Citation:
Pourriez-vous me dire qui est l'auteur de ce texte svp - le site indique le Ramban mais c'est visiblement une erreur…
J'ai essayé de chercher sur internet, c'est peut-être Itshak ben Chlomo Al-Ahdab, mais je n'en suis pas sûr.
Le texte:
https://www.sefaria.org/Letter_from_Ramban_to_his_Son.1?lang=he&with=all&lang2=he
Effectivement, ce n’est pas le Ramban qui a écrit ça, ils ont inscrit
Ramban car, j’imagine, ils ont trouvé ce texte sur internet, pris du
JQR (The Jewish Quarterly Review Vol. 5, No. 1 (Oct., 1892), pp. 112-117), grand périodique anglais du XIXème siècle (c’est la
REJ des anglais).
Or, comme ce texte reproduit intégralement la fameuse lettre du
Ramban (ainsi qu’une autre lettre du Ramban, moins connue), ça apparait dans un article du
JQR à propos du
Ramban, d’où l’erreur.
Vous proposez que ce soit
Its’hak ben Shlomo ben Tsadik Al-Ahdab, mais je n’ai pas l’impression que ce soit l’auteur de notre lettre.
Tout d’abord, le nom de l’auteur est
Shlomo ben Hakadosh Rabbi Its’hak ben Tsadok. Donc ce n’est pas
Its’hak ben Shlomo mais
Shlomo ben Its’hak, venahafokh hou.
Aussi, a priori, ce n’est pas «
Ben Tsadik », mais «
Ben Tsadok », bien qu’il soit possible qu’un Youd ait été un peu trop allongé et soit devenu un Vav.
Aussi, en lisant son texte, il ne ressemble pas à un poète mathématicien et astronome espagnol.
En admettant que son nom nous ait été convenablement retranscrit, on n’en sait pas beaucoup plus sur lui, c’est un manuscrit qui n’a pas été daté et l’auteur est un illustre inconnu.
Je peux vous indiquer quelques idées personnelles, à prendre avec des pincettes, juste pour essayer de le situer :
Son père a été tué « Al Kidoush Hashem », le prénom de son grand-père paternel (Tsadok) laisse supposer une contrée ashkenaze, il accorde au féminin le mot Daf, cela indique une certaine ancienneté, de nos jours on dit « un daf ». Mais je ne crois pas que cela puisse indiquer une région plus qu’une autre, on retrouve cet accord chez les Sfaradim comme chez les Ashkenazim.
De manière générale, sa mentalité ressemble plus à une mentalité ashkenaze du XIV-XVème (ou XVIème) siècle: sans être un 'Hassid ascète, il se concentre beaucoup sur le fait de ne pas profiter de ce monde-ci
(tout en s’autorisant 3 verres de vin par repas en semaine), ça n’est pas un espagnol du XIIIème-XIVème siècle.
Cependant, il indique le nom d’un poisson en arabe. Certes il écrit que c’est son nom « en arabe » et il n’écrit pas « dans notre langue », donc il ne parlait pas l’arabe tous les jours, mais on croirait qu’il le comprenait, ce qui ne colle pas avec un ashkenaze
(peut-être que ce poisson était appelé par son nom arabe pour une quelconque raison).
Cependant, on voit qu’il voyageait beaucoup
(et a pu apprendre des mots de langues étrangères) puisqu’il parle de faire des prières chaque nuit qu’il passera à la maison chez lui, c’est donc qu’il ne dormait pas tous les soirs chez lui.
Aussi, il parle de « à chaque fois que je devrais faire Hagomel ». Il devait voyager pour ses affaires, peut-être qu’il vendait du tissus et des habits, car il en parle aussi.
Comme mentionné, il parle de se lever la nuit pour prier, mais il ne parle pas des prières fixées pour ce moment ni n’appelle ça «
Tikoun ‘Hatsot » qui est une appellation tardive
(probablement du XVIème siècle), ni n’indique que cela doive se faire au moment de ‘Hatsot. C’est juste l’habitude que les gens avaient de se réveiller au milieu de leur nuit, et les plus pieux en profitaient pour prier, voir ce que j’ai écrit ici :
https://www.techouvot.com/viewtopic.php?p=52876#52876 ).
Il appelle le
Rambam «
Rabénou Moshé », ce qui est devenu trop imprécis depuis le XVIIème siècle.
Il parle aussi d’achat d’esclaves, cela indique encore l’époque des Rishonim ou tout début A’haronim.
Cela s’ajoute à plusieurs éléments qui indiquent une situation financière confortable, probablement à partir d’une base héritée car ses pères étaient des fondateurs de synagogues et Batei Midrashot.
(Ses repas l’indiquent aussi, viandes et poissons, vin etc. Aussi, les Knassot qu’il s’impose tournent souvent autour de la nourriture et de l’argent.)
D’un autre côté, il recommande à ses enfants de veiller à consacrer au moins un de leurs fils au Limoud. C’est une idée plus tardive qui indique le début des A’haronim.
Il écrit son testament à un âge où encore aucun de ses enfants n’est marié, l’espoir qu’il exprime d’assister à leurs mariages est lié à une longévité plus courte, mais ça n’indique pas grand-chose, car c’était le cas jusqu’au XXème siècle.
Il y a plusieurs considérations halakhiques qui indiquent au moins deux siècles d’ancienneté
(le calcul du Maasser, le fait de le prélever une fois par an, le rapport à Seouda Shlishit, Shnayim Mikra…), parmi d’autres bizarreries halakhiques qui ne s’expliquent pas plus aisément à une époque qu’une autre
(il semble considérer comme de la ‘Hassidout le fait de ne pas maudire autrui avec le Shem ! Ou encore de faire la prière 3 fois par jour, …).
Il buvait beaucoup de vin, 3 verres par repas de semaine, 4 par repas de Shabbat & fêtes, incluant Rosh ‘Hodesh.
Et semblait bien manger.
Il a pris sur lui en tant que ‘Hassidout de ne pas manger d’un poisson (Barbouta) dont la Kashrout était très discutée parmi les Rishonim, inscrire cela dans une liste de Takanot/Gdarim qu’il s’impose, laisse entendre que c’était un combat…
Idem pour le vin, limiter à 3 verres pour les repas de semaine et 4 verres pour ceux du Shabbat, est un effort religieux de sa part.
Voilà quelques éléments glanés à la lecture du document, mais s’il ne nous est connu que par son testament, on ne pourra pas en savoir beaucoup à son sujet.