« Et l’homme (ha-ich) Moïse était très humble… » (Bamidbar 12, 3).
Que vient nous apprendre ici le mot ha-ich, qui semble superflu ? N’aurait-il pas suffi que la Tora nous dise : « Et Moïse était très humble », sans plus ?
Pour comprendre cet ajout, il faut se reporter au verset de I Samuel (15, 17) où le prophète Samuel déclare au roi Saül : « N’est-ce pas, si tu es petit à tes propres yeux, tu es à la tête des tribus d’Israël, et Hachem t’a oint comme roi sur Israël ? »
Ce verset sous-entend un reproche adressé au monarque, celui d’être « petit à ses propres yeux », c’est-à-dire celui d’être humble à l’excès. Et c’est cette humilité démesurée qui vaudra plus tard à Saül, après qu’il aura épargné Agag au mépris des ordres divins, d’être rejeté par Hachem (verset 23).
Cette comparaison entre l’humilité de Moïse, que la Tora considère comme une vertu éminente, et celle du roi Saül, nous montre qu’il est indispensable, pour qu’elle soit portée au crédit de celui qui la pratique, qu’elle se rééquilibre par de l’autorité.
Ramban (Nahmanide) établit dans son commentaire de Chemoth 33, 11 une comparaison entre les mots na‘ar et ich. Josué y est appelé na‘ar, terme employé souvent pour désigner un jeune garçon, alors qu’il était âgé de cinquante-six ans au moment que décrit ce verset.
Le mot na‘ar, explique ce commentateur, renvoie à l’idée de subordination, par opposition à ich, terme qui possède quant à lui une connotation d’autorité.
En présentant « l’homme » Moïse comme étant très humble, la Tora nous apprend ainsi que sa modestie n’avait d’égale que la conscience qu’il possédait d’être investi d’une autorité et d’une responsabilité, celle de guider les enfants d’Israël. A l’image de Hachem qui est ich mil‘hama en même temps qu’Il est miséricordieux, Moïse a associé modestie et pouvoir.