Rav Adin Steinsaltz

Chalom Rav Wattenberg.

Je fais suite à ce que vous avez dit dans ce message :

https://www.techouvot.com/viewtopic.php?p=34595#34595

... concernant ce que vous disiez, à savoir, je vous cite :

[quote="Rav Binyamin Wattenberg"][quote] vous ne parlez pas de l'edition Steinsaltz (en hébreu). Pour ma part, je la trouve très compréhensible. [/quote]
Je ne la connais pas trop, mais elle semble en effet bien conçue.
L'explication y sera moins explicite que dans Artscroll, mais les précisions sur les dates, l'identité des personnages, la nature des objets et des animaux mentionnés, sont bien plus riches que dans Artscroll.
À chacun de trouver son bonheur.

Il y a une trentaine d'années l'auteur avait été « excommunié » ('herem) par plusieurs rabanim, mais le 'herem a été levé depuis parait-il, suite à un amendement oral.[/quote]


Je voudrais vous demander pourquoi le Rav Steinsaltz avait été mis en 'Herem ?


Merci d'avance pour votre réponse.
Kol Touv.

C'est compliqué (-comme souvent), mais pour faire simple, vers la fin des années 80 (je crois que c'était vers 1988, ou 89?), plusieurs rabbanim d'Israël ont condamné les écrits de R. Steinsaltz.

Parmi eux:
Rav Shakh,
Rav Elyashiv,
Rav Nissim Karélitz,
Rav Steinman,
Rav Wozner,...

Bref, "du lourd", vous en conviendrez.

La critique essentielle et unanime, de mémoire, était qu'il aurait écrit quelques phrases méprisantes à propos de Tanaïm (et peut-être aussi d'Amoraïm, je ne m'en souviens plus), critiquant leur caractère et les jugeant comme de vulgaires personnages, le tout sur un ton hautain.

Rav Shakh s'opposait aussi aux vulgarisations du Talmud (il s'est aussi opposé aux gmarot Artscroll), mais c'est plus compliqué à expliquer.

D'un autre côté, R. Steinsaltz avait pour sa défense le Rabbi de Loubavitch et Rav Ovadia Yossef.
Comme ces deux derniers Rabbanim étaient eux aussi très vivement contestés par le premier groupe rabbinique que j'ai cité, personne -dans le milieu orthodoxe lituanien en Israël ne faisait cas de que pouvaient penser le Rabbi de Loubavitch ou Rav Ovadia Yossef.
Au contraire, le fait qu'ils soutiennent ce "renégat de Steinsaltz" prouvait bien leur perversion ou du moins leur inconséquence.

Bref, à cette époque, dans les yeshivot classiques, les livres et Gmarot Steinsaltz étaient considérés "Mouktsim Ma'hmat Miouss".

D'autres Rabbanim, qui ne sont pas liés au monde des Yeshivot lituaniennes, mais plutôt liés à Loubavitch ou à la Medinat Israël (comme ROY l'était), ont soutenu les livres de R. Steinsaltz.

Parmi eux:
Rav Lau
Rav Isser Frankel (Rabanout de Tel Aviv, beau-père de Rav Lau)
Rav Néria
Rav Zewin
Rav Mordekhai Eliahou

Mais aussi des Rabbanim américains comme Rav Moshé Feinstein (qui donnait des Haskamot très facilement et un peu à tout le monde, donc ça n'a pas dérangé les rabbanim israéliens) qui était déjà décédé lors du "'Herem" contre les sfarim de R. Steinsaltz. Et un Rav canadien, Rav Pinhas Hirschprung, grand Baki, fort sympathique, mais assez déconnecté de la "politique religieuse" et des rabbanim israéliens.

Concrètement, le monde des grandes yeshivot et des Gdolim Lituaniens d'Israël était opposé aux sfarim de R. Steinsaltz.

Les Yeroushalmers aussi, bien entendu. Le Badats de Jérusalem publia officiellement une condamnation de certains de ses livres.

Il y a eu une réaction de la part de R. Steinsaltz, une sorte de Mea Culpa dans lequel il s'amendait, reconnaissait que certains de ses livres comportaient des phrases intolérables et insultantes vis-à-vis des maitres du Talmud, qu'il le regrettait profondément, qu'il allait apporter les corrections qui s'imposent et qu'il s'engageait à échanger les anciennes éditions contre les nouvelles, corrigées, à toute personne qui lui renverrait un livre incriminé.

Il a aussi été question de se justifier en expliquant qu'il n'était pas l'auteur de ces tournures irrespectueuses, mais qu'il faisait appel au service d'un (ou plusieurs?) nègre(s) qui écrivait pour lui ses livres...

ça a pris un peu de temps, ça n'a pas marché pour tout le monde, mais il a réussi à redorer un petit peu son blason.
Disons qu'il n'était pas autant mal vu en 2010 qu'en 1990, ses dix dernières années étaient plus paisibles, mais ses livres ne pénètrent toujours pas dans les milieux 'harédim, il me semble, et encore moins dans les Yeshivot (classiques).