La parachath Beha‘alothekha contient, sur plusieurs versets (Bamidbar 11, 26 à 11, 30), une incidente aux apparences mystérieuses qui relate les activités de deux personnages apparus de nulle part : Eldad et Meidad.
Ceux-ci, qui étaient investis de l’esprit divin, se mirent à prophétiser dans le camp d’Israël sans que Moïse s’opposât à leur intrusion. Seul Josué protesta contre leur intervention, mais il ne fut pas entendu.
La Guemara (Sanhédrin 17a) projette quelque lumière sur cet épisode insolite.
Pour rabbi Chim‘on, lorsque Hachem a ordonné à Moïse de « lui réunir soixante-dix hommes parmi les anciens d’Israël » (Bamidbar 11, 16), « Eldad et Meidad ont dit : Nous ne sommes pas dignes de cette haute fonction. Alors le Saint béni soit-Il a dit : Parce que vous vous êtes faits vous-mêmes si petits, Je vous accorde un honneur encore plus grand que celui qui vous était fait. Et quel est l’honneur que Hachem leur a ajouté ? C’est que tous [les autres] avaient reçu l’esprit prophétique pour ce moment-là et pas davantage, tandis que Eldad et Meidad ont continué à jouir sans arrêt de l’esprit prophétique. Et que disaient-ils sous l’inspiration de l’esprit prophétique ? Ils disaient : Quand Moïse sera mort, c’est Josué qui fera entrer le peuple d’Israël dans son pays ».
En revanche, selon Abba ‘Hanin au nom de rabbi Eliézèr, c’est au sujet des cailles [dont il est question dans Chemoth 16, 11 à 13 et dans Bamidbar 11, 31) qu’ils prophétisaient : « Arrivez les cailles ! Arrivez les cailles ! »
Quant à rav Na‘hman, il assure qu’ils prophétisaient au sujet de Gog et Magog [qui représentent, selon la tradition, l’ultime empire du mal, dont la destruction annoncera l’ère messianique (voir Ezéchiel 38, 2 et 39, 6 – ‘Edouyoth 2, 10)], au sujet desquels il est écrit : « Ainsi dit le Seigneur, Hachem : N’es-tu pas celui dont j’ai parlé dans les jours d’autrefois, par mes serviteurs les prophètes d’Israël, qui, en ces jours-là, pendant des années (chanim), ont prophétisé que Je te ferais venir contre eux ? » (Ezéchiel 38, 17). Il ne faut pas lire : chanim (« des années »), mais chenayim (« deux »). Et qui sont ces deux [prophètes] qui avaient annoncé à une même époque une même prophétie ? C’était Eldad et Meidad.
[…]
Et que [voulait dire Josué par le mot] : « Enferme-les ! (kelaèm) ! » (11, 28) ? Il lui a dit : « Donne-leur [la responsabilité] des charges publiques, et ils s’arrêteront bien d’eux-mêmes (kalim). » [Tossafoth (s. v. wehèm kalim) : En leur conférant de telles charges, tu les empêcheras de continuer de prophétiser. Car ces charges n’apportent que des soucis à ceux qui les exercent, alors que la chekhina, sans laquelle il n’est pas de prophétie, ne réside qu’en celui qui est joyeux.]