Citation:
J'ai entendu un Rav dire que les gens ont l'habitude de croire que Tosfot est plus difficile à étudier que Rachi, alors que c'est l'inverse !
Il explique que, certes, Tosfot est difficile à étudier mais il a « l'avantage » d'être plus long et plus explicite, et que si l'on suit correctement les Tosfot pas à pas dans leurs résonnements, alors on peut avoir une idée assez claire de ce qu'ils écrivent.
Tandis que rachi semble le plus souvent simple à étudier et à comprendre, et qu'il peut arriver des fois où l'on se dise qu'on savait déjà ce que Rachi est en train d'expliquer/de commenter - c'est-à-dire qu'on aurait pu se passer de certains commentaires « simple » ou « logique » de Rachi parce qu'on aurait compris tout seul ce qu'il écrit - alors que ce n'est pas le cas du tout. Car si l'on croit qu'on a compris Rachi en se disant que son commentaire/explication est basique ou élémentaire et qu'on l'aurait su tout seul, alors cela veut dire que l'on n'a pas compris ce que rachi dit.
En gros, ce Rav à dit que Rachi et tosfot, c'est la même école, c'est le même travail.
Mais ce que Tosfot explique/commente en dix lignes, Rachi le fait en trois mots.
Ce même Rav a ramené une phrase de (Léhavdil) Emmanuel Kant disant qu'il y a des livres qui seraient plus rapide à lire s'ils étaient moins court.
Pourtant, j'ai lu ce que vous avez dit sur ce site, par exemple sur ces fils de discussions :
https://www.techouvot.com/comment_etudier_un_tosfot-vt17864.html
https://www.techouvot.com/connaissances-vt15039.html
https://www.techouvot.com/etudier_tosfot_ou_pas-vt8029181.html .
Et d'après ce que vous dites, il n'est pas nécessaire d'étudier tosfot quand on est débutant, que le Maharal était contre le fait que les commentaires de Tosfot soient imprimés avec la gmara et les commentaires de Rachi, qu'il faut étudier « convenablement ».
Ne pas perdre de vue que le but n'est pas de comprendre le tosfot, mais de comprendre la gmara, etc.
Vous parlez de tout ceci plus en détail ici : https://www.techouvot.com/viewtopic.php?p=42865#42865
Et de plus, les commentaires de Rachi sont étudiés plus systématiquement que Tosfot, même chez les jeunes étudiants, en considérant que « Rachi, c'est la base (pour comprendre la Gmara) ».
J'ai donc du mal à comprendre comment ça se fait qu'on n'étudie pas tosfot s'il est sensé être « plus simple » que rachi.
Bref : comment comprendre tout ceci ?
Est-il vrai que Rachi est plus compliqué à apprendre/comprendre que Tosfot ?
Tout d’abord votre contradiction n’en est pas une, et ensuite, ce qu’on vous a dit a mal été dit -ou mal compris.
La contradiction n’en est pas une car quand bien même Rashi serait plus difficile et profond, il n’en demeure pas moins une différence fondamentale entre Rashi et Tosfot; alors que ces derniers soulignent des contradictions et élaborent des réponses, Rashi se présente comme une aide à la compréhension du texte.
Voilà pourquoi il resterait logique de s’intéresser en premier lieu à Rashi, car avant de se lancer dans des questions comme on en trouve dans les Tosfot, il faut d’abord tenter de comprendre ce que l’on a sous les yeux.
Ceci étant dit, il est faux de dire que lire Rashi représente une plus grande difficulté que de lire Tosfot. Si vous ne me croyez pas, faites le test vous-même.
Ce que ce Rav voulait certainement dire, c’est qu’il y a CERTAINS commentaires de Rashi qui, bien que pouvant se lire naturellement, si l’on s’arrête un peu dessus, on remarque qu’ils sont formulés d’une certaine manière et on comprend que Rashi venait « désamorcer » une difficulté, en mettant en avant d’emblée les éléments qui manquent à celui qui se pose la question.
Toutefois, j’écris « certains », car je ne souscris pas à la position rabbinique insistant sur le fait que CHAQUE Dibour de Rashi comporterait des profondeurs abyssales et qu’il n’y aurait aucun commentaire « anodin » où Rashi viendrait simplement faciliter la compréhension, sans comporter de grands mystères, ni tenter de répondre à de grandes Koushiot.
Rav Dovid Feinstein indiquait cela à partir du premier Rashi du
Daf 42b dans
Sanhédrin, au début du Perek Nigmar Hadin. Sur les mots Nigmar Hadin,
Rashi commente : Le’hova.
Une analyse honnête pousse à reconnaitre qu’il a raison, Rashi n’apporte pas un grand ‘Hidoush, on aurait pu se passer de son commentaire, bien qu’il soit le bienvenu pour faciliter la lecture.
Vous admettrez qu’un tel Rashi, dans la mesure où l’on accepte qu’il ne vienne pas changer radicalement le Pshat que l’on aurait pu avoir de la Souguia sans lui, n’est pas plus compliqué à étudier que le Tosfot.
Il y a effectivement certains commentaires de Rashi qui sont très compliqués, mais la difficulté n’est pas vraiment au niveau du déchiffrage, c’est plutôt qu’on se demande pourquoi il apporte une précision à première vue superflue.
Tandis que dans les Tosfot, la difficulté relève le plus souvent d’un manque de clarté et d’une mauvaise formulation de leur part.
Les Baalei Hatosfot ne se sont pas enquiquinés à rédiger de manière claire pour le novice qui débarque et tente de les comprendre, ils n'imaginaient pas forcément qu’on puisse se mettre à les lire dans avoir préalablement étudié la massekhet, voire tout le Talmud.
C’est pour cela qu’ils citent des phrases d’autres traités pour indiquer leur difficulté/Koushia et ne prennent pas la peine d’expliquer le contexte duquel ces passages sont extraits, tant ils sont sûrs que le lecteur les as déjà étudiés…
A part ce point commun à tous les Baalei Tosfot, il faut savoir qu’il y a aussi une autre difficulté qui découle de la faiblesse de certains auteurs en matière de rédaction.
Pas tous les auteurs de Tosfot étaient des champions de la rédaction.
Rashi a travaillé sa rédaction, il a repris son commentaire à trois reprises afin d’en épurer le style, d’affiner ses explications, de préciser ses gloses, voilà pourquoi, généralement les difficultés dans Rashi ne sont pas liées à une rédaction absconse. Alors que dans les Tosfot, c’est autre chose. Parfois la difficulté ne vient que d’une mauvaise formulation de l’auteur.
A ce propos, il est bon de savoir qu’il est souvent bénéfique de consulter le Tosfot Harosh, il s’agit d’un recueil de Tosfot rédigés par le Rosh, ce dernier savait bien écrire, et comme les questions que traitaient les tossafistes étaient souvent les mêmes, on retrouve fréquemment la même question que dans le Tosfot imprimé dans la Gmara, mais énoncée de manière beaucoup plus claire.
En conclusion :
1) Il est normal de commencer par Rashi.
2) La difficulté dans Rashi n’est pas de la même nature que celle que l’on rencontre dans Tosfot.
3) Il y a des commentaires de Rashi qui sont très simples et ne renferment aucun secret.
4) Il y a des Tosfot qui sont difficiles d’accès en raison d’une mauvaise rédaction.
5) Le Rosh a écrit des Tosfot qui peuvent aider à comprendre les questions des Tosfot imprimés dans le Shas.