitsva défaillante
(c'est qu'on est un grand tsadik ou alors qu'on n'a pas bien saisis le concept), on pourra toujours se travailler sur l'acquisition de « l'esprit juif ».
On pense parfois qu'accomplir toutes les mitsvot fait de nous un bon juif, mais la vérité est que l'on peut accomplir des tas de mitsvot, prier trois fois par jour, mettre les tfilines et les tsitsiot, faire shabbat, manger strictement kasher, etc. etc. …et pourtant… et pourtant… rester Goy dans sa tête.
[Le
Rabbi de Piaseczno, R. Kalmish Shapiro (tué par les nazis dans le camp de Trawniki le 4 'heshvan 1943 après avoir été déporté depuis le Ghetto de Varsovie en avril 1943 suite à l'insurrection), avait un journal intime dans lequel il a écrit le jour de ses 40 ans
(le 19 Iyar 1929) qu'il convient de prendre sur soi un engagement, mais qu'il ne sait pas quoi prendre comme « kabala » sur lui cette année, «
étudier plus ? il me semble que je ne gaspille pas un moment dans mon emploi du temps, s'éloigner des Taavot ? Baroukh Hashem je ne suis dépendant d'aucune Taava matérielle, alors que me manque-t-il ? Ce qui me manque… c'est d'être « un juif » ! J'ai l'impression d'être une forme humaine, avec ses couleurs et ses formes etc. à laquelle il ne manque qu'une chose: la Neshama ! Maître du monde ! Voilà ce que je souhaite pour cette année, je veux me convertir et devenir juif !»
(cité dans Mimaayanot Hanetsa'h p.294).]
Il y a aussi une notion de faire un Siyoum le jour de son anniversaire.
SIYOUM
Plusieurs rabanim tenaient à faire un siyoum le jour de leur anniversaire, le
Troumat Hadeshen fit un siyoum le jour de ses 60 ans
(Leket Yosher II, Y"D, p.40).
Voir
Leket Hakema'h (131) qu'il convient de mêler cette réjouissance à un siyoum massekhet.
Ainsi, le
'Hatam Sofer s'organisait pour faire coïncider son anniversaire - le 7 Tishri - avec la fin du cycle d'étude du 'houmash avec ses élèves
(Minhaguei HS, VII, §14, p.31).
Cependant, dans le
Shout Afarkasta Deania (§123), il cite le
'Hatam Sofer comme étant opposé à considérer l’anniversaire de naissance et qu'il préconisait de fêter celui de la circoncision
(ce qui est contraire à ce qu'écrit le Minhaguei HS cité) (voir à ce sujet
Or Israel 49, p.142, note 46).
Son fils le
Ktav Sofer aussi terminait une massekhet chaque année à son anniversaire
('Hout Hameshoulash éd. Munkasz 1893, tome 1, daf 59b note de bas de page).
Encore un point qui mérite d’être souligné :
Dans le
Sheérit Natan (p.392) (cité dans
Or Israel 46 , p.249) nous trouvons un minhag de siyoum très particulier qui avait cours à la Yeshivat 'Hakhmei Lublin, chaque 7 Adar, anniversaire du Rosh yeshiva
Rabbi Méir Shapira (instigateur de l'étude du Daf Yomi), on « distribuait » des traités de Talmud, chaque élève prenait sur lui une massekhet ou la moitié, on répartissait l'étude de tout le Shas entre les élèves de la yeshiva et ils étudiaient leur part en UNE NUIT, de telle sorte qu'au lendemain, le 7 Adar, ils faisaient tous ensemble avec le Rav un grand Siyoum Hashas.
Tout ceci étant dit, personnellement, je serai tenté de présenter un argument en la faveur de ceux qui fêtent leurs anniversaires, mais je n'ai vu aucun A'haron souligner cet aspect (hormis le
Torat Shalom –Schneersohn (p.399-400) que j'ai trouvé récemment) :
La halakha est qu'il convient de fêter annuellement un miracle qui nous serait arrivé
(cf. Mishna Broura fin de §218), par exemple celui qui survit à un accident mortel doit fêter cet évènement chaque année.
Si c'est ainsi, étant donné le grand danger lors de la naissance d'un bébé, on pourrait considérer qu'il faille fêter le miracle de sa naissance chaque année.
Certes , de nos jours, dans les pays civilisés, le risque de fausse couche est très diminué et la mortalité infantile a aussi nettement baissé, B"H, mais si le minhag s'est implanté depuis une époque où ça n'était pas le cas, il se peut que nous continuions cette coutume car le danger n'est malgré tout pas absent.
Seulement, si ma proposition tient la route, il faudrait aussi penser à ce que chaque maman fête l'anniversaire de chacun de ses enfants, car elle aussi a échappé à la mort ce jour-là.
Aussi, selon cette logique, il conviendrait de fêter l'anniversaire obligatoirement selon la date hébraïque.
Voir ce que j'ai écrit ici:
http://techouvot.com/quel_anniversaire-vt14234.html
qu'il me semble plus logique de fêter les anniversaires selon la date civile
(sauf pour les anniversaires à connotation religieuse).
Voir aussi
Zikhron Shlomo (Jérusalem 1994, p.219) qui souligne que selon l'idée qui soutient que le jour anniversaire est un jour de bon Mazal
(mentionnée plus haut), comme c'est lié aux astres (mazalot), on doit suivre le calendrier solaire - et donc civil !
Quoi qu'il en soit, même si aucun argument halakhique pousserait à fêter les anniversaires
(et c'est probable car nous avons prouvé de la gmara Moed Katan 28a que les Amoraïm ne fêtaient aucun anniversaire et seul Rav Yossef s'est distingué en fêtant celui de 60 ans - et seulement celui-là…), reste une autre raison, surtout pour les enfants: de nos jours où cette habitude est répandue et où les enfants sont parfois égarés et sont tentés de s'éloigner des habitudes familiales, il est bénéfique de montrer à chaque enfant de la famille qu'il a son importance et au moins un jour par année, on le fête tous ensemble.
Il devient alors le héros d'un jour, c'est déjà ça.
Voir aussi, un peu dans ce sens,
Kitvei Reb Eizik (Schwei) (p.273) et Torat Shalom (p.405).
À l'époque des Amoraïm, ça n'était pas nécessaire, aujourd'hui ça peut l'être en fonction des situations, des familles et de l'endroit.
Il serait donc inopportun de se dire que puisque les Amoraïm ne les fêtaient pas, nous devons nous aussi nous en abstenir.
S'en abstenir à leur époque ne voulait rien dire de particulier, car personne ne les fêtait (parmi les juifs du moins). Aujourd'hui ça aurait une autre signification pour l’enfant…
On ne peut pas dire qu'il FAILLE les fêter, mais que ceux qui en ont l'habitude ne doivent pas la perdre sous prétexte « religieux », ils doivent peut-être mieux diriger l'esprit de cette fête en lui donnant un aspect de kdousha plus clair, mais il ne faut pas l'annuler.
Voir encore
Shout Mayim Hahalakha (Metzger)(IV, §46) qui écrit qu'il faut savoir donner un caractère de kdousha aux anniversaires et ne pas les fêter dans la frivolité.
Et de manière plus générale,
Rav Shakh avait l'habitude de dire (cf.
Ma'hshevet Zkénim p.342 et aussi p.141 et 332) que chaque anniversaire nous rapproche de la mort, pourquoi donc s'en réjouir ?
C'est pourquoi seul le « ben aliya », celui qui progresse d'année en année dans la Torah, doit se réjouir, car chaque année qui passe comporte une nouvelle avancée dans la Avodat Hashem, il se rapproche donc de 'Hayei Netsa'h, l'inverse de la mort, car les tsadikim sont appelés vivants même après leur mort
(Brakhot 18a).
Un rav avait suggéré au grand et fameux
Rav Ye'hezkel Lewinstein - lorsqu'il était mashgia'h de Ponovez - de supprimer l'habitude de la « Santoukha »
(petite fête entre amis de la Yeshiva lorsqu'un des leurs se fiance) car on s'y livre systématiquement à un exercice thuriféraire où il s'agit de mettre en exergue les qualités du 'hatan et l'orateur, dans un esprit laudateur, pousse parfois l'éloge au dithyrambe, ce qui amène nécessairement à un sentiment incontrôlable d'orgueil tant réprouvé par les Baalei Moussar.
Rav Lewinstein s'exclama : «
une seule fois dans la vie d'un homme il arrive que ses amis lui fassent des compliments et même cette unique fois tu souhaites la supprimer ?! »
EN CONCLUSION: il est parfaitement légitime de souhaiter et de fêter les anniversaires, mais il faut savoir comment le faire.
Ceux qui n'ont pas la coutume [d'accompagner le 'heshbon hanefesh] d'une collation en famille ne sont pas tenus d'adopter le minhag, mais ceux qui ont l'habitude de fêter ce jour par une petite fête ne doivent pas abandonner cette belle habitude en raison de quelques rabbins qui grognent contre les anniversaires; comme nous l'avons vu, les rabbins qui attachaient une importance à ces moments de réjouissance sont très nombreux et dans la mesure où l'on ne festoie pas bestialement mais dans un but constructif, avec un sentiment de Hodaa, de Tshouva et d'introspection, c'est un très bon Minhag.
PS: c'était long, j'ai les doigts en feu ! Désolé pour les fautes, n'ai pas la force de me relire, j'espère que vous avez eu celle de me lire jusque-là, la longueur de cette réponse en fait quasiment un petit livre, c'est à se demander si la lecture de cette seule réponse suffirait en tant que Siyoum un jour d'anniversaire....