Et voici mon troisième et dernier message (pour aujourd’hui) qui vient répondre à la question de
Kikouze :
Citation:
Merci de vos éclaircissement
Pourriez, dans la mesure du possible , Me dire quelles sont les points de divergences entre le Rav kook et les autres rabanim de l'époque?
Non.
C’est un sujet trop vaste.
Voyez le post de
Leib et ce que je lui ai répondu.
Citation:
Et si possible nous en dire un peu plus sur ce texte sur lequel le Rav messas a réagit.
Ça c’est déjà plus concis, enfin, on peut en parler de manière concise.
Le
Rav Messas lui a envoyé une lettre en Kislev 1927 (imprimée dans
Otsar Hamikhtavim II, §658 , p.42) lui disant avoir lu dans le mensuel
« Beit Waad La’hakhamim » (kislev 1927) où l’on dénonce avec véhémence les transgressions de la Torah qui ont cours en Palestine (Erets Israel) et plus particulièrement à Jérusalem.
On y transgresse le shabbat haut la main, les boucheries vendent de la viande non-ksheira , on organise des danses le soir de Yom Kippour, on mange non-kasher, certains « dénoncent » aux autorités non-juives les juifs pratiquants qui leur reprochent ces agissements contraire à la Torah…
(précision : nous sommes malheureusement habitués à cette réalité, mais il y a un siècle, les juifs du Maroc ne pouvaient pas s’imaginer que des juifs puissent ainsi enfreindre la Torah et surtout pas en Erets Israël…)
Le
Rav Messas demande alors : Est-ce bien cela la Gueoula à laquelle nous aspirons ?
Est-ce pour cela que nous nous serrons la ceinture en versant nos économies dans les troncs installés dans chaque synagogue en faveur du Yishouv, afin d’envoyer notre contribution au Yishouv en Erets Israël, pour aider au développement du pays ?
Nous privons nos pauvres locaux au profit du Yishouv alors qu’ils se comportent ainsi, pratiquent de telles abominations ?
Mais le pire de tout, c’est cette nouvelle, selon laquelle vous (rav Kook) auriez dit que l’entrainement sportif des jeunes qui jouent au football (en transgressant allègrement la Torah) élève la shkhina comme les chants de David dans les Tehilim et apporte une performance à la force spirituelle des tsadikim.
Vous auriez aussi proclamé lors de l’inauguration de l’université de Jérusalem que c’est sur ce type d’institution (pourtant « militante » anti-Torah) qu’il est dit «
Ki Mitsion Tetsé Torah » (c’est de Sion que viendra la Torah).
Comment un rabbin aussi important que vous peut-il encourager des juifs renégats dans leurs péchés, leur mépris et leur transgression de la Torah ?
Au contraire, vous auriez dû les réprimander publiquement afin que les donateurs comprennent que ce type d’institutions va à l’encontre de la Torah et qu’ils ferment leurs bourses !
Rav Messas termine en écrivant qu’il refuse de croire ces témoignages avant d’en avoir la confirmation par
Rav Kook lui-même car il n’arrive pas à imaginer de telles choses et il précise que depuis qu’il a reçu le mensuel porteur de ces nouvelles, il n’a rien pu manger tant il est bouleversé.
Plus loin dans
Otsar Hamikhtavim (§683), Rav Messas écrit (au mois d’Iyar) à
Rav Kook pour le remercier de sa réponse dans laquelle il dément toutes ces accusations mensongères.
Rav Messas ne se contente pas de le remercier, il ajoute que son cœur s’est rempli de joie et qu’il se sent beaucoup mieux à présent, mais qu’il s’inquiète fort du rédacteur responsable de ces calomnies dans le mensuel
Beit Waad La’hakhamim qui diffuse de tels mensonges sur une personnalité rabbinique de premier ordre.
Sans tarder,
Rav Messas rédige une lettre à son intention (elle se trouve dans
Otsar Hamikhtavim §685), il s’appelle
Rav Yossef Shimon Pollak.
Il lui écrit qu’il a été choqué de lire de si graves accusations sur le
Rav Kook, qu’il a vérifiées en écrivant au concerné et que ce dernier dément et qu’il a répondu point par point à chaque accusation, il n’y a que mensonges et calomnies.
Aussi, comment avez-vous (Rav Pollak) pu publier ces mensonges ?
Plus tard, au mois de Sivan (et imprimé dans
§691),
Rav Messas informe Rav Kook qu’il a écrit au journal (à Rav Pollak) pour le réprimander. C’est qu’il n’avait toujours pas reçu de réponse de la part de
Rav Pollak.
En réalité, il semblerait que le
Rav Kook ait plus ou moins « embrouillé » le
Rav Messas en le rassurant.
Attention, pas nécessairement avec une mauvaise intention, il pouvait estimer que du fin fond du Maghreb,
Rav Messas n’était pas à même de comprendre la réalité de la situation en Erets Israel.
Mais j’ai l’impression que
Rav Kook a tout de même « bénéficié » de la Tmimout du
Rav Messas dans cette affaire, car en lisant les écrits de
Rav Kook, par exemple dans
Orot Hate’hia (§34) [et voir aussi 8 Kvatsim, tome 6, §290], on y retrouve cette idée insupportable aux yeux de
rav Messas.
La réponse de
rav Kook n’est pas imprimée dans le
Otsar Hamikhtavim, mais elle l’a été (partiellement) depuis dans
Otsrot Hareïa (I, p.203) (et complètement dans les Igrot).
Pour le discours d’inauguration de l’université, il nie avoir tenu de tels propos et pour le football qui vaut bien des Tehilim,
Rav Kook explique que c’est dans le dessein de rapprocher les éloignés du judaïsme qui de toute façon s’adonnent au sport, afin qu’ils le fassent au moins « leshem shamayim »…
Tout en comprenant très bien (je pense) son intention, je ne peux m’empêcher de remarquer que si c’était le cas, ces considérations ne trouveraient pas leur place dans les sfarim du
rav Kook, écrits pour tout public, surtout le public pratiquant.
Même si son intention n’est que pour les éloignés de la Torah, si ça se retrouve dans ses sfarim (destinés aux pratiquants avant tout), c’est qu’il y a un problème…
Rav Messas, Tsadik Tamim comme il l’était, ne devait pas s’imaginer à quel point les ashkenazes en Palestine pouvaient être anti-Torah et il semblerait que
Rav Kook ait « profité » de sa naïveté pour économiser de grands débats explicatifs ou de se faire un nouvel ennemi.
J’ai regardé le texte imprimé dans le Kol Koré du
Beit Waad La’hakhamim (Kislev 5688), titré «
Yeroushalayim titen Kola », ça correspond bien à ce qui est imprimé dans
Orot hate’hia (§34) qui était DÉJÀ imprimé à cette époque (imprimé je crois vers 1920).
Je réitère ma mise en garde : n’allez pas en déduire que le
rav Kook était un brigand qui ment sur ses intentions et arnaque le
rav Messas en étant
‘had bepé ve’had belev, ‘has veshalom.
Il s’agît d’un grand Tsadik, intègre, Gaon et visionnaire.
Même ses opposants reconnaissaient sa Tsidkout et son intégrité.
(Hormis certains extrémistes l’accusant de tous les maux, c’est vrai, mais la très grande majorité des talmidei ‘hakhamim s’opposant au Rav Kook le respectait, ils ne s’opposaient qu’à sa Shita qu’ils jugeaient erronée et dangereuse pour le klal israel.)