La Tora nous apprend que, lorsqu’un homme a eu deux épouses, l’une aimée et l’autre haïe, et qu’elles lui ont donné l’une et l’autre des fils, il ne pourra pas favoriser, en matière successorale, le fils de celle qu’il aura aimée aux dépens de celui de la femme qu’il aura haïe (Devarim 21, 15 et 16).
D’où la question, posée par le Da‘ath zeqènim (ad loc.) : Comment Jacob a-t-il pu préférer Joseph, le fils de Rachel, la femme qu’il avait aimée (Berèchith 29, 18), à Ruben, son aîné par l’âge, dont il avait « haï » la mère, Léa (Berèchith 29, 31) ?
Et de répondre que Ruben avait gravement péché envers son père (Berèchith 35, 22), tandis que Joseph l’avait nourri.
En conséquence de la faute de Ruben, son droit d’aînesse a été légué à trois de ses frères : Lévi a reçu la prêtrise ; Juda, la royauté ; et Joseph une part double en Erets Yisraël, en la personne de ses deux fils, Manassé et Efraïm.
On peut ajouter que l’histoire a ratifié ce choix, et qu’elle a de plus confirmé cette dépossession : Ni Ruben, ni Gad, l’aîné de Zilpa, ni dans une certaine mesure Manassé n’ont recueilli de quote-part en terre de Canaan.
J’ai évoqué récemment dans ce même site, sous le titre : « Parachath Waye‘hi – Que devient le droit d’aînesse ? », les avatars et les paradoxes qu’a connus, dans le récit de la Tora, l’institution du droit d’aînesse. Ceux-ci vont dans le même sens.
J’ajoute que notre histoire s’est déroulée sur deux plans : le summum de sainteté de nos patriarches, et les erreurs qu’ils ont commises. Ces deux plans doivent être tenus soigneusement à l’écart l’un de l’autre.