Je ne sais que vous dire, ça me semble évident:
lorsqu'on veut citer plusieurs personnes, quoi de plus pratique que de citer les fils de Yaakov dont tout le monde connait les noms et les retient dans un certain ordre?
Ainsi, lorsqu'on fait entrer Lévi en scène, on sait que c'est un troisième personnage, ou Yehouda un quatrième etc.
Parler de Avraham Its'hak et Yaakov, en dehors du manque de personnages parfois (si on veut parler d'une situation à quatre protagonistes), n'est pas aussi parfait car cela installe une hiérarchie entre eux (père, fils, petit-fils), alors que les noms des shvatim rend bien l'idée de personnes vivant à la même époque, plus ou moins du même âge et qui peuvent avoir un différend.
D'ailleurs dans certains cas, lorsqu'on veut parler de couples mariés, on ne cite pas ces noms car on ne connait pas toujours les noms de leurs épouses, on préfère alors citer les Avot... Ainsi, lorsqu'on dit "Rivka", il est facile de se souvenir du nom que l'on a attribué à son conjoint dans notre "cas d'école".
Personnellement, pour des raisons compliquées à transmettre par écrit, lors des cours que je donne, je n'utilise pas les sempiternels Reouven et Shimon comme exemples, mais plutôt Anatole et Boniface, Cyprien, Damien et Eugène, mon choix n'est pas fixe, mais j'essaie de garder une cohérence ou un ordre (comme ici, l'ordre alphabétique).
Il n'y a aucune nécessité de prendre pour exemple Reouven et Shimon.
Au passage, dans le Piroush Hamishnayot du Rambam sur Guitin (IX, 5) imprimé dans le Shas Vilna (classique) Guitin daf 116a, il cite pour exemple deux témoins qui signeraient sur un Guet en les nommant Reouven (ben Avraham Ed) et Shimon (ben Yaakov Ed) (il aurait pu dire ben Its'hak...), puis deux témoins qui auraient signé en grec (c'est le cas dont parle la mishna, la particularité est que le grec s'écrit de gauche à droite, pas comme l'hébreu...) et pour exemple d'autres noms il donne alors:
Jacob filius Dan testis
Gad filius Natan testis
On remarque qu'il n'a pas eu peur des variantes et d'un peu de folklore.
On remarquera aussi que c'est du latin et en caractères latin, alors que le Rambam parlait de signatures en grec (dont la mishna parle).
Comme je trouvais étrange qu'il écrive en latin surtout lorsqu'il aurait dû le faire en grec, j'ai vérifié le manuscrit du Rambam (hé oui!) et j'y ai constaté qu'il n'a rien écrit ni en latin ni en grec, mais il a écrit deux noms avec des caractères hébraïques inversés et en partant de la gauche (car c'était le point particulier de cette halakha), je ne sais pas s'il faut en déduire qu'il ne connaissait pas le grec (il a écrit son piroush hamishnayot entre ses 23 et 30 ans).
Quoi qu'il en soit, je remarque que ses exemples mêmes n'ont pas été respectés par les copistes, car il n'écrit pas (à l'envers) Yaakov ben Dan et Gad ben Natan, mais deux autres noms:
Yehouda ben Its'hak et David ben Its'hak
(étrange qu'il n'ait pas différencié les noms des pères afin d'éviter de faire penser à deux frères).
Et nous voyons donc que le Rambam ne s'astreignait pas à suivre les noms des shvatim dans l'ordre (ou des Avot) et s'est même permis un petit extra avec David.
Il y a encore d'autres sources où l'on voit que les Rishonim savaient parfois trouver d'autres prénoms que "Reouven-Shimon", mais je voulais signaler celle-ci pour l'information basée sur le manuscrit du Rambam qui ne correspond pas du tout à ce qui est imprimé en son nom à la fin des gmarot.