Citation:
En quoi "l'air" d'Eretz Israël rend-il plus intelligent ?
Cela est-il toujours d'actualité ?
Pourquoi Rabbi Zira a-t-il voulu oublier la Tora de Bavel ?
En résumé, quelle différence entre Tora de houts laarets et Tora d'Israël ?
Il n’est pas dit que cet air rend plus
intelligent, mais plus
sage (Avira deErets Israel
Ma’hkim).
Certains expliquent que c’est grâce à son climat agréable, ni trop chaud ni trop froid.
C’est ce qu’écrit le
Maharal (‘Hidoushei Agadot Sanhedrin 24a).
[Il parait que les non-juifs disaient cela du climat de la ville de Lucena en Espagne.
Je tiens ça du
Abravanel (fin de Melakhim, p.680).
Son climat agréable faisait dire que l’air que l’on respire à Lucena rend plus sage.]
Voir aussi le
Sefer Habrit (Maamar IX, §16) qui l’explique aussi par la météo agréable d’Erets Israel qui favorise l’accession à la sagesse, comme l’écrit le
Ibn Ezra qui n’a pas rencontré de sages en Erets Koush (= ~ Soudan) car la forte chaleur qui y règne ne favorise pas l’accession à la sagesse.
On retrouverait l’idée dans
Kidoushin (49a) qui nous dit que sur les 10 volumes de sagesse descendus sur terre, 9 sont descendus en Erets Israel.
Voir aussi
Bereshit Raba (XVI, 4) «
il n’y a pas de ‘Hokhma comme celle que l’on trouve en Erets Israel ».
C’est aussi ce qu’il faudrait comprendre -selon le
Sefer Habrit (op cit)- lorsque les ‘Hazal disent que Jérusalem se trouve au milieu du monde, c-à-d bien placée entre l’Asie et l’Europe pour obtenir un climat idéal (cité aussi par le
Ben ish ‘Haï dans
Imrei Bina, ‘Hikrei Lev §2).
D’après cette explication, force nous sera d’admettre que ce n’est plus d’actualité comme vous le dites
[notez que les Sages n'ont jamais dit que c'était une Halakha Lemoshé MiSinaï, ni un fait immuable etc., ni même une idée admise et unanime], car il fait une chaleur infernale en été en Israël.
Le Steipler disait que c’est un phénomène récent, mais qu’il y a encore un ou deux siècles, il ne faisait pas si chaud et humide/étouffant.
Selon lui c’est une punition divine (donner un goût de Guehinom) en raison du ‘hilloul shabbat trop répandu en Israël depuis maintenant plus d’un siècle.
Donc d’après ces théories conjuguées, l’air (parfois irrespirable) d’Israël n’a plus la vertu de rendre sage.
(Plusieurs tunisiens m’ont affirmé que même s’il faisait chaud en Tunisie, on ne souffrait pas du tout de la chaleur comme on en souffre en Israël. Je crois l’avoir aussi lu dans le
Bayit Neéman de
Rav Méir Mazouz.)
Par contre, toujours en suivant cette explication, on comprendra que
Rabbi Zeira ait préféré la Torah d’Israël (et ait essayé d’oublier celle de Bavel –cf.
Baba Metsia 85a) car à son époque l’air y était agréable alors qu’en Bavel –qui était une crevasse- on avait très chaud (en été).
(c’est lui -R. Zeira- qui dit dans
Baba Batra 158b cette phrase « Avira DeErets Israel Ma’hkim »).
Le
Maharal (‘Hidoushei Agadot Sanhedrin 24a) nous dit que les sages de Bavel étaient nerveux/coléreux, alors que ceux d’Israël étaient calmes et agréables.
La Gmara
Sanhedrin (24a) dit clairement que les Talmidei ‘Hakhamim de Bavel étaient désagréables (Merourin) et brutaux dans l’étude les uns envers les autres
(‘Hovlim zé lazé bahalakha) (c-à-d qu’ils s’offensaient mutuellement), tandis que ceux d’Erets Israël était agréables les uns envers les autres.
(Bien sûr, il y a eu des problèmes en Israël aussi, à l’époque des Tanaïm où les élèves de Rabbi Akiva ne se respectaient pas mutuellement (où plus tard encore avec Rabbi Méir et Rabbi Nathan qui complotèrent pour destituer Rashbag) –et en ces temps-là, il n’y avait pas beaucoup de sages en Bavel, mais là nous parlons de l’époque des Amoraïm.
Et ça ne veut pas dire que tous les Amoraïm babyloniens étaient désagréables entre eux, nous trouvons des témoignages inverses, par exemple dans Baba Kama 80a-b, sanhédrin 29b, et autres).
Nous trouvons encore dans
Psa’him (113b) une opinion selon laquelle les Talmidei ‘Hakhamim de Bavel se haïssaient mutuellement.
Le
Divrei Shaoul (Yoma daf 9) nous dit qu’en raison de la haine gratuite qui avait cours en Bavel, les sages ne se regroupaient pas pour confronter leur avancement dans l’étude et éclaircir ensemble les parties obscures et douteuses.
Nous trouvons aussi des textes talmudiques indiquant que les dévots babyloniens étaient encore inférieurs
(en Tsidkout/Anava) aux personnes considérées dures en Israël, voir
Meguila (28b), ‘Houlin (122a), Taanit (23b).
Le
Shem Mishmouel (Vayishla’h p.42) écrit que Erets Israël correspond à shabbat et au repos, alors que ‘Houts Laarets correspond à la semaine où il faut se battre avec son Yetser…
Ceci aurait une influence sur ceux qui étudient la Torah, en fonction de là où ils se trouvent en Israël ou en ‘Houts Laarets.
S’il fallait analyser cet enseignement à la lueur des données actuelles, je dirais que les choses se sont drôlement inversées entre Erets Israel et ‘Houts Laarets !
Israël est certainement aujourd’hui le pays où les étudiants de Torah sont les plus brutaux et désagréables mutuellement.
Bien plus qu’en ‘Houts Laarets.
Donc au niveau du climat, bien qu’il y ait à présent en Israël beaucoup plus d’endroits climatisés qu’il y a 30 ou 40 ans, je ne pense pas qu’on puisse dire que le climat d’Israël soit aujourd’hui plus favorable que celui de la France.
Par contre, si on accepte de se détacher de l’explication citée, on peut interpréter
Avira [DeErets Israël] dans le sens d’ambiance/ environnement/ atmosphère plus favorable au Limoud, et c’est vrai que rares sont les endroits donnant une facilité d’accès au Limoud comme en Israël
(ce qui était faux dans le passé ; il fut un temps où les centres de Limoud hatorah se trouvaient en France, en Allemagne ou en Espagne, mais absolument pas en Israël).
Bref, R. Zeira a voulu oublier la Torah de Bavel en la remplaçant par celle d’Erets Israël, car une Torah apprise dans une ambiance de Ma’hloket ou de manque de respect mutuel, ne peut pas être pure, elle est nécessairement entachée par ces mauvaises Midot qui déteignent systématiquement sur la Hashkafa qui découlera du Limoud.
Afin d’éviter d’emporter avec lui un reste de l’ambiance qu’il fuyait, il souhaita oublier cette Torah.
Sa position ne semble pas unanime (même pour son époque -s’entend), car R. Zeira -ayant décidé de monter en Israël, évitait de rencontrer son maître R. Yehouda qui lui, s’opposait à la Aliya
(Shabbat 41a et Ktouvot 110b), c’est R. Zeira qui énonce cette formule (Avira DeErets Israel Ma’hkim) et elle s’inscrit donc dans sa Shita visant à valoriser tout ce qui est lié à Erets Israël, mais on peut supposer que Rav Yehouda qui ne partageait pas son opinion, n’adhérait pas non plus à cette formule.
J’ai lu aussi dans le
Beit Elokim (du Mabit) (Shaar Hayessodot §34 -Jérusalem 1985, p.363) qu’il explique de manière plus mystique cette idée : Adam ayant été créé à partir de la terre d’Erets Israel, lorsque D.ieu lui insuffla Nishmat ‘haïm, [un peu de] ce souffle divin s’est répandu localement (et donc en Israël) et c’est aussi la raison pour laquelle la prophétie s’exprime essentiellement en Israël.