A Max:
Il est vrai que le
Maaral semble parfois en vouloir aux
Tosfot d'être imprimés sur la page, il en veut en fait aux personnes qui ont imprimé les
Tosfot sur la page de
Gmara, à cause d'elles les jeunes étudiants se perdent dans des raisonnements des
tossafistes au lieu d’apprendre en premier lieu le
Talmud lui-même (voir
Netivot Olam, Netiv Athora §5).
Il faut savoir que la pagination de nos gmarot est assez fidèle à la toute première édition du
Talmud, dans laquelle nous trouvions déjà
Rashi et
Tosfot de chaque côté des pages talmudiques.
C'est donc depuis un demi-millénaire que les
Tosfot accompagnent la gmara, comme
Rashi.
Cependant, il ne faut pas perdre de vue deux choses :
La première est que personne n'a jamais dit qu'il fallait étudier (dès le premier passage – de surcroît) tout ce qui est imprimé sur la page.
La seconde est que celui qui est à l'origine de l'impression du premier
Talmud [complet] n'est ni un Talmid 'ha'ham de renom, ni même un juif !
Il s’agît d'un éditeur flamand installé en Italie au début du XVIème siècle, nommé
Daniel Bomberg.
Il s'est plus ou moins ruiné pour pouvoir imprimer des livres en caractères hébraïques (les deux Talmuds et la Bible, plusieurs fois) et était en contact avec des théologiens, des érudits, hébraïsants et orientalistes de tous les horizons.
C'est par son intermédiaire que
Guillaume Postel a pu rencontrer
Rav Eliahou Ba'hour.
Etant donné que cette première édition (complète) est la réalisation d’un non juif, il ne convient certainement pas de voir en la présence du commentaire des
Tosfot sur la page une quelconque indication ou suggestion de la part des rabanim de l'époque.
Il est vrai que
Bomberg s'était entouré de plusieurs relecteurs et talmudistes conseillers, mais il semblerait que ce soit lui qui ait tenu à ce que la page présente deux commentaires, un de chaque côté.
Le choix de
Rashi était assez évident, par sa concision il permet de rester proche du texte, mais les
Tosfot ne sont pas plus adaptés à se retrouver en première ligne que d'autres
rishonim comme le
Rosh ou le
Ritva.
De nombreuses personnes ignorent ce fait historique et sont allés imaginer toutes sortes de choses et d'idées autour de l’impression du
Talmud.
En ce qui concerne les grandes théories autour de « la raison profonde qui a poussé les 'ha'hamim à imprimer quatre lignes plus larges de
Rashi et/ou de
Tosfot en haut de chaque page avant la première ligne de gmara », je trouve ridicule d'y voir un enseignement de ces « 'ha'hamim » visant à fixer le nombre indispensable de révisions d'un texte à quatre.
Etant donné que le « 'ha'ham » imprimeur en question n'était pas juif, il est difficile de pouvoir analyser cet effet de pagination de la sorte.
(De plus je ne vois pas le rapport entre les lignes et les 'hazarot)
D'ailleurs, je crois bien que le deuxième (ou 3ème ?) Talmud imprimé présentait
cinq lignes en haut de chaque page…
Ça me fait penser aux théories concernant le premier daf qui est numéroté 2 (daf beth) car nos 'ha'hamim voulaient nous dire qu'on n'est jamais au début et qu'on ne termine jamais avec le
Talmud.
À part le fait que je n’ai jamais compris pourquoi « on n'est jamais au début » (jamais à la fin , ok, mais ce n'est pas symbolisé par le daf beth!), un débutant ou un récent converti pourrait être au début je pense (s'appuyer sur la
gmara Nida 30b - oumelamdin oto…- pour expliquer cela me semble faible), mais le plus ridicule est qu'encore une fois on attribue de grandes pensées « moussariques » et des conseils de limoud à un éditeur non juif duquel il est difficile d'imaginer qu'il aurait pu se retenir de rigoler en entendant de telles farces.
En fait la raison du début à la page (feuille) 2 est tout simplement que c'est la deuxième page (feuille) et non la première, car précédée de la page de garde qui n'est pas numérotée par souci d'esthétique.
Il n'y a donc rien à déduire du fait que la première page soit la deuxième, ils auraient pu la numéroter page 1, mais ils ont choisi de tenir compte de la page de garde.
D'ailleurs dans les dapim du
Rif, le premier daf est numéroté 1 (daf Alef), c'est bien qu'il n'y a pas d’allusion à cette notion dans la numérotation des pages (sans quoi, l’idée aurait été respectée ici aussi).
Dans le
Talmud Yeroushalmi aussi ça commence par le daf Alef.
Je pense que vous avez raison de vous attrister de vos premières années d'études qui étaient - selon vos dires - trop orientées vers le Pilpoul, néanmoins estimez-vous heureux d'être passé par la case Yeshiva, pas tout le monde a eu cette chance, cela évite bien des handicaps au niveau du limoud.
Vous avez donc les moyens de rattraper le temps « perdu » en organisant votre temps de limoud de manière plus intelligente.
D'autres, étant passé plutôt par la case fac, ont de grandes difficultés pour arriver à déchiffrer un simple
Kehilot Yaakov et n'ont aucune autonomie dans le
Talmud.
Si quelqu'un doit regretter sa jeunesse durant laquelle il aurait pu étudier la Thora, vous n'êtes pas parmi les premiers concernés, pensez à nos coreligionnaires qui n'ont pas eu la chance de passer par la yeshiva ne serait-ce qu'un an et qui s'en mordent les doigts aujourd’hui alors qu'il est trop tard, sans parler de ceux qui ne se rendent même pas compte qu'il y a de quoi s'en mordre les doigts !
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À Jde que je cite:
Citation:
Concernant, cette notion d'équilibre (ou de dosage) entre la Bekiout & le Yioun et en tenant compte de vos remarques, est il possible de souligner que la méthode proposée par Artscroll (en hébreu) permet à la fois de comprendre rapidement le sens de chaque daf et en même temps si besoin de découvrir d'autres sens plus compliqués et en gardant en mémoire l'essentiel de la page?
Cette méthode permettrait ainsi de rapidement embrasser une Massehet et d'acquérir des notions de base.
qu'en pensez-vous ? (idem pour des chiourim de Daf Hayomi de type de Rav Rozenberg).
Je suis très favorable aux
Gmarot d’Artscroll [-en hébreu, celles en français sont moins bien travaillées], elles permettent de saisir le sens simple facilement sans se casser la tête avec des dictionnaires et du
Rashi obscur.
Somme toute, le bénéfice que nous pouvons tirer d'une explication d'
Artscroll, correspond à ce que nous pouvons tirer d'un
Rashi ou d'un
Rashbam si nous connaissons leur langue particulière.
Artscroll utilise une langue plus moderne, plus claire et adaptée aux lecteurs non initiés.
Je pense qu'
Artscroll est le
Rashi des temps moderne pour déchiffrer une gmara.
À l'époque des
Rishonim, le talmudiste n'avait pas de
Rashi dans sa marge de
gmara, il connaissait le pshat grâce aux explications de son maître.
Depuis que
Rashi est imprimé, nous connaissons le pshat grâce à ce commentaire qui vient l'expliquer sur place.
Aujourd'hui, si vous êtes plus à l'aise avec
Artscroll qu'avec
Rashi, c'est tout comme. (A ce niveau seulement, mais il est évident qu'
Artscroll est incomparable à
Rashi au niveau des déductions que nous pouvons faire à travers le langage et les mots choisis...)
Par contre il faut savoir utiliser la traduction
Artscroll intelligemment, ne pas se contenter de faire confiance au texte de traduction sans comparer avec le texte en araméen, sinon on ne comprend pas réellement les étapes du raisonnement et on reste dépendant de la traduction d'
Artscroll.
Il faut toujours travailler sur la page classique et seulement
s'aider de leur traduction.
Mais quelqu'un qui n’est pas capable de retrouver le pshat (après consultation du
Artscroll) sans avoir recours (de nouveau) à la traduction n'a généralement pas bien saisi le fond de l'argumentation dans ses détails.
Après avoir bien compris chaque étape du raisonnement et être capable de le retrouver dans le texte classique, il faudra se mesurer à chaque svara afin de se positionner par rapport à elle, suis-je d'accord ou non avec cet argument ?
Si oui, parfait.
Si non, pourquoi ? etc… Jusqu'à ce que tout soit clair.
Certains rabanim rouspètent sur les
gmarot Artscroll qui - selon eux - suppriment le « Amal aThora ».
Je ne suis pas d'accord avec cette idée.
Il faut distinguer dans le Amal aThora deux catégories de Amal - difficulté ;
Il y a le Amal qui consiste à calculer la souguia afin d'en ressortir les parties liées à la Ava Amina et ce qui reste en Maskana.
Le calcul de la Shakla Vetaria ou même, à un niveau plus avancé, le calcul des shitot des rishonim et leur comparaison.
Ce Amal est souhaitable et nécessaire.
Mais il y a aussi le Amal lié aux difficultés techniques, comme la méconnaissance de la langue araméenne (qui impose d’avoir recours à un dictionnaire ou à une traduction), qui n'est pas souhaitable si l'on peut s'en affranchir.
De la même manière qu'il ne convient pas de rechercher la plus mauvaise qualité d'impression de texte afin d'en rendre la lecture plus difficile.
Sinon, il faudrait tenir son livre à l'envers et baisser la lumière pour en rendre le déchiffrage terriblement pénible, en ayant la sainte joie de s'impliquer dans le Amal aThora.
Je trouve ça contreproductif et surtout stupide.
Si on peut disposer d'une gmara bien imprimée (qui fera sur nous bonne impression), tenue dans le bon sens (afin de saisir le vrai sens du texte), d'un éclairage électrique de qualité (grâce auquel le lecteur sera éclairé dans sa compréhension) et de la traduction d'
Artscroll (utilisée dans les règles de l'art), pourquoi s'en priver ?
Ce genre de difficultés n'est pas à souhaiter ni à rechercher.
La difficulté qu'il faut rechercher c'est le véritable Amal aThora qui consiste à faire le 'heshbon de la souguia.
Pour ce qui est des cours du
Rav Rozenberg, je ne pense pas qu'il y en ait de meilleur niveau (en français) disponibles sur internet.
Malgré cela, ils ne conviendront pas à chacun.
Le grand point négatif est qu'il ne traduit ni n'explique systématiquement chaque passage de la gmara.
Il lui arrivera de lire une dizaine de lignes en en traduisant à peine quelques expressions et surtout sans rien expliquer du raisonnement (qui peut paraître parfois simple lorsqu'on sait traduire les mots, mais qui serait en fait bien plus complexe que ce qu'il en a l'air) pour s'attarder sur un point annexe.
Il aurait été préférable de bien appuyer sur les étapes du raisonnement, soulever les questions qui s'imposent et mettre en exergue les incohérences.
Seulement ce travail nécessite bien plus de 50 ou 60 minutes par daf puisque le
Rav souhaite aussi ajouter des détails et des informations enrichissantes sur des sujets mentionnés dans la page.
Donc en écoutant le cours de
Rav Rozenberg, il faudra aussi bien travailler le déchiffrage du texte avant le cours.
Je dirais que son cours contient plutôt des
informations que des
explications sur la page de gmara.
Mais pour quelqu'un qui est capable d'étudier la page de lui-même avant, son cours sera très enrichissant. J'ai déjà écrit sur ce site
http://techouvot.com/y_atil_des_cours_en_francais_sur_la_guemara_sota-vt13355.html
qu'il s'agît d'un «
Talmid 'Ha'ham comme on en trouve peu de nos jours, surtout en France ».
La suite de ce que j'ai écrit sur le post en question a provoqué des réactions contradictoires parmi les internautes, je ne reviens donc pas dessus ici.
Je vous prie de m'excuser pour les termes techniques non traduits,
Jde en utilisant lui-même certains m'indiquait qu'ils ne lui sont pas étrangers et les traduire pour le grand public n'aurait peut-être pas grand intérêt et surtout dénaturerait ces expressions.
Puisque j'ai commencé à demander votre indulgence concernant ma rédaction en «
franbreu », j'ajoute mon habituelle demande d'indulgence pour les fautes de frappe et d'orthographe car si je prends le temps de me relire ne serait-ce qu'une fois, je répondrais à moins de questions que ce que je le peux en ne prenant pas la peine de me relire.
Je sais que je ne pourrais pas être un répondeur prolifique tant que je serais un rédacteur prolixe, mais ça part tout seul et je trouve intéressant de partager des détails qui peuvent paraître inutiles pour la discussion en cours mais qui peuvent s'avérer utiles ou enrichissants pour le reste.